Congés menstruels, réduction du temps de travail pour les ATSEM et semaine de 4 jours : l’Eurométropole de Strasbourg a annoncé plusieurs mesures pour “redonner du sens au service public”. Objectif ? « Redorer l’image de la collectivité » pour ses agent(e)s, présent(e)s comme futur(e)s.
Il régnait presque une ambiance de bac de philo ce lundi 19 septembre au centre administratif. Les professeurs ? Syamak Agha Babaei et Valentin Rabot, vice-président de l’Eurométropole en charge du personnel, des ressources humaines et du dialogue social. Le sujet ? Le travail, avec une question : « Est-ce que c’est le nombre d’heure pour une mission qui est important ou est-ce que c’est accomplir la mission ? ». À vos stylos.
Face à la « mutation profonde du travail » et le changement de conception qui est en train de s’opérer, l’Eurométropole est confrontée « comme beaucoup de collectivité à un certain nombre de difficultés en matière de recrutement lié à l’attractivité ».
Les problèmes sont nombreux : pénurie de compétence, manque d’inclusion et de diversité dans les recrutements et perte de sens du service public.
La réputation de la « maison Eurométropole » est donc en péril, mais Valentin Rabot et Syamak Agha Babaei ne regardent pas ailleurs. C’est d’ailleurs l’objectif des travaux menés par la collectivité depuis plusieurs années : « Il y a une culture à changer. Cela passe par créer des rythmes de travail qui correspondent aux aspirations personnelles et professionnelles et mieux reconnaître la santé au travail ».
Les deux élus égrainent ainsi quelques mesures prises : 300 emplois créés, même si tous n’ont pas encore trouvé preneurs, les salaires des filières sociales culturelles et association, majoritairement féminines, rapprochés de ceux des filières techniques, majoritairement masculines. Mais cela ne suffit pas, et c’est pour cela que la métropole veut aller plus loin.
Une expérimentation de la semaine de 4 jours
Ça y est : après un cours didactique de près de 30 minutes sur le travail et l’emploi, on passe enfin aux livrets des solutions. La première piste est celle d’une expérimentation de la semaine de 4 jours. En gros : travailler un jour de moins, pour mieux concilier vie professionnelle et vie personnelle, dans un « management de la confiance plutôt que du contrôle ».
Testée à la métropole de Lyon depuis le 1er septembre, Strasbourg semble désormais prête à se lancer dans l’aventure. Et ce contrairement à il y a deux ans, où Syamak Agha Babaei déclarait dans nos colonnes que « pour l’instant, il n’y a pas de priorité politique accordée à cette question ». Pour les 390 Atsem de la collectivité, le concret de cette décision est déjà là : leur temps de travail passera de 35h à 32h, payées 35.
Et si, à Strasbourg, on tentait d’instaurer la semaine de 4 jours ?
À partir de début 2024 et pendant un an au moins, l’expérimentation se déroulera donc sous la forme du volontariat des 7 000 agent(e)s et des services de la collectivité. En revanche, niveau mise en application, le grand flou règne : « Tout le monde peut se rendre volontaire », mais l’Eurométropole mettra en place la mesure seulement « pour un panel représentatif mais pas trop nombreux » – soit quelques dizaines ou centaines de personnes.
Il faudra ensuite « voir avec les chefs de services » comment appliquer la chose, en gardant en tête que « la continuité du service public doit prévaloir »… Bref, pour faire court, les chefs de services décideront. Et vous voyez sans doute arriver la question : et s’ils ne jouent pas le jeu ? Valentin Rabot se dit confiant, lui « l’optimiste de nature » : « C’est possible que les managers ne jouent pas le jeu mais à ce moment-là on va discuter ». Il faudra rester vigilant.
Les prémices d'une réflexion sur l'instauration d'un congé menstruel
Autre réflexion amorcée par la collectivité : l’instauration d’un congé menstruel. Une question « complexe » selon le premier adjoint dans son interprétation et sa mise en place : « Certaines communes en font un jour maladie, qui peut être vécu comme stigmatisant. Si c’est un jour offert à tout le monde, comment faire la distinction en étant dans le cadre de la loi ? ». Des réflexions qui font également débat à l’échelle nationale.
Briser le tabou : ces Strasbourgeoises souffrent d’endométriose
Pour y réfléchir et présenter un projet qui tienne la route, Syamak Agha Babaei annonce alors la création d’une commission interne avec les agents de la collectivité, les élues et élus en charge de ces questions et les associations, afin de « vérifier que ce qu’on met en place puisse rencontrer une adhésion sur le territoire ».
Objectif ? Arriver en 2024 avec un dispositif rodé, pour lancer une expérimentation. Pour redorer son blason, l’Eurométropole n’hésite pas à bousculer les codes du travail.