Connaissez-vous le mythique dragon messin ? Présent un peu partout dans la ville de Metz, le Graoully nous observe, avec ses larges ailes déployées, son air mauvais et menaçant. Mais qui est-il vraiment ? On a quitté Strasbourg le temps d’une journée pour répondre à cette question.
« Ses pattes, trop courtes pour se déplacer aisément sur terre, étaient pourvues d’impressionnantes griffes. Ses yeux rouges et brillants semaient la terreur et son corps massif, entièrement recouvert d’écailles rugueuses, était d’une curieuse teinte entre le vert et le brun. Lorsqu’il ouvrait la gueule, on pouvait y voir une langue d’un rouge vif et deux rangées de crocs acérés comme des poignards. Ses ailes dentelées d’une taille impressionnante lui permettaient de soulever sa masse énorme dans les airs. »
Telle est la description du Graoully que l’on peut lire dans le livret Figures de Metz, édité par les médiathèques messines. Effrayant, n’est-ce pas ? Mais alors, que faisait ce dragon dans cette ville et comment les habitant(e)s ont réussi à s’en débarrasser ? Réponses.
Saint Clément à la rescousse
Au IIIe siècle, à Divodurum, le nom latin de Metz, un dragon vivait dans l’amphithéâtre. Il terrorisait les habitant(e)s. Le soir venu, il volait au-dessus de la ville à la recherche de son mets préféré : la chair humaine. Ni les flèches ni les javelots des soldats, qui ricochaient contre sa dure carapace, ne venaient à bout du monstre. La seule chose que la bête semblait craindre était… l’eau !
C’est alors qu’arriva Saint Clément, le premier évêque de la ville. Envoyé par Rome pour évangéliser Metz, il se mit en tête de chasser le dragon et alla dans l’amphithéâtre pour l’affronter. Le gigantesque Graoully déploya ses ailes, montra les crocs et se tint prêt à attaquer l’imprudent.
Mais Saint Clément s’avança tranquillement et passa son étole autour du cou de la bête qui resta étonnée devant son attitude. Il emmena ensuite le dragon au bord de la rivière Seille et débarrassa ainsi la ville du monstre.
Dans certaines versions de l’histoire, Saint Clément noie le Graoully, dans d’autres, il se contente de lui faire traverser le cours d’eau. Cette légende serait une métaphore religieuse et symboliserait la victoire du christianisme sur le paganisme.
Si on sait désormais qui était le Graoully, un mystère subsiste… D’où lui vient ce nom étrange ?
Le nom Graoully (que l’on peut aussi orthographier Graouli, Graouilly ou encore Graully) viendrait de l’allemand Graülich qui signifie « monstrueux ». Le Graoully est représenté un peu partout dans la ville, car il est un véritable symbole.
D’ailleurs, on le voit sur la cathédrale, sur des maisons, suspendu dans les airs ou encore sur l’ancien blason du FC Metz. On en a alors profité pour suivre ses traces !
Graoully in the city
Il est possible de suivre le Graoully à la trace, car Metz a créé de petites flèches en bronze figées dans le sol qui indiquent la direction à suivre pour découvrir les représentations du dragon. Si toutefois, vous n’avez pas envie de faire tout le parcours, voici plusieurs endroits où vous pouvez apercevoir notre ami ailé.
Étape 1 : dans la rue Taison et sur la cathédrale Saint-Étienne
Dans la rue Taison, il est littéralement suspendu au-dessus de nos têtes. Le nom de la rue est d’ailleurs une référence directe au dragon.
La légende raconte que Saint Clément est passé par cette rue lorsqu’il est allé chasser le Graoully. Pour éviter de réveiller la bête, il intima à celles et ceux qui le suivaient : « Taisons-nous, taisons-nous. » Une autre version de l’histoire relate plutôt le fait que les gens qui passaient par cette rue, qui avaient peur du dragon, disaient à leurs enfants : « Taisons-nous, taisons-nous. »
On peut aussi voir le Graoully à plusieurs endroits sur et dans la cathédrale Saint-Étienne. À l’entrée de la cathédrale, une statue représente Saint Clément, avec, à ses pieds, le Graoully qui a une chaine autour du cou.
Juste en face de cette sculpture, on retrouve le dragon sur un bas-relief. Et à l’intérieur, le dragon veille au grain dans la crypte !
Étape 2 : au 10 rue Chèvremont et dans le Musée de La Cour d'Or
Le célèbre dragon décore aussi la maison du 10 rue Chèvremont. Cette maison, longtemps appelée La Maison au Serpent, abrite une des plus anciennes représentations messines du monstre. Au deuxième étage de cette bâtisse, il est représenté montrant les crocs.
Dans le Musée de La Cour d’Or (gratuit et divisé en trois sections : archéologie, médiévale et beaux-arts) on voit à nouveau le Graoully aux pieds de Saint Clément. Cette sculpture du XVIe siècle est un des joyaux de leur collection. Une autre sculpture, bien plus contemporaine et tout en fer, se trouve place des Pairages.
Étape 3 : un dernier arrêt, à la Taverne du Graoully
Enfin, il serait presque criminel de faire l’impasse sur La Taverne du Graoully, un bar à jeux situé au 17 rue Saint-Marcel. Dans une magnifique ambiance médiévale, on peut y boire de la bière et de l’hydromel, le tout dans des chopes à l’effigie… du Graoully !
Je rajouterai une petite anecdote : les tuiles du toit de la gare de Metz sont éclairées en vert le soir, car ce serait les écailles du graoully
On adore cette anecdote, merci !
Anthony Jilli
Journaliste pour Pokaa