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Excès & clichés sur le vif : « Untalented photographer », l’artiste strasbourgeois M3RS0

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Ses photos dépeignent une jeunesse en marge, qui n’a pas peur d’oser, exposée sous une lumière crue et sans filtre Insta’ ni artifice. Entre amusement sans concession et transgression, le photographe du jour a raccroché une carrière à responsabilité dans le médico-social… Pour s’afficher en grand dans la rue jusqu’en galerie. Portrait de M3RS0, l’« untalented photographer » strasbourgeois, qui n’a plus rien du bourgeois.

Enfant de la Neustadt ayant vécu « beaucoup de [ses] premières fois entre l’avenue des Vosges et la place Kleber », de sa « première ivresse aux 3 Brasseurs, un soir de fête de la musique en 2002 » à son « premier baiser, sur les quais sous les Pontonniers », M3RS0 a pourtant pas mal bougé. Avec ses parents, « aux quatre coins de la France et du monde », puis adulte, jusqu’en Afrique de l’Ouest et du Nord.

Mais Strasbourg, il y revient : « C’est la maison t’as vu ! », dit-il.

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M3RS0
© M3RS0

S’il se souvient d’avoir passé « une partie de [sa] préadolescence à faire coucou aux bateaux-mouches et à leur pisser dessus de l’autre côté du pont, et une autre partie à plonger des mêmes ponts, l’été », aujourd’hui âgé de 37 ans et papa, M3RS0 n’a pas pour autant fini de rouler sa bosse. Dans ses photos ? Une bonne dose de décadence qui ne s’enquiquine pas de la bienséance.

M3RS0
© M3RS0

Son pseudo, « M3RS0 » le tient de Camus, et d’un des protagonistes de L’Étranger : Meursault. « Un mec qui, comme [lui] s’emmerde ». Il se rappelle avoir « connu Strasbourg morne et triste, où passé 20h00 il ne se passait plus rien, et où on commençait nos soirées autour d’une pinte au Snooker ».

Un quotidien à vif (quasi) sur le vif

Issu d’ « une famille bobo de gauche des Contades quelque peu stéréotypée », M3RS0 a depuis longtemps égratigné le milieu dans lequel il est né. Ses photos, c’est son quotidien à peine romancé, fait de potes et de soirées.

Sur ses clichés ? Des fragments de vie, quelques excès et des mises en scène transgressives. Ses modèles, s’ils/elles en sont vraiment : « que des gens [qu’il] aime, des proches ». Une jeunesse en marge, immortalisée sous un flash blafard. Ça pique les yeux, ça bouscule un peu.

Se baladant en permanence avec son appareil dans la poche, il documente son quotidien. Mais il choisit de parler d’autofiction, « car souvent les photos sont plus ou moins posées ou reposées ». Si elles « décrivent réellement quelque chose » qui se passe, « elles sont prises au moment où on le vit mais ne sont pas toujours prisent sur le vif ».

En découvrant son travail, viennent immédiatement des réminiscences de séries de Nan Goldinou Wolfgang Tillmans… Pas étonnant donc, que M3RS0 les cite alors comme sources d’inspiration. S’il est « difficile de ne citer que quelques noms », il parle de la première évidemment, « de Mark Morrisoe et et plus globalement les Five of Boston » [que complètent David Armstrong, Jack Pierson et Philip-Lorca diCorcia].

M3RS0
© M3RS0

Il évoque aussi son admiration pour le travail du sulfureux Araki : « particulièrement dans sa manière d’aborder photographiquement l’amour, […] notamment à sa série de Polaroid ou il associe des photos de putes [sic] avec des photos de fleurs. C’est un contraste étonnant, ramener autant de douceur dans des clichés très crus, je trouve ça hyper beau », confie-t-il.

M3RS0
© M3RS0

M3RS0 rajoute quelques contemporains, et se dit « touché par le travail de Sergej Vutuc et Tadej Vaukman » (avec qui il « échange sur les réseaux de temps en temps »), ou le collectif Belgrade Raw

Et plus localement, le « grand Fabrice Serrario » qui réalise son portrait [ci-dessous] et… Deux photographes de talent, collaborant déjà avec Pokaa : Mathilde Cybulski [son portrait à lire par ici et ses photos, à voir par là], ou Adrien Labit« le sang » dit-il, et « particulièrement sa série au flash sur les invisibles en manifestation ».

M3RS0
Portrait de M3RS0 © Fabrice Serrario

« Untalented photographer » ?

S’il aligne les références et les inspirations aujourd’hui… L’art, M3RS0 s’y intéressait déjà ado, et passe par un bac L spé Arts plastiques. Mais, « la pression sociale et familiale » l’en éloigne plusieurs années.

Il lui faudra quelques allers-retours « entre carrière professionnelle dans le domaine artistique ou une voie plus conventionnelle » pour que la naissance de son fils lui rappelle ses vieux rêves.

Depuis, on lit en bio sur son Insta la mention « untalented photographer ». Une pointe d’humour pour « ne pas se prendre trop au sérieux ».

« Un bon garde-fou contre l’ego-trip », rajoute-t-il, surtout lorsque l’ « on documente son quotidien » : « c’est déjà un peu « mégalo » ce délire d’autofiction, donc ça permet de garder les pieds sur terre et de rire de soi. C’est aussi un moyen de se foutre un coup de pied au cul, de pas oublier qu’il y a encore du taf, bébé ».

M3RS0
© M3RS0

De la pellicule à la photocopieuse

Si le grain de ses photos nous rappelle les vieilles pelloches de nos parents, pas surprenant… M3RS0 bosse l’argentique avec « un point and shoot proche du jetable et de la pellicule pas chère ». Si à l’époque, il débute avec parce que c’est abordable, « en ces temps de crise, ça devient presque snob finalement », avoue-t-il.

Mais « il persiste », objectant que « la photo numérique n’a pas d’existence palpable », et qu’il ressent le « besoin de ce rapport au concret, à l’objet photographique ». Poussant les limites de cet « objet photographique » plus loin, il sort ses photos au format collage, dans des « dimensions monumentales ».

M3RS0
Collage de M3RS0 sur le Campus (5 octobre 2023) © M3RS0

Derrière ce projet ? L’ambition de « faire quelque chose de pas cher, de facile », et plus cocasse : il « voue un amour fou aux photocopieuses », toujours « inspiré par Sergej Vutuc ». Une façon originale de s’exposer, en galerie comme dans la rue.

Une expo sauvage sur le Campus

Parlons-en de la rue… Quelques badauds matinaux les auront peut-être aperçus avant qu’ils se fassent recouvrir. Dans la nuit du 3 octobre, armé d’une brosse et de colle, il est parti s’afficher en grand, sur le Campus de l’Esplanade.

Adepte du collage sauvage, il a choisi cette fois les panneaux d’affichage libre du Campus pour « faire une installation sans pression ». Car si quelques tunnels strasbourgeois témoignent encore de certaines de ses précédentes sorties nocturnes moins légales – avec des collages entiers ou des vestiges –, il explique avec humour « cour[ir] de moins en moins vite et que les flics sont de plus en plus jeunes ».

M3RS0
Collage de M3RS0 sur le Campus (5 octobre 2023) © M3RS0

Bien que cette expo urbaine soit éphémère puisque les panneaux ont été rapidement recouverts, ça aura toutefois nécessité un peu d’organisation. Mesurer les panneaux avant d’imprimer les photos sur des feuilles A3 avec une photocopieuse standard, et regrouper quelques ami/es (« artistes, photographes ou non »), pour un collage de plusieurs heures.

« Sans eux, ni la prise de vue ni l’installation ne seraient possibles. En ce moment, cette façon d’envisager la production photographique fait sens pour d’autres photographes strasbourgeois que j’admire, et je suis plutôt fier de partager ça avec eux », explique-t-il.

Un projet qu’il n’est pas prêt d’arrêter : « je veux continuer à coller dans la rue » déclare-t-il. Tout comme « produire des zines à la photocopieuse ». « C’est un peu régressif mais j’adore ça », rajoute-t-il.

Cette passion-là l’embarque même jusqu’à Madrid où il sera fin novembre pour une foire du fanzine. Il y est invité à exposer par le photographe de skate Renan Garcia.

M3RS0
Exposition de M3RS0 © M3RS0

De la rue à la galerie

Mais avant Madrid, il y eut Bâle, en juin dernier. Et si certain/es ont croisé depuis une sélec’ de ses photos le 7octobre lors du festival Émergence à The People (organisé par Tutti Frutti Event), M3RS0 fut d’abord repéré par la galerie bâloise Daeppen. Il a pu réaliser là-bas sa « première vraie exposition », pendant la prestigieuse et internationale foire Art Basel 2023. Une belle opportunité.

M3RS0
Exposition de M3RS0 à la galerie Daeppen à Bâle © M3RS0

Il note d’ailleurs l’importance de l’existence de « galeries comme celle-ci qui se spécialise dans la promotion et la diffusion des artistes underground », et se dit soutenu par le galeriste Guillaume Daeppen dans l’évolution de son travail.

Un vrai plus pour lui, qui plus est, de la part d’une galerie vue comme l’un des « épicentres de l’art underground européen ». En discussion pour plusieurs expositions (à Bâle en 2024 ou Paris), on risque bien d’entendre à nouveau parler de lui.

Il ajoute aussi avoir le soutien de la cheffe décor Pascale Consigny qui fait apparaître dans de nombreux films, des photos issues de ses séries. On risque d’en apercevoir l’une ou l’autre dans un film tourné par ici au printemps dernier (et même au Molodoï) : Langue étrangère de Claire Burger (sortie prévue en 2024). …Affaire à suivre, donc !


Pour suivre son travail :
M3RS0 sur Instagram


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