C’est au détour d’un stand à l’automne, dans un salon de jeunes talents de Strasbourg, que ses illustrations ont attiré notre attention. À 28 ans, Clara Ally – Clara Le Kiki sur les réseaux – est graphiste et illustratrice. Réunionnaise, elle quitte son île à ses 18 ans pour étudier puis « sillonn[e] la France hexagonale » : Angoûleme, Bordeaux, « pour atterrir en Alsace un peu par hasard », il y a sept ans. Un talent venu de loin, qui doucement fait sa place à Stras. Découverte d’un univers aussi « kiki » que sa créatrice.
Manuelle et créative depuis toujours, Clara Ally se familiarise au dessin dès son plus jeune âge, à travers sa cousine qu’elle décrit comme « très talentueuse ». « Je l’observais et je récupérais son matériel dès que j’en avais l’occasion », avoue-t-elle.
Sur le papier, des souvenirs d'enfance
Elle s’amuse alors à créer « des personnages colorés ou atypiques, inspirés des dessins animés ». « Une porte de sortie » qui lui « permettait d’échapper à un quotidien parfois moins heureux ». Enfant des années 90-2000, c’est avec une souris à la main qu’elle découvre, via le logiciel Paint, le dessin numérique. Les prémices de sa pratique actuelle, finalement.
Aujourd’hui encore, elle croque d’abord sur papier, se « sentant plus libre de [ses] mouvements » avant de « passe[r] au numérique en travaillant sur écran pour avoir des formes un peu plus lisses et ajouter la couleur ». Rajoutant que « parfois, lorsqu'[elle en a] marre d’avoir la tête plongée dans les écrans, [elle] sor[t] les pinceaux et [s’]amuse à la gouache ou à l’aquarelle ».
Si elle utilise « souvent la même palette, composée de couleurs vives et douces », c’est peut-être parce qu’elles « ont quelque chose de l’enfance qui [la] rassurent et [la] rendent heureuse », dit-elle. Un sentiment qu’elle espère retransmettre à celles et ceux qui découvrent ses illustrations.
Un univers rempli de sorcellerie et de sororité
Si elle a depuis bien longtemps abandonné Paint, son style aussi a mûri… Elle explique ainsi qu’ « après [avoir] longtemps banni la couleur rose à cause de tous les clichés de genre qu’elle véhicule », elle a décidé de l’inclure dans sa palette. « J’ai compris que c’était aussi OK d’aimer le rose et que ça n’enlève rien à mes valeurs et engagements ».
En parcourant son travail, on remarque vite que son univers regorge de sorcellerie et de sororité. Pas étonnant : « les sorcières et la magie représentent pour moi la force et l’espoir. J’aime beaucoup l’idée de la sororité, de se soutenir plutôt que d’être en compétition », raconte-t-elle.
Et puis, on croise aussi de nombreuses plantes et fleurs. Une petite graine plantée il y a quelques années, par une amie qui lui offre plusieurs plants.
Depuis, sa collection a grandi, et une nouvelle passion a germé : celle de cultiver des boutures pour ses ami(e)s… Jusque dans son travail : « je pense que les plantes aident à garder le moral, en hiver par exemple, alors j’en sème un peu partout dans mes illustrations ».
La richesse d'une double-culture
Mais elle ne cultive pas que ses plantes dans ses illustrations. Elle y exprime aussi sa double-culture. Car si maintenant, on la trouve à la galerie strasbourgeoise Wyrd, ou exposée à travers la ville, Clara vient de loin, très loin. Un parcours aux allures de voyage initiatique, qui l’a, un jour, fait quitter sa Réunion natale pour la France hexagonale.
Orientée dès la fin du collège par un professeur d’arts plastiques bien avisé, elle explique avoir été confrontée très jeune au choix de partir ou rester, et d’abandonner le « cocon familial » pour suivre ses rêves et sa passion. Si aujourd’hui, elle raconte que « cela a été la meilleure décision de [sa] vie », il lui a fallu d’abord « surpass[er] ses craintes » de quitter sa ville d’origine une première fois, pour le lycée.
Puis une fois le bac d’Arts appliqués en poche, pour poursuivre des études de graphisme et communication, c’est finalement de la Réunion qu’elle s’envole, direction la métropole.
Si elle continue alors le dessin en parallèle de celles-ci et de ses petits boulots, elle n’imaginait pourtant pas qu’elle pourrait « un jour en faire [son] métier ». Mais entourée par des « personnes créatives qui [l’ont] poussé à poursuivre sur cette voie », elle a fini par se concentrer à temps plein au graphisme et à l’illustration.
Un choix qui lui a donné raison, mais le chemin fut long… Comme le temps d’acclimatation. Elle parle de l’Alsace comme d’une région dont elle « apprend encore à en apprécier les secrets et particularités ». Si elle a d’abord eu « beaucoup de mal à [se] dire qu'[elle] allai[t] vivre ici dans un climat si différent » de son île natale, la magie de notre ville a tout de même encore frappé : « Strasbourg gagne mon cœur au fil des rencontres et des découvertes ».
De ce mélange naît un univers qui lui est propre, riche de ses influences croisées. « Dans mes illustrations, je glisse de temps à autre des éléments liés à ma double culture : un dauphin par ci, un bretzel par là ». Un métissage revendiqué : « je suis métisse et j’essaie d’intégrer des personnages qui me ressemblent, des femmes moins stéréotypées, avec des couleurs de peaux et morphologies diverses ».
Elle glisse d’ailleurs dans ses influences, d’autres artistes qui l’inspirent pour les mêmes raisons… « Shivani Parasnis, designer graphique et typographe indienne [à Spotify notamment] [qui] fait vraiment de son origine une force en l’employant dans ses créations, tout comme Sanjeeyann Paléatchy, photographe réunionnais qui propose un regard sensible sur les traditions, la nature et le corps ». Complétant par la peintre et photographe Dora Maar pour « ses compositions et la magie qui entoure ses œuvres ».
Et pour la suite ?
Outre ses projets actuels, Clara espère ouvrir prochainement un Patreon « afin de partager un peu plus sur [ses] expériences, techniques, découvertes et coups de cœur et éventuellement proposer des cours ou ateliers créatifs en ligne ». Et elle annonce rester « ouverte aux projets : illustrer un guide, embellir une affiche, un packaging ou un site internet… et pourquoi pas changer de format et réaliser une fresque ».
En attendant, si la magie, la malice et la douceur des illustrations de Clara Ally t’embarquent dans son univers autant que nous, suis-là sur ses réseaux !
Clara Ally / Clara Le Kiki
Son site
Son Instagram @claralekiki_studio
Sa boutique en ligne
Ses adresses :
La galerie Wyrd (22 rue des Orphelins, à Strasbourg)
La Vallée artisane (14 rue du Maréchal-Foch, 68290 Masevaux)
Coucou c est magnifique ce que tu fais c wahou tu