Ce samedi 28 septembre, Extinction Rebellion Strasbourg organisait une déambulation tout le long des quais des Bateliers, jusqu’à l’église Saint-Guillaume. Le but ? Alerter et dénoncer le projet de rénovation du canal du Rhône au Rhin pour de la navigation de plaisance entre Artzenheim et Friesenheim. Un tronçon qui n’est plus utilisé depuis 60 ans et qui est un écrin de biodiversité.
« Bonjour, 46 millions d’euros public ça vous intéresse ? ». Ce 28 septembre, des militant(e)s d’Extinction Rebellion Strasbourg interpellaient les passant(e)s et ont levé l’ancre sur les quais des Bateliers.
Positionné(e)s, derrière un bateau de toile portant les mentions « – de bateaux, + de nature + de vélo », « L’argent public coule à flots », « 46 millions pour dénaturer le canal » et « vive le canal sauvage », ils et elles ont réussi à avoir l’attention des Strasbourgeois(es) et des touristes du centre-ville.
Si certaines personnes se sont retournées sur le passage du bateau et de son gouvernail et ont posé des questions, quelques autres râlaient.
Mais ce bateau de fortune aura réussi son amarrage : alerter sur le chantier de rénovation du canal du Rhône au Rhin, censé faciliter les passages de bateau de plaisance, contre 46 millions d’argent public et la fin d’un écrin de biodiversité de 24km.
Un refuge de biodiversité depuis 60 ans désormais menacé
Non navigable depuis 60 ans, le tronçon de 24km entre Artzenheim et Friesenheim, sur le canal du Rhône au Rhin, est depuis devenu un refuge de biodiversité pour près de 200 espèces de la faune alsacienne. On peut notamment mentionner le grèbe castagneux, le harle bièvre et les bouvières, respectivement deux oiseaux et un poisson, tous classés comme espèces en danger.
Si ce projet se réalise, il va détruire l’éco-système qui s’est créé depuis 60 ans.
Le canal non entretenu possède une véritable allée de verdure, avec beaucoup d’arbres sur les berges, mais également dans l’eau. Cela crée autant de « niches écologiques importantes, qui vont être détruites » selon deux militantes d’Extinction Rebellion.
Selon ces dernières, l’imperméabilisation des berges aura pour conséquence la coupe d’arbres remarquables et de leurs racines, l’altération de zones humides ou encore le dragage du fond du canal, (qui consiste à enlever ou détruire les mines marines d’un plan d’eau, pour permettre aux navires d’y passer sans danger). Comme le résument les deux militantes : « Ça va totalement déstabiliser l’écosystème et le biotope ».
Un projet de tourisme de 46 millions d’euros contesté
Ce projet est principalement mené par la Région Grand Est, qui a lancé la première phase de travaux le 26 août dernier par la rénovation et l’automatisation des trois écluses sud au niveau de Artzenheim et Marckolsheim. Censés durer un an, ils coûteront 12 millions d’euros, dont 5 million provenant de fonds européens. L’entièreté du projet devrait coûter 46 millions d’euros.
Pour la Région, le but de ce chantier est simple : le développement « d’un tourisme doux au plus près des territoires », et « des services pour les habitants riverains (locations/restauration/hébergement, aménagements, espace d’expositions, vente de produits locaux, haltes fluviales, sentier pédagogique…) pour un public varié (plaisanciers, cyclistes, promeneurs, touristes ou habitants riverains) ». Pour faire plus court : faciliter le tourisme et la navigation de plaisance.
Les décideurs prévoient une fréquentation de 5 800 bateaux de tourisme, pour des retombées économiques de 6 millions d’euros. C’est utopique.
Au début du chantier, de nombreuses associations se sont prononcées contre le projet, comme le Collectif du Chaudron des alternatives et les associations Porte du Ried nature ainsi que Wittisheim Vies et Nature. Elles vont par ailleurs déposer un recours contre l’autorisation du chantier devant le tribunal administratif.
Pour les militantes d’Extinction Rebellion, c’est surtout un mauvais usage d’argent public : « On peut s’interroger aussi sur la pertinence économique de ce projet. Les décideurs prévoient une fréquentation de 5 800 bateaux de tourisme, pour des retombées économiques de 6 millions d’euros. C’est utopique. Avec de telles sommes, de nombreux autres projets pour un tourisme plus vertueux pourraient être envisagées ». Elles mentionnent notamment un projet de renouvellement de l’eurovéloroute 15 qui jouxte le tronçon.
Une action devant la Région, avant une grande mobilisation festive le 5 octobre
Une fois l’église Saint-Guillaume atteinte, les militant(e)s d’Extinction Rebellion Strasbourg ont ensuite levé l’ancre, direction le Wacken et les locaux de Région, pour interpeller et sensibiliser le principal financeur du projet.
Et la sensibilisation n’est pas terminée, puisque les associations Porte du Ried Nature, Wittisheim Vies et Nature et Le Chaudron des alternatives organiseront une mobilisation festive le samedi 5 octobre de 10h30 à 14h à Marckolsheim. Animations musicales et poétiques, marche militante du centre-ville jusqu’au canal, vente de tartes flambées, balade pédagogique, le programme est complet pour protester contre ce projet.