D’une bande de potes animée par la passion du vélo à une association qui va bientôt devenir une société, Kooglof a avalé des kilomètres depuis son lancement en novembre 2020. L’occasion de faire un point d’étape avec Valentin et Stefan, deux des co-gérants, pour une année 2024 qui va voir la plateforme strasbourgeoise changer de braquet.
Tout va comme sur des roulettes pour Kooglof. La plateforme de livraison strasbourgeoise fait son petit bonhomme de chemin depuis sa création, que l’on vous contait dès le début de l’aventure. Et ce, toujours dans le même esprit : apporter un modèle économique différent, avec une juste rémunération des coursiers/ères et une sécurité de l’emploi garantie.
Pourtant, tout n’a pas été simple : la bande de potes des très beaux débuts et de l’exaltation des confinements fait face à une baisse d’activité à la fin du 1er trimestre 2021. Pour ne pas pédaler dans la semoule, Kooglof diversifie rapidement son activité de livraison : elle ne livre plus seulement de la nourriture, mais réalise également des commandes d’entreprises et des tournées.
Cette diversification a permis à Kooglof de « stabiliser son modèle économique et réinvestir l’argent gagné dans des vélos cargos pour notre service de livraison à des professionnels », selon Valentin, l’un des co-gérants. Petit à petit, si celles et ceux du début ne sont plus toutes et tous là, les fondations se recréent sur des bases solides.
Une « étape assez importante » d’après Stefan, autre co-gérant, qui permet à Kooglof de commencer à salarier. Désormais, l’association compte sept salarié(e)s et trois auto-entrepreneur(e)s – par choix et payé(e)s de la même manière que les salarié(e)s, c’est-à-dire à l’heure.
Proposer quelque chose de différent
En trois ans, l’équipe a vécu plusieurs aventures. Pour Valentin, tout le projet a été « enrichissant, d’un point de vue humain ». Le co-gérant développe : « J’ai une petite fierté d’avoir réussi à tirer mon épingle du jeu dans le monde des plateformes ubérisées, mais surtout qu’il y ait des Strasbourgeois(es) sensibles à cette démarche, à ce projet fait à notre image. »
Un projet « esprit Kooglof », qui se résume en un mot : alternatif. Utilisé tour à tout par Valentin et Stefan, les deux co-gérants mettent en avant leur différence dans le monde de la livraison : « On peut faire tout un tas de choses, la mission de Kooglof est de crier qu’on est là, et qu’il y a une alternative pour tous les publics, avec un service de qualité » avance Valentin, pas peu fier.
Pour Kooglof, faire les choses autrement ne veut pas seulement dire offrir une alternative aux autres plateformes de livraison ; c’est aussi un moyen de créer un modèle de gestion différent. Pour Stefan : « Le boulot est assez dur comme ça, on ne va pas tomber sur les gens ou leur mettre la pression. C’est peace chez nous. ». Valentin complète : « Tu t’aperçois que c’est pas en engueulant un salarié que les choses avancent. »
Si la réalité économique existe, Kooglof privilégie toujours l’esprit d’équipe et les discussions. Une qualité majeure selon Stefan : « Le métier de livreur peut être très solitaire ; là on a pu construire à plusieurs. Même si c’était long et fatigant on a réussi à créer quelque chose de solide, de collectif et de cool. »
Une professionnalisation nécessaire... avec une perte d’insouciance
Ces différents moments franchis ont permis à Kooglof de grandir et de se professionnaliser. Une étape nécessaire à tout projet entrepreneurial, mais qui a également amené une perte d’insouciance. Stefan développe : « Il y a moins d’exaltation. À l’époque, on était 10 à être chauds, à s’éclater et à être prêts à aider. Maintenant, il y a des longues discussions sur des sujets pas forcément intéressants à la base, de la paperasse. » Valentin abonde, parlant « d’une chape de responsabilité qui arrive plus ou moins vite ».
Heureusement, le plus important demeure : la passion de la bécane. Malgré les responsabilités en hausse, Stefan et Valentin aiment, en effet, toujours autant le vélo. Si le premier « n’en rêve pas la nuit, comme certains » [en désignant son compère du doigt, ndlr], il continue d’aimer « l’urgence de la course, le rush, l’adrénaline ».
Avec nos responsabilités, on a moins l’occasion d’être dans le rush. Donc quand ça arrive, on aime bien ça tous les deux.
Même coup de sonnette pour Valentin, bien plus mordu de la pédale : « J’ai vraiment découvert la passion du vélo via ce métier. Ça fait partie de moi et de ma vie. Ça comporte son lot de stress, mais en attendant quand je profite de deux semaines d’ensoleillement de suite en avril, j’ai pas l’impression de travailler. »
Et finalement, le sentiment qui prédomine reste la fierté. Valentin développe : « Au fil de l’eau, par le passé on gérait des trucs, mais maintenant avec l’expérience, avec la fluidité dans les relations entre cogérants et salariés, on est davantage outillé pour faire face aux problèmes. On est capable d’anticiper, de projeter notre développement. »
Un changement de braquet pour les années à venir
Et justement, côté développement, Kooglof va mettre un sacré coup d’accélérateur en 2024. Déjà, l’application a été entièrement customisée et renouvelée. Ensuite, il y a le passage en entreprise en tant que société coopérative et participative (SCOP) [société où les salarié(e)s sont les associé(e)s majoritaires, ndlr], prévu pour cette année. Une nouvelle étape dans la professionnalisation.
La mission de Kooglof est de crier qu’on est là, et qu’il y a une alternative pour tous les publics, avec un service de qualité.
Kooglof continue aussi de développer sa cyclo-logistique et son modèle économique, dans un mode de livraison du « dernier kilomètre ». L’équipe souhaite ainsi travailler avec de gros transporteurs comme DPD ou DHL, mais également être en cohérence avec le calendrier ZFE, toujours dans le but de proposer des alternatives aux modes de livraisons classiques en centre-ville de Strasbourg.
Cette structuration de leur modèle économique passera également par une campagne Okoté, un programme de co-financement où 1€ de don d’un(e) particulier/ère est triplé pour l’entreprise. Une opportunité pour Kooglof de « co-financer du matériel pour les livreurs, leur offrir des vestes chaudes, des casques, améliorer les conditions de travail de nos salariés » selon Stefan.
Enfin, Kooglof compte également développer le pôle de l’alimentation durable, une structure co-gérée avec Stamtish, réseau solidaire dont l’objectif est de favoriser l’inclusion sociale et professionnelle par la cuisine, et Coopalim – une alternative à la grande distribution. Les gérant(e)s sont à la recherche d’un lieu où étendre leurs locaux respectifs.
Pour le moment, un local situé rue Saint-Michel [dans le quartier de la Gare, ndlr] tient la corde, pour un emménagement probablement l’année prochaine, selon Valentin. L’opportunité de « développer un atelier de réparation de vélos, et l’ouvrir à des pans de la population qui n’ont pas accès à ce type de services ».
Bref, tout roule, et pas de pavés à l’horizon.
Le site pour commander
(L’application Kooglof est aussi disponible sur IOS et Android)
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