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« On ne va pas finir l’année » : la souffrance des commerces indépendants du centre-ville strasbourgeois

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Ces dernières semaines, plusieurs commerces indépendants du centre-ville strasbourgeois ont alerté sur les réseaux sociaux de leur situation de plus en plus précaire. On est allé échanger avec deux d’entre eux, afin d’en savoir un peu plus.

Le 27 avril dernier, JOY Concept store publiait un post Instagram d’un ton très différent de celui auquel la jeune femme a habitué ses client(e)s. Intitulé « 2023, peut-être la dernière année pour JOY Concept », il détaillait les difficultés croissantes que traverse la boutique qui, depuis trois ans, débarrasse les enfants des clichés sexistes, en proposant des produits non-genrés et des marques prônant des valeurs d’égalité.

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Une semaine plus tard, c’est au tour de KODA, la petite boutique de cosmétiques écolo et vegan dans le Carré d’Or, de publier un post intitulé : « La fin de Koda cosmétiques ? ». Charlotte y détaille sa situation compliquée en tant que gérante d’une boutique indépendante du centre-ville où les Strasbourgeois(es) peuvent retrouver des produits éthiques.

Une fréquentation en forte baisse depuis un an

Ces deux boutiques possèdent le même profil : indépendantes, éthiques, proposant quelque chose de différent de ce qu’on retrouve habituellement au centre-ville de Strasbourg. Et pourtant, selon Charlotte : « Ça fait un an que ça a décliné, et que ça ne va plus. La fréquentation a chuté de façon conséquente. C’est dur psychologiquement d’attendre toute seule des gens qui ne viennent pas ».

Il y a des journées à dix clients.
Charlotte, gérante de KODA cosmétiques

Pour Joy, la donne est la même : « Ça fait un peu plus d’un an, juste avant Noël 2021, où il commençait à y avoir un peu moins de monde ». Une situation sur laquelle alertait déjà la jeune femme à cette période, dans cet article. Elle continue : « À ce moment là, il y avait une solidarité avec les gens en difficulté ; c’est normal que ça s’essouffle un peu mais les habitudes ne sont pas revenues ».

Les gens qui venaient tous les mois viennent maintenant tous les deux mois.
Joy, gérante de JOY Concept Store

Résultat ? « Avec les différents confinements et les couvre-feux, les gens ont pris l’habitude de plus commander sur internet et de moins acheter en physique ». Ce qui espace les venues de clients(e)s, et donc un manque à gagner conséquent. Pour KODA, c’est même 50 % de son chiffre d’affaires habituel qui vient à manquer.

Éthique vs économique, telle est la question

Pour comprendre les difficultés de ces commerces indépendants, il y a un autre paramètre à prendre en compte : la situation économique compliquée pour tout le monde. Avec un panier moyen ayant augmenté de 17,6% sur un an selon franceinfo, les moyens s’amenuisent pour tout un chacun.

Charlotte développe : « Le panier moyen a baissé, le pouvoir d’achat a diminué depuis ces deux/trois dernières années. Les gens font comme ils peuvent en ce moment, et ça passe par faire au moins cher ». Et ce qui est éthique n’est généralement pas le moins cher, comme l’explique Joy : « Tout le monde a envie d’acheter des choses plus éthiques mais ça a un coût. Et ça reste toujours le point principal ».

Est ce que je veux à tout prix garder des valeurs qui vont m’amener dans le mur ou est-ce que je dois rentrer dans le système ?
Joy, gérante de JOY Concept Store

Surtout quand la concurrence des grandes marques devient plus féroce. Une situation que connaît désormais Charlotte : « Au début, j’étais la seule à vendre des shampoings solides ou des culottes menstruelles. Mais maintenant que les grandes marques ont pris le pli de faire ça, avec les conditions de fabrications que l’on sait, c’est moins cher que ce que je propose. Et c’est dur ».

Pour Joy, la donne est la même : « Faire du commerce quand on a pas envie de répondre aux codes hyper capitalistes de vendre tout pas trop cher, c’est super difficile ». Se pose alors la question de faire « comme les autres » ; Joy s’interroge alors : « Est ce que je veux à tout prix garder des valeurs qui vont m’amener dans le mur ou est-ce que je dois rentrer dans ce système ? ».

La réalité d’un commerce indépendant au centre-ville

Rajoutant de la complication à une situation déjà difficile, la réalité d’un commerce indépendant au centre-ville de Strasbourg peut parfois s’avérer écrasant. Les loyers exorbitants ne peuvent qu’être assumés par les grandes enseignes, laissant des indépendants sur le carreau. Et avec la concurrence de Shopping Promenade, la donne se complexifie.

Être un commerce indépendant au centre-ville c’est coton.
Joy, gérante de JOY Concept Store

Joy se pose même la question : « Est ce qu’il y a encore un intérêt de venir au centre-ville de Strasbourg ? ». Mentionnant la récente augmentation du stationnement en voirie, la jeune femme développe : « Au centre-ville, ma clientèle ce sont des Strasbourgeois, mais surtout des gens avec des enfants. Donc ceux qui veulent venir avec des poussettes, ils n’ont pas forcément envie de prendre le tram avec un enfant en bas-âge ».

Pourtant, Strasbourg peut se targuer de posséder beaucoup de petits commerces indépendants, donnant du cachet et de l’identité à la ville, et à son centre-ville. Une « fierté » selon Charlotte, qui estime pourtant que les petits commerçants ne sont pas suffisamment aidés : « Pour une ville avec une municipalité écolo, les petits commerçants auraient pu être un peu plus aidés ; c’est aussi nous qui rendons la ville écolo. On se sent un peu seuls ».

Un appel à l’aide et à la prise de conscience

Une solitude qui peut parfois être très difficile à gérer. Lors de l’interview, Charlotte avait du mal à cacher son mal-être quant à la situation : « C’est mon bébé, j’ai ouvert ça quand j’avais 25 ans ; là ça me fait de la peine, je n’arrive plus à m’en sortir. À mon petit niveau j’ai vraiment essayé de montrer que le magasin était toujours là, mais à un moment je me sens la tête sous l’eau, je sais plus quoi faire ». Une réalité que les client(e)s n’ont pas forcément en tête.

C’est la raison pour laquelle Joy a décidé de poster un message sur les réseaux : « On ne parlait jamais de ces choses là parce que c’était pas très good mood mais, en faisant ça, on entretient aussi l’idée dans la tête des gens qu’il n’y a pas de problèmes ». Le but ? Sensibiliser les client(e)s : « Leur dire : vous me permettez de faire vivre mon commerce. Tous les jours les gens font des compliments sur le lieu, les produits… mais c’est quand même dommage de me dire que je vais peut-être fermer mon entreprise ».

On dit aux gens que leurs achats ont de l’importance ; la manière dont vous consommez, ça fait vivre des entreprises ou fermer d’autres.
Joy, gérante de JOY Concept Store

Et justement, il y a aussi la volonté de ne pas prendre les client(e)s de court, au cas où une fermeture arriverait. Selon Joy : « Je voulais être un peu plus transparente ; j’avais pas envie de faire des mois de stories à faire le clown pour ensuite fermer sans dire un mot ». Garder une relation privilégiée avec ses client(e)s est également une priorité pour Charlotte : « J’ai une relation avec eux et elles qui est différente et qualitative. Je pense que les gens ont envie de ça, c’est important pour eux ».

Ces posts ont enfin eu le mérite de faire prendre conscience aux deux femmes qu’elles ne sont pas seules. Joy développe : « Il a aussi fait beaucoup de bien à d’autres commerçants ; il y a eu un esprit de « je suis pas tout seul ». Personne n’en parle, donc ça a permis de se sentir soutenu. On est tous des petits dans notre coin, donc il faut qu’on s’entraide ». Charlotte opine : « Il faut se serrer les coudes ».

Un futur incertain

Lorsqu’on parle du futur, Joy ne sait pas trop quoi répondre. même si la jeune femme a encore plusieurs idées pour développer sa boutique : « Je vais essayer de faire des modifications dans l’offre que je propose. Ça va être arrêter certains types de produits, se développer en ligne et faire le bilan à la fin de l’année. Pour voir si ça a suffit ». Charlotte elle ne sait pas de quoi demain sera fait : « Si ça continue comme ça, c’est ma dernière année. Je pourrais plus assumer la boutique toute seule ».

Les deux femmes pourront néanmoins se rassurer de tous les bons retours qu’elles ont eus à la suite de leurs posts. Des client(e)s sont revenu(e)s et il y a déjà des idées pour organiser des événements communs avec d’autres commerçant(e)s. Un motif d’espoir.

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Commentaires (4)

  1. Je n’ai jamais trouvé qu’il y avait tant de commerces indépendants au centre ville de Strasbourg. La CCI à peur être des chiffres pour comparer aux autres grandes villes?
    J’ai la nette sensation en revanche que Strasbourg est considéré par les gens de l’extérieur et encore plus par les gens qui viennent de loin comme difficilement accessible en voiture : entre le GCO dans lequel les gens ont peur de s’engager par erreur, la SFE avec les vignettes que tour lz monde n’a pas, les discussions sur le stationnement… avec ces écolos là…à tel point qu’on ne va plus au centre ville en virée shopping mais “à Shopping Promenade” (conversation entendue dans les Vosges…)

  2. Merci de partager ces histoires. J’ai de plus en plus de mal à faire mes courses en centre ville, l’augmentation du stationnement a été la goutte de trop. Le fait de ne plus pouvoir se garer place du Temple Neuf. La voiture est critiquée à tours de bras, mais comment fait-on pour porter ses courses toute seule quand vous souhaitez prendre pas mal de choses? Et sans parler des enfants?

  3. Tram infréquentable a certaines heures.. incivilités récurrentes..sens interdits imprévus..parkings hors de prix.parcmetres trop cher..je fais mes courses en Allemagne..merci a la municipalité !

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