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Les bombardements avant les étudiants : l’histoire méconnue du quartier Esplanade

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Comprendre Strasbourg, c’est aussi se pencher sur l’histoire de la ville. Une histoire parfois méconnue, souvent parlante sur la réalité des quartiers d’aujourd’hui et toujours intéressante. Quartier étudiant par excellence, quartier bétonné et quartier toujours présent lorsque tu as un petit creux, l’Esplanade est aujourd’hui indissociable de l’esprit des Strasbourgeois. Mais savais-tu, qu’avant les blocs qui sont apparus il y a seulement un peu moins de 60 ans, il y avait eu des obus ?

Que signifie le terme « esplanade » ?

On peut parfois passer à côté, mais les mots ont un sens. En revenant quelques peu sur la sémantique du nom d’un quartier, on peut déjà comprendre plusieurs choses. Le terme « esplanade » trouve ainsi son origine dans l’ingénierie militaire du 15ème siècle. Grands terrains unis et découverts, artificiellement aplanis devant un édifice important, les premières esplanades sont donc vides, sans aucune valeur dans la vie civile, mais d’une grande importance pour la défense de la cité.

Crédit photo : Wikiwand

Ce n’est que vers le 18ème siècle qu’elles vont commencer à avoir une fonction esthétique – merci l’art baroque. Comme les terrains sont unis et plats, ils renforcent les sensations de domination d’un grand territoire, donnant la sensation d’écraser l’humain avec ses grandes perspectives. Ce qui coïncidait plutôt bien avec le principe de domination monarchique. Au 19ème siècle elles trouvent une utilité sociale pour accueillir les nombreux kiosques et pavillons lors de grands rassemblements temporaires – le Trocadéro ou les Invalides parisiennes par exemple. Et enfin, au 20ème siècle, elles se retrouvent souvent transformées en parcs.

Capitulation, barrage et citadelle : Strasbourg renforce sa défense

N’avançons néanmoins pas trop vite dans le temps et revenons vers une époque que les moins de 300 ans ne peuvent pas connaître. Point de lilas accrochés aux fenêtres cette fois-ci : Strasbourg capitule devant le roi Soleil Louis XIV, le 30 septembre 1681.

Arrive dès lors un personnage nommé Sébastien de Vauban – surnommé Monsieur Fortifications dans le milieu. Le gus se prend six semaines de vacances tout frais payés à Strasbourg pour en étudier les fortifications. Assez satisfait de ce qu’il voit, malgré une conception vieille d’un siècle, il préconise de l’intégrer à un réseau de places fortes destinées à protéger la nouvelle frontière française. En outre, parce qu’il aime bien faire des plans, Vauban va influencer la construction de deux ensembles de fortification à vocation défensive, dont les noms sont encore présents aujourd’hui en 2019.

Tout d’abord, il laisse des plans d’un barrage, qui serait mis en service pour faire face aux dangers de la guerre moderne, les ponts écluses étant devenus obsolètes. Son rôle ? Inonder les terrains situés au sud de la ville (notamment le faubourg du Neudorf), afin de les rendre impraticable aux assaillants, mais aussi éloigner tous les canons offensifs. Il est construit de 1681 à 1688 par l’ingénieur français Tarade sur les plans de Vauban. Un barrage encore présent aujourd’hui et désormais inscrit au titre des monuments historiques depuis le 18 mai 1971.

Ensuite, alors que Strasbourg représentait une ville stratégique à prendre aux yeux de la monarchie française, Vauban se met à pied d’œuvre pour son plus grand ouvrage dans notre ville. Encore plus fort que le barrage : la citadelle. Le chantier est immense et demandera le renfort de 3 000 hommes.

Plan de la citadelle avant 1800. Crédit photo : Wikiwand

Son rôle est multiple : tout d’abord prolonger la résistance de la ville en cas d’invasion des quartiers d’habitations. Avec même une porte de secours réservée à faire rentrer une armée de renfort si besoin est. Elle sert également à loger, grâce à ses casernes, ce qui la rend moins sensibles à des événements imprévus. Et justement, son dernier intérêt est de pouvoir surveiller les populations. En même temps est par ailleurs construit l’Hôpital militaire Gaujot. Et si ce nom vous dit quelque chose, banco ! c’est désormais la Cité administrative, près du Local !

Strasbourgggggg ! C’est la gueeeeeerrre !

Strasbourg, à travers coach Vauban, a donc bien su renforcer sa défense. Un savant calcul. On était en effet dans des temps où les guerres étaient aussi présentes que l’installation de grandes enseignes américaines en ce moment dans notre ville.

Un peu moins de deux siècles plus tard, la guerre de 1870 met pourtant à mal les fortifications strasbourgeoises. Cette guerre, déclarée le 19 juillet 1870 par l’Etat français à la Prusse, est une série d’échecs militaires assez éloquents. L’Alsace est envahie par le nord après les débâcles de Wissembourg et Reichshoffen les 4 et 6 août. Strasbourg n’est pas en reste : sa défense est assurée par un Général Uhrich de 68 ans et elle n’a pas assez d’hommes pour soutenir un siège.

Par Emile Schweitzer. Crédit photo : Wikiwand

Pas de surprises, le 12 août, Strasbourg est cernée. Le lendemain, la ville commence à être bombardée. Le 19 août, la Citadelle est prise pour cible. Le 24 août, pratiquement tout le stock de fusées métalliques entreposé dans la Citadelle est détruit. Un malheur n’arrivant jamais seul, l’Aubette et le Temple-Neuf sont bombardés et partent en fumée. Le toit de la cathédrale les suit le lendemain. Finalement, après 48 jours de cauchemar, le général Uhrich consent à la capitulation.

Pendant ce mois et demi, les Strasbourgeois voient s’abattre sur eux près de 195 300 obus allemands, soit une moyenne de 6 300 par jour. Sur ce nombre, on compte tout de même 58 000 bombes. Le bilan humain est lourd, parmi les civils figurent 200 morts et 3 000 blessés. Près de 500 immeubles détruits et 10 000 habitants sans abri. De nombreux monuments sont en ruines, dont la Citadelle. Strasbourg se retrouve donc, littéralement, sans défense. Et aux mains des Allemands.

Après les obus, les blocs

Avançons maintenant de 90 ans dans le temps. Après 1870, les fortifications ont été démantelées – puisqu’inutiles – pour construire un vaste quartier militaire, avec des bâtiments de garnison. Sauf que, la Seconde Guerre mondiale étant terminée, plus besoin d’autant de casernes. Surtout que la réconciliation franco-allemande avance à bon rythme.

Le quartier Esplanade en 1967. Crédit photo : Archi-Wiki

Dès lors, en 1958, la ville décide de racheter l’Esplanade militaire à l’Etat – à l’Armée plus précisément. Selon Strasbourg.eu, « des 170 hectares, une zone de 75 hectares est destinée aux fonctions d’habitation, de commerces et de bureaux, 17 hectares sont attribués à l’Université et 13 hectares à l’aménagement du parc de la Citadelle, qui devient accessible aux Strasbourgeois. L’urbanisation de ce nouveau quartier est planifiée par l’architecte urbaniste Charles-Gustave Stoskopf autour de deux axes structurants : l’avenue du Général de Gaulle, orientée nord-sud, reliant la Neustadt à Neudorf, et les rues René-Descartes et de Londres, d’ouest en est. »

C’est alors qu’un vaste projet d’urbanisme se donne pour objectif de construire un quartier neuf, avec écoles, commerces et habitations. A l’édification en 1960, dans une zone péricentrale, du grand quartier résidentiel de l’Esplanade, jouxte ainsi le nouveau campus universitaire. Qui ne pourrait être mieux représenté que par ses deux bâtiments emblématiques, construits en 1962 : la fac de Droit et la tour de Chimie.

Photo : Chloé Moulin

Un nouveau quartier est né, avec de nombreux étudiants qui viennent se poser sur les bancs de la fac. Avec le tram qui fait son retour à Esplanade dans les années 2000, le quartier est désormais reconnaissable entre mille, avec ses immenses tours résidentielles, ses sculptures d’artistes, ses commerces très orientés nourriture et même un centre commercial en partie à ciel ouvert – on ne parlera plus de l’immondice qu’était le pont Winston Churchill.

Aujourd’hui, quelle place pour l’Histoire ? Difficile de se dire qu’il y a à peine 150 ans, Strasbourg était assiégée et laissée sans fortification, sans citadelle ni barrage. C’est aussi le rythme de l’histoire : des bâtiments sont construits, d’autres détruits, suivant les besoins de l’époque dans laquelle on se trouve. Ces grands blocs que vous voyez s’ériger tous les jours, ils n’ont qu’une soixantaine d’années.

Néanmoins, il reste une certaine trace de cette histoire militaire au sein du quartier de l’Esplanade. Rien que pour le nom du quartier. En outre, le parc de la Citadelle a été construit autour de ce qui restait de l’ancienne fortification. On peut y faire du sport, se poser pour boire une bière ou pour admirer les vestiges d’un passé lourd de sens. En 60 ans, le quartier de l’Esplanade a pu accueillir des familles, a vu grandir plusieurs générations et accompagne les étudiants dans des quartiers pas forcément très attractifs, mais toujours là. Comme une citadelle dans les tourments universitaires. C’est ça aussi Strasbourg.

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