Ô30, c’est cet élégant restaurant situé au… 30 rue des Juifs – exclamations de « ah mais c’est pour ça » dans l’assemblée. Ayant pris le relais de la réputée pizzeria Chez Matteo (un temps Chez Didier), Wilfried et le chef Seydou ont ouvert les portes de ce resto en novembre 2022, après plusieurs mois de travaux.

Depuis, l’adresse a su rester dans les coeurs et les estomacs des Strasbourgeois(es), charmé(e)s par « l’afro-fusion ». Sous ce terme un peu abstrait, se cache une philosophie simple pour Wilfried et le chef Seydou : reprendre les classiques de la gastronomie française, à leur sauce – et les sauces sont absolument folles, on va y revenir.

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Une ambiance élégante mais pas guindée

Mais avant de vous mettre l’eau à la bouche, parlons un peu ambiance. Quand on entre dans le restaurant, on remarque une décoration simple et épurée, relevée par des coussins de couleurs disposés un peu partout sur les banquettes.

Un mélange des genres réussi, entre le calme et l’envie de fête. Une volonté de Wilfried pour l’Ô30 : « Je voulais faire quelque chose de différent, un lieu convivial, où l’on se sent comme à la maison. J’aime accueillir les gens comme j’accueillerais la famille et les amis. Un très beau service, mais pas guindé. »

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Le Strasbourgeois d’adoption [cela fait 11 ans qu’il est à Strasbourg, ndlr] a notamment fait ses armes au Chut, ce discret restaurant de la Petite France, où il a appris le travail en salle et ce qu’il appelle le « bon service ». Cela lui a donné envie de créer une ambiance élégante, mais détendue : « Ce que je préfère, c’est quand un client rentre, il est fatigué, il tire la tronche, tu sens que ça va être compliqué. Le but du jeu, c’est leur redonner le sourire, moi c’est ce que j’aime. »

Une envie et un besoin de liberté

Voulant à un moment voler de ses propres ailes, Wilfried envisage d’avoir sa propre affaire. C’est là qu’il rencontre le chef Seydou. Ça marche direct : le chef a déjà son concept, ils s’associent et ils y vont.

Avec une envie : faire ce qu’ils veulent, comment ils l’entendent. Wilfried précise : « Ce que je faisais pour les autres, autant le faire pour moi. Là tu es le décideur final, tu peux faire les choses à 110%, créer le lieu comme on l’imaginait, à notre image. »

Passé par le lycée hôtelier Alexandre-Dumas, le Buerehiesel ou encore le Piano Grill, le chef Seydou avait lui aussi grandement besoin de (re)trouver sa liberté : « De l’étoilé au bistronomique, t’es pas libre. C’est cool, mais t’as un cadre, dont tu ne peux pas trop sortir. Tu te fonds dans un moule, et t’es obligé de te restreindre. Là, chacun est libre de ramener son identité et de la poser sur la table. »

Les deux hommes se divisent alors l’organisation du restaurant : à Wilfried l’administratif, le service en salle et la carte des boissons. Au chef Seydou le reste : « Seydou s’occupe de la cuisine, moi j’y mets pas mon nez, je sais qu’il est super bon. Lui a donc la liberté de faire ce qu’il veut, avec sa créativité de fou. »

Une créativité sans borne, qui pousse le chef a constamment improviser sur sa carte, qu’il change tous les deux mois, selon les produits mis à sa disposition. Avec toujours comme envie de ne pas faire comme tout le monde : « L’entrecôte classique ça ne m’intéresse pas ; pour moi ce n’est pas le but. Quand les gens viennent ici, il faut qu’ils mangent ce qu’ils ne mangent pas ailleurs, qu’ils découvrent des saveurs qu’ils ne découvrent pas ailleurs. C’est ça l’objectif. »

Une cuisine française généreuse et sincère, avec un bon coup de peps afro

Et justement, qu’est-ce qu’on mange à l’Ô30 ? En entrée, les accras de niébé (poudre de haricot) et morue, sauce albuféra (au foie gras) et oeufs de saumon, le gravlax au saumon, sabayon wasabi ou la soupe wonton (soupe aux raviolis) au poulet et tofu vous emmèneront aux quatre coins de l’Afrique. Mention spéciale aux saveurs asiatiques et thaï qui garnissent la soupe, énorme coup de coeur. Le travail des sauces, grand classique de la gastronomie française, est particulièrement réussi.

Pour les plats, les estomacs se raviront d’un poisson grillé à l’ail doux, alloco, attiéké et sauce verte, ou encore d’un pithiviers de pigeonneau aux morilles et jus court bissap, actuellement le plat préféré du chef. Mention spéciale également au filet de boeuf, si simple mais tellement mis en valeur par la croûte de café Touba du Sénégal.

En dessert, on se jettera sur la crème brûlé au corossol (fruit exotique d’Amérique du Sud), crumble et tuile cacao et son caramel au beurre salé et sur le baba au rhum des Antilles, crémeux citron combava. Le tout, avec un petit café pour digérer toutes ces saveurs.

Vous l’aurez sans doute compris : en plus de l’excursion culinaire aux quatre coins de l’Afrique que nous offre le chef Seydou, la cuisine de l’Ô30 est faite d’improvisation, de spontanéité, avec un énorme amour des produits et du travail bien fait. Cela se sent, ça fait plaisir et ça donne tout de suite une autre saveur à l’expérience.

C’est finalement ça la meilleure définition de « l’afro-fusion » : reprendre des classiques de la gastronomie française, mais en y rajoutant de l’audace, de la créativité et de la sincérité. Comme le dit le chef Seydou : « L’authenticité c’est moi, les plats je les fais de la manière dont je sais les faire et dont je prends plaisir à faire. » On ne va y aller par quatre chemins : on l’a senti, on a été touché, et on s’est absolument régalé.

Les petits et gros +

• Pour le midi, comptez 13 euros pour le plat du jour, 17 euros pour entrée/plat ou plat/dessert et 22 euros pour le menu entrée/plat/dessert. En plus, le café est offert ! Un rapport qualité prix quasi imbattable.
• Chaque midi, l’entrée, le plat et le dessert changent. L’occasion de revenir plus d’une fois par semaine ! Et tous les vendredis, c’est poisson le midi.
• Pour le soir, comptez 70€ de ticket moyen, avec boissons. À ne pas manquer pour célébrer une belle occasion.
• Pas de proposition végé à la carte, mais le chef Seydou se débrouille toujours pour réaliser des plats sur demande, à l’instant présent. Des créations uniques.

• Tout est sans gluten, sauf le pain.
• Tout est fait maison, notamment les sauces qui sont incroyables.
• Une vraie réflexion est faite sur la carte des cocktails avec des classiques revisités : gin tonic avec poivre du Cameroun, Negroni avec de la coco dedans, Rhum bissap maison, ou Espresso Martini Touba. Et pour ne rien gâcher, les mocktails sont excellents !
• Les propositions de vin changent régulièrement, toujours pour accompagner au mieux les plats du chef. Ne jamais hésiter à demander conseil à Wilfried, passionné de vin devant l’éternel.
• Les invendus sont réutilisés dans la sauce suprême du chef. Rien ne se perd, tout se transforme.

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