Depuis début mai 2022, Cécile Kohler est détenue dans une prison de haute sécurité en Iran. Accusée d’espionnage, la professeure de français originaire du Haut-Rhin endure depuis 1000 jours le calvaire d’une détention arbitraire.
« Pendant 200 jours, on n’a pas eu la moindre information, aucun signe de vie, explique Noémie Kohler, sœur de l’otage française. On se demandait si elle était toujours vivante. » Au départ, il s’agissait d’un simple voyage touristique, « Cécile aime beaucoup voyager, ça faisait des années qu’elle rêvait d’aller en Iran ». Son séjour se passe bien, sa famille reçoit quotidiennement des messages et des photos du pays.
Le vendredi 7 mai, la veille de son retour en France, les proches de Cécile cessent de recevoir des nouvelles. « On s’inquiétait un peu, mais on essayait de rationaliser. Puis ses collègues nous ont appris qu’elle ne s’était pas présentée au lycée le lundi. On commençait à être vraiment très inquiet. » Finalement, la famille est informée, le 11 mai, par le ministère des Affaires étrangères, que Cécile et son compagnon Jacques Paris ont été arrêté(e)s par les autorités iraniennes.

Plusieurs mois d’isolement
Cécile Kohler est détenue dans la section 209 de la prison d’Evin à Téhéran, un quartier de haute sécurité géré par les services de renseignement. Maintenue à l’isolement complet pendant plusieurs mois, ni sa famille, ni les autorités françaises n’ont de nouvelles avant le 23 novembre 2022, quand l’ambassadeur de France en Iran est autorisé à rencontrer l’otage.
Par la suite, la jeune femme est autorisée à appeler ses proches. « On a tout de suite compris qu’elle ne pouvait pas s’exprimer librement sur ses conditions de détention et sa santé. Quand mes parents lui ont posé des questions, elle s’est montrée très évasive, c’était terrifiant. »

Depuis, la détenue est autorisée à appeler ses proches de manière épisodique, jamais plus de quelques minutes. Il s’écoule souvent de longs mois entre deux appels, « en visio, on ne voit qu’elle, mais on sait qu’il y a des gens autour ».
Si Cécile fait preuve « d’une grande volonté » en ne voulant pas inquiéter ses proches, sa sœur constate sur son visage les marques d’une détention éprouvante. « On voit qu’elle a les traits tirés, qu’elle est très pâle. On constate aussi qu’elle est de plus en plus désespérée, qu’elle ne croit plus qu’elle pourra sortir un jour. »
2 ans, 8 mois et 25 jours de détention arbitraire
« Pour Cécile, ils ne font même pas semblant qu’il y ait une procédure », explique Noémie Kohler. Ni l’ambassade, ni les avocats engagés par la famille n’ont pu avoir accès à un dossier judiciaire, ni même un motif de l’arrestation. Les autorités iraniennes ont juste communiqué dans la presse sur un hypothétique procès et diffusé une vidéo « d’aveux » obtenus sous contrainte. « Les droits de la défense et ses droits fondamentaux sont complètement bafoués, aucune règle n’est respectée, ni en droit iranien, ni en droit international. »

Selon la famille, l’affaire est simple, Cécile Kohler est victime d’une pratique courante du régime des mollahs : prendre en otage des ressortissant(e)s étrangers/ères pour faire pression sur leur pays. « Actuellement, il y aurait une quinzaine d’Européens qui seraient des otages en Iran. Fin 2022, ils étaient sept Français, aujourd’hui, ils ne sont plus que trois. » Pour les proches, la situation est éprouvante.
« C’est la dernière chose à laquelle on pense avant de dormir le soir et c’est la première à laquelle on pense au réveil le matin. » Chaque libération d’otage représente une petite lueur d’espoir. « Surtout, ça nous rappelle que c’est possible que Cécile et Jacques finissent par rentrer. »
Des lettres pour Cécile
Pour soutenir Cécile, ses proches ont créé un comité qui compte aujourd’hui plus de 300 membres et organise des rassemblements chaque premier vendredi du mois à Mulhouse. Début décembre, était organisée une opération « lettres à Cécile » où plus de 750 courriers adressés à la jeune femme ont été collectés et envoyés à la prison.
Si elle n’a probablement pas été autorisée à les lire, « on a pu lui parler de l’opération, ça l’a surprise et ça lui a fait beaucoup de bien, explique sa sœur. Elle a tendance à penser que les gens l’oublient donc c’est important de lui dire que la mobilisation se poursuit ».

Pour marquer les 1000 jours de la détention de Cécile Kohler, le comité de soutien organise, le 1ᵉʳ février, un rassemblement à Paris pour exiger la libération des trois otages français(es) encore emprisonné(e)s en Iran : Cécile Kohler, Jacques Paris et Olivier Grondeau.
Surtout, après plus de deux années de détention, Noémie Kohler tient à rappeler l’urgence de la situation pour sa sœur comme pour les autres otages. « Il faut les sortir de là, leurs conditions de détentions sont terribles. On est très inquiet pour la santé de Cécile, sa vie est en danger. »
