Cette année si particulière qu’a été 2020 touche désormais à sa fin. C’est donc l’heure de faire les comptes, particulièrement pour le Racing Club de Strasbourg, qui finit l’année à une médiocre 17ème place. Une première partie de saison qui ne place pas 2021 sous les meilleurs auspices, encore plus dans une saison estampillée Covid, où nos Bleus et Blancs ne pourront pas compter avant longtemps sur le soutien de toute leur Meinau. Trêve de possession stérile, allons droit au but : c’est l’heure du bilan !
Le récit de la première partie de saison
Comme toujours avec le Racing, la première partie de saison n’a pas été des plus linéaires. Des débuts très très compliqués, où Thierry Laurey n’a pas été loin de rendre ses habits d’entraîneur, suivis d’une légère amélioration qui fait croire que le maintien est dans nos cordes.
Un début de saison cata, perturbé par le Covid
Si le Racing, depuis sa remontée en Ligue 1 lors de la saison 2017/2018, n’a jamais très bien débuté ses saisons, le club a réussi cette année l’exploit de louper son intersaison ! Comme on vous le racontait cet été, notre club de cœur a vu neuf de ses joueurs être testés positifs au coronavirus à la suite d’une petite virée dans un bar dansant de Genève. Résultat des courses ? Une intersaison tronquée donc un manque d’automatismes et de préparation physique, qui présageaient un début de saison compliqué.
Ce que l’on redoutait arriva : le Racing a été catastrophique lors du début de saison. Après 45 bonnes minutes à Lorient lors de la première journée, le manque de préparation physique se fait sentir, le Racing perdant le fil du match, puis le match tout court, par 3 buts à 1. La semaine d’après, pour le retour de nos p’tits Bleus à la Meinau, avec une jauge de 5 000 spectateurs, là encore une bonne première mi-temps contre Nice, puis une défaillance physique et technique en deuxième, pour une défaite 2-0. C’est ensuite Saint-Étienne qui se charge de montrer à Strasbourg que rien ne sera facile cette année, en gagnant là aussi 2-0. Trois défaites, 7 buts encaissés pour un seul petit but marqué : le Racing est déjà dans le dur. Heureusement, et on en parlera un peu plus loin, mais d’autres équipes sont dans la même position, voire pire.
Une victoire qui confirme la série de défaites
Justement, c’est l’une de ces équipes, Dijon, qui s’avance à la Meinau ce 20 septembre ensoleillé, où, vu la jauge de 5 000 personnes, les joueurs peuvent littéralement entendre l’impatience des supporters. Heureusement, Dijon est encore plus dans le seau que le Racing, qui s’impose 1-0, but de Mitrovic, dans un match où il aurait pu en mettre quatre ou cinq de plus.
Cette victoire dans le dur ne rassure en aucun point, et ce n’est pas étonnant que le Racing n’en ramène aucun, de point. Il va à nouveau enchaîner trois défaites de rang : d’abord à Monaco, qui gagne 3-2 alors qu’ils ont passé une grosse vingtaine de minutes à 9 contre 11. Lille vient ensuite rappeler à la Meinau à quel point ils sont supérieurs cette saison en infligeant un 3-0 aux allures de correction. Et c’est enfin Lyon, qui bénéficie des largesses de notre gardien Bingourou Kamara pour mener 3-0. Le Racing reviendra bien à 3-2, mais avec six défaites pour une victoire en sept matchs, l’heure est clairement inquiétudes. Jusqu’à menacer le coach.
Il faut sauver le soldat Laurey
Néanmoins, la prestation contre Lyon à la Meinau, pour le dernier match avec du public jusqu’à ce jour, laissait quelques point positifs. Notamment l’arrivée d’Habib Diallo pour 10 millions d’euros du rival messin. Un attaquant talentueux qui va former une redoutable doublette avec notre Ludovic Ajorque préféré. Couplé au retour de Jean-Eudes Aholou de Monaco et le fait que Simakan soit resté alors que le Milan AC le voulait, Marc Keller a bien géré son bateau, alors qu’il tanguait sévèrement. Comme pour confirmer cet élan d’optimisme qui fait du bien, nos Bleus et Blancs vont respirer le bon air marin et repartent de Brest avec la victoire et trois buts marqués, dont un de Diallo et un autre d’Ajorque. On se dit qu’enfin, on tient peut-être quelque chose.
Sauf que comme après Dijon, le Racing retombe dans ses travers. Une défaite à Reims 2-1 dans un match qui comptait pour le maintien, une défaite dans une Meinau désormais vide contre Marseille 1-0 après un match ennuyeux à mourir et enfin une défaite rocambolesque 4-3 contre Montpellier. Deux victoires et neuf défaites en onze matchs, une défense à l’Ouest (23 buts encaissés, soit la pire défense de Ligue 1) et une 19ème place, l’heure est désormais à la tête de Thierry Laurey.
Le coach strasbourgeois, symbole de la stabilité retrouvée de Strasbourg depuis son retour dans l’élite, était en effet menacé. Ses choix parfois trop défensifs, avec des milieux plus bétonneurs que créateurs, ses changements trop tardifs et désordonnés et l’apathie générale des joueurs qui ne montraient ni envie ni combativité ont mis le coach strasbourgeois sur un siège éjectable.
Un bon mois de décembre au sentiment d’inachevé
Clairement, le 27 novembre dernier, Thierry Laurey jouait sa peau contre Rennes. Une défaite, et le Racing allait devoir se retrouver un nouvel entraîneur. Comme transcendés par montrer qu’ils ne lâcheraient pas leur coach, les Strasbourgeois mènent rapidement au score par l’intermédiaire d’un Adrien Thomasson qui a enfin remplacé son frère jumeau un peu nul qui jouait jusqu’alors. Mais patatras, le Racing finit à 10 en première mi-temps, Mitrovic rentrant au vestiaire pour un joli carton rouge. Rennes revient évidemment au score, mais le Racing tient bon, grattant un nul synonyme dans ces conditions de victoire. Laurey reste en place, mais il faut confirmer face à Nantes.
Et confirmer ils firent. Ce résultat au courage a été grandement bonifié par quatre buts au fond des caisses nantaises, grâce à Diallo, Ajorque, Liénard et Zohi. Le Racing respire et joue mieux. C’est cohérent et plus solide, pile au bon moment pour affronter Metz. Malgré un match dominé en grande partie par nos Bleus et Blancs, on trouve encore le moyen de se compliquer la tâche, Simakan provoquant deux pénaltys. Là encore, le nul 2-2 a des goûts de victoire, et les Strasbourgeois montrent l’étendue de leur mental.
Quelques jours plus tard, dans un calendrier démentiel, Strasbourg s’impose 2-0 à Angers grâce là encore à Ajorque et Diallo, montrant encore une fois que chaque année, dès que décembre arrive, le froid est le grand ami des Strasbourgeois. Malheureusement, ce beau bilan de 8 points en 4 matchs est terni par une défaite sans relief contre Bordeaux à la Meinau 2-0, ainsi qu’une prestation sans saveur à Paris. L’année 2020 se clôture sur un 4-0 dans les molaires, promettant une année 2021 des plus stressantes.
Pourquoi est-ce que le Racing se trouve aujourd’hui aussi bas au classement ?
17ème de Ligue 1 à la trève, 22 buts marqués (11ème attaque de Ligue 1), 32 buts encaissés (19ème défense). Les chiffres ne sont pas reluisants pour le Racing et expliqueraient déjà la position du club. Mais allons plus loin et essayons de comprendre pourquoi cette année, le Racing pédale dans la choucroute.
Une équipe peu renouvelée qui s’est un peu trop habituée au confort
L’année dernière, le Racing terminait 10ème du championnat interrompu en mars par le Covid. Si le Racing avait pu disputer son match contre Paris à la Meinau et l’avait gagné, il aurait même pu finir 5ème ! Signe d’une équipe en pleine bourre, bien rodée et efficace dans un 4-4-2 relativement solide derrière et très efficace devant, avec Ajorque, Mothiba et Waris comme fers de lance. Neuf mois plus tard, l’équipe n’a pas bougé, aucun cadre n’est parti et Aholou, Chahiri et Diallo sont arrivés. L’équipe en ressortirait renforcée sur le papier.
Dans la réalité néanmoins, on se rend vite compte que de nombreux cadres strasbourgeois ne sont pas revenus de l’interruption avec le même entrain, sans même parler du Covid. Thomasson, sans doute perturbé par sa négociation de contrat, a été très mauvais jusqu’à ce qu’il soit promu capitaine face à Nantes. Caci a également mis du temps à revenir au niveau qui était le sien. Mitrovic et Koné alternent carton rouge et très mauvaises performances pour le premier, pépins physiques et très mauvaises performances pour le second. Lala exaspère la majorité des supporters strasbourgeois par une nonchalance seulement égalée par la non précision de ses centres. Waris est un fantôme, Liénard a quelques fulgurances mais montre parfois des limites physiques et Sissoko n’a plus progressé au Racing depuis sa feuille morte contre Monaco en janvier 2019.
Le pire dans tout cela, c’est qu’il y a très peu de concurrence au sein du groupe. Au milieu, Prcic est trop léger physiquement pour un championnat comme la Ligue 1, Carole est parfois très bon, parfois absent et on n’a aucune alternative à Lala – bien que j’aimerais voir Caci à droite et Carole à gauche une fois dans ma vie au Racing. Heureusement que Simakan, Djiku, Bellegarde, Ajorque et Diallo font le taf – on peut rajouter dans une moindre mesure Aholou, voire Chahiri. Mais dans un football de plus en plus dépendant des latéraux, le fait que ceux-ci soient peu efficaces et toujours titulaires pénalise le Racing, qui n’est pas aidé par un milieu très irrégulier et peu technique. La tendance semble malgré tout s’inverser et tout le monde répond davantage présent depuis un mois, alors l’optimisme est tout de même de mise.
Une défense sans Sel(s)
Avant cela toutefois, il faudra régler le problème défensif. Lorsque tu es 19ème défense de Ligue 1, c’est que c’est pas très bien. Au-delà des beaux slogans qui riment, la défense est clairement le gros point faible du Racing cette saison. Mais pourquoi, alors que l’équipe n’a finalement que peu changé ? Cela tient en deux simples mots : Matz Sels. Notre gardien belge, un des tous meilleurs à son poste en Ligue 1, s’est pété le talon d’Achille dans une pré-saison définitivement à jeter. Et alors qu’on a strictement la même défense, Kamara ou Kawashima ne se sont pas du tout montrés rassurants, bien au contraire.
Alors que le premier, vrai artisan de la victoire de Strasbourg en Coupe de la Ligue en 2019, aurait pu profiter de la situation pour mettre un peu de concurrence sur le poste de gardien. Finalement, son seul vrai fait d’arme a été de lancer la carrière lyonnaise de Tilo Kadewere, étincelant depuis son but face à Strasbourg, à la suite d’un gros raté de Kamara. Ce dernier semble se mettre beaucoup trop de pression, tout en ne donnant aucune garantie de maturité. Kawashima a de son côté été bien meilleur, en alternant le bon (Metz) et le pas bon du tout (Montpellier). Il n’a néanmoins jamais réellement rassuré, ni les spectateurs, ni probablement sa défense. Résultat des courses, entre un gardien peu rassurant, une défense qui fait encore trop d’erreur et un milieu qui prend l’eau trop facilement ? 32 buts encaissés, soit non seulement la 19ème défense de Ligue 1, mais autant de buts encaissés que l’année dernière, en 27 journées ! Matz, reviens vite.
Un Racing sans Meinau, c’est un Racing bien penaud
Dernière explication, le fait qu’il n’y ait peu ou plus du tout de public à la Meinau. L’année dernière, Strasbourg avait gagné sept fois dans son antre, pour trois nuls et trois défaites. Cette saison ? Une petite victoire, deux nuls et cinq défaites, pour une 18ème place en Ligue 1 à domicile. Incapable de marquer dans son château, seulement six petits buts, les Strasbourgeois peinent énormément dans un stade vide.
Plus de mur bleu pour pousser quand l’équipe connaît un coup de moins bien, plus de public qui chante même dans la défaite, plus de Strasbourgeoises et de Strasbourgeois derrière leurs petits Bleus à scander « Merci ! » et « De rien ! » à la suite de belles actions collectives ponctuées par un but de Diallo ou d’Ajorque. Le public gommait, ou tout du moins masquait, certaines faiblesses strasbourgeoises, qui aujourd’hui apparaissent béantes.
Il semblerait néanmoins que ce phénomène ne touche pas que notre chère équipe. Comme le rapporte le journal L’Équipe dans son article réservé aux abonnés, pour le moment, sur 168 matches de Championnat disputés, seuls 66 ont été gagnés par l’équipe qui recevait, soit 39 %. Jusque-là, sur la décennie, le pire exercice était 2015-2016 (42 %). Strasbourg n’est dont pas tout seul dans cette galère, et elle en profite bien d’ailleurs, avec ses trois belles victoires à l’extérieur, toutes sans encaisser le moindre but. Mais alors que la saison semble se profiler sans public de retour au stade avant un moment, il va falloir que Strasbourg apprenne à gagner à huis-clos. Une normalité aux allures d’exploit pour le Racing, puisque le club n’a pas encore gagné sans public cette saison.
Les raisons d’espérer
Pour terminer, examinons un peu les chances du Racing dans sa course au maintien. Personnellement, l’amour pour mon club me pousse à l’optimisme. Mais comme ce n’est pas un facteur vraiment objectif, essayons de l’être.
Une doublette Ajorque-Diallo qui fonctionne
Avec un Mohamed Simakan toujours aussi fort et qui mérite clairement de partir dans un grand club, l’attaque Ajorque-Diallo reste la plus grosse satisfaction de cette première partie de saison. 6 buts et 4 passes décisives pour l’un, 5 buts et 3 passes décisives pour l’autre (et souvent l’un pour l’autre), les deux attaquants prouvent chaque jour qui passe qu’ils sont faits pour jouer ensemble. Lorsque l’on a deux attaquants aussi forts dans une équipe qui lutte pour le maintien, c’est toujours une lueur d’espoir supplémentaire.
Surtout qu’Adrien Thomasson revient à un niveau plus conforme à celui qui a fait de lui l’un des meilleurs milieux de Ligue 1 la saison dernière. La signature de son contrat et son nouveau capitanat en l’absence de Mitrovic l’ont remobilisé, comme en attestent ses deux récents buts, contre Rennes et Metz. Avec ces trois là en pleine forme, avec en rotation des Zohi et Chahiri un soupçons meilleurs, et malgré le probable départ de Simakan, on a de quoi voir venir.
Derrière le Racing, des adversaires pas trop terrifiants
Surtout que le Racing a la « chance » d’avoir des adversaires pour le maintien qui ne sont pas des foudres de guerre. Nîmes a perdu son entraîneur historique et patine dangereusement à la dernière place du classement, Dijon ne s’est pas sorti la tête de l’eau et malgré quelques récentes bonnes performances reste faible et Lorient est un promu plein de promesses qui pour l’instant ne se concrétisent pas. D’ailleurs, ces trois clubs ont en commun d’avoir un gardien plus que moyen. Coïncidence ?
Pour être honnête, devant le Racing, ce n’est pas transcendant non plus. Les autres adversaires dans cette lutte des tranchées sont Reims, Saint-Étienne et Nantes. Les premiers, malgré leur buteur Dia, ont perdu quelques joueurs qui faisaient leur force défensive. Ils devraient normalement s’en sortir mais ce n’est plus le Reims qui a fini 6ème l’année dernière. Saint-Étienne donne beaucoup plus de place aux jeunes, principalement pour faire des économies. Le bateau tangue souvent mais ils devraient s’en sortir également. Seul Nantes se retrouve vraiment en mauvaise posture. Après le 4-0 reçu contre le Racing, ils ont perdu leur entraîneur, qui a été remplacé par Raymond Domenech. Un homme connu pour l’affaire du bus en 2010, des penchants pour la voyance et les esprits et dénué de toute ambition footballistique et de sens tactique. Un atout dans la manche des Strasbourgeois, que pas grand monde avait prédit… sauf Domenech du coup.
Un mois de janvier décisif
Concrètement, pour savoir si le Racing a de vraies chance de rester un an de plus en Ligue 1, il faudra attendre la fin de l’hiver. Sur les mois de janvier et de février, ce seront 10 matchs sur 54 jours qui seront proposés aux joueurs. Un calendrier démentiel et aberrant, mais néanmoins décisif dans la course au maintien. En janvier se présentera devant le Racing un mois dantesque et décisif. Nos Bleus et Blancs affronteront Nîmes (20ème) le 6 janvier, Lens (7ème) le 10, Saint-Étienne (14ème) le 17, Dijon (19ème) le 24 et Reims (15ème) le 31. Autant vous dire que le Racing a intérêt à perpétuer la tradition de se surpasser lorsque les températures flirtent amoureusement avec le 0.
Ces duels face à nos concurrents direct promettent ainsi des soirées et journées très stressantes pour les supporters Strasbourgeois. La chance c’est que, comme exprimé ci-dessus, ces adversaires seront à la portée du Racing. À lui de s’en saisir pour se mettre rapidement au chaud dans le froid de l’hiver, pour rencontrer des printemps plus chaleureux. Dans ce Hunger Games du football, espérons que le sort du Racing lui soit favorable !
Alors, 2021 : année du boudin ou année du maintien ? Malgré toutes les choses qui ne vont pas au Racing, et sans même parler de la crise des droits télé qui frappe le football français après l’affaire Médiapro, le club a toutes les ressources pour s’en sortir. Il est bien géré, souvent bien coaché et les joueurs ont répondu présent dans le dur. Alors, comme de façon plus générale, 2021 sera de meilleure facture que 2020. Parce que je ne peux pas imaginer un Racing en Ligue 2, pour le retour du public à la Meinau. Alors allez les Bleus et Blancs, allez allez les Bleus et Blancs.