La victoire, Créon, n’est pas toujours si belle ;
La honte et les remords vont souvent après elle.
Jocaste. Jean Racine ; La Thébaïde, I, 5 (1664)
Voilà qui résumerait cette tragédie ;
Deux heures trente de vers en alexandrins,
Arrivant déclamés en rimes à mon ouïe,
Deux heures trente portées par huit comédiens,
Des amateurs mais dont ils n’ont que le nom,
Vu le talent de cette représentation.
Moi (2016)
(et oui ce passage a nécessité 37 minutes de travail et de réflexion)
Et bref tout ça pour vous dire que j’ai vu une pièce de Racine. Car oui, J’AI VU UNE PIECE DE RACINE ! Bon une répétition générale mais j’ai vu une pièce de Racine (maman tu peux être fière de ton fils).
Une adaptation de la première tragédie de ce cher Jean, avec huit comédiens amateurs donc, dont six étudiants. Car cette adaptation de La Thébaïde est le dernier projet de l’année porté par ARTUS, le théâtre universitaire de Strasbourg. Huit acteurs qui ont été choisis parmi 300 candidats au début de septembre (on a fait les calculs ça fait un ratio de réussite de 2,66%, c’est peu mais ça reste quand même deux fois plus de chance que pour l’Islande de gagner le prochain Euro cet été).
Lucas Ippolito, le metteur en scène (23 ans, la barbe taillée, les yeux d’un brun clair, les cheveux châtains retombant délicatement sur sa chemise ouverte, etc…) a lui aussi dû passer par la case de l’appel à projet l’été dernier, afin qu’il puisse concrétiser cette idée. Finalement retenu, il livre avec Sacha (son assistant) une mise en scène très sobre, dans un décor de palais en ruine, où s’engouffrent les courants d’air.
« Tout est financé par ARTUS. Une fois que l’on est sélectionné, on dispose de 800€ de budget pour la scénographie, 300€ pour la com’, et on n’a rien à payer pour la salle et le matériel. C’est vraiment appréciable, ça nous permet vraiment de préparer quelque chose de propre, avec du matos professionnel dans une vraie salle. »
Alors avec ses huit comédiens, il a dirigé deux fois par semaine les répétitions. Huit mois de travail à recadrer chaque faux pas, à crier après eux, mais aussi à perfectionner le décor et à constituer une famille. « On est même allé faire une retraite tous ensemble un week-end pour vraiment souder le groupe et créer une vraie troupe de théâtre ». Et ça se sent. Une véritable cour de récréation lors des vocalises, puis le sérieux au moment de débuter.
Le résultat ? Très réussi, étonnant. Quasi-professionnel même ? Enfin pas pour Lucas, perfectionniste, qui a passé l’entièreté de la répétition générale à écrire sur son carnet ce qui n’allait pas. Mais il n’empêche, le jeu, la performance des acteurs était bluffante.
Un succès qui, je l’espère, permettra à certains d’entre eux d’être repérés à plus grande échelle, mais surtout qui vous poussera à aller vous caler dans cette petite salle toute mignonne de 125 places. Le seul bémol ? La vingtaine de minutes de bus pour y arriver (c’est au CREPS). Mais pour un résultat de la sorte, un seul conseil (ordre) : foncez !
Du 25 au 28 mai 2016 à 20h30, le 29 mai 2016 à 17h00
Au théâtre du Cube Noir du CREPS d’Alsace – 4 allée du Sommerhof, Strasbourg Koenigshoffen
Déconseillé aux moins de 12 ans.
Tarif plein 10€ / tarif réduit 8€ (membres de 3.14, abonnées 3.14, abonnés UGC illimité, carte (MGEN+), groupes à partir de 10 personnes.) / 5€ pour les étudiants, demandeurs d’emploi, carte culture et atoutvoir.
Renseignements et réservations : [email protected] – 06.85.63.42.07
C’est dommage de faire de la pub pour l’Artus à la dernière pièce de l’année!
Y’en a eu 5 autres avant, toutes jouées par des étudiants (c’est pour ça les “300” candidats) et dirigés par de courageux porteurs de projets, et vraiment pas dégueulasses en plus!