Ce 7 juillet, les Strasbourgeois(es) retournent aux urnes pour le 2e tour des élections législatives. Au menu : un duel et deux triangulaires dans les trois circonscriptions strasbourgeoises, pour les 8 député(e)s encore en lice.
Le 30 juin dernier, le premier tour des législatives rendait son verdict : en France, le RN sortait en tête avec 29.25 % [plus 3.90 % avec l’union de l’extrême droite d’Éric Ciotti, ndlr], suivi du Nouveau Front populaire à 27.99 % et de la majorité présidentielle à 20.04 %. Un premier tour marqué par une forte participation, à 66.71 %, qui a provoqué pas moins de 306 triangulaires.
Formées par les trois candidat(e)s ayant atteint les 12.5 % de vote, ces triangulaires étaient plus favorables au RN, souvent sorti en tête. Depuis le 2 juillet à 18h, date limite pour déposer sa candidature au second tour, on y voit cependant un peu plus clair sur les différents duels dans les circonscriptions françaises.
Le Monde a effet recensé 221 désistements, dont 132 provenant de la gauche et 83 du camp d’Ensemble, la consigne étant, pour les candidat(e)s arrivés en 3e position, de se retirer de la triangulaire lorsque le RN était en tête des votes dans la circonscription. Une stratégie qui vise à éviter que le parti d’extrême droite ne revendique la majorité absolue [fixée à 289 sièges, ndlr], ce qui lui donnerait les coudées franches pour développer ses politiques.
À Strasbourg, où le Nouveau Front populaire est à chaque fois sorti confortablement en tête, il y aura deux triangulaires sur les trois circonscriptions, montrant au passage que même les villes comme Strasbourg ne sont plus si perméables que ça à une poussée du vote RN. Des scrutins pour certains encore indécis, mais qui se clôtureront tous de la même manière : à la fin, il n’en restera que trois.
1e circonscription (Centre-ville, Gare, Halles, Finkwiller, Orangerie, Hautepierre, Koenigshoffen, Montagne Verte, Elsau)
Dans la seule circonscription 100 % strasbourgeoise, Sandra Regol fait largement la course en tête pour le Nouveau Front populaire avec 47,60 % des voix au 1er tour. L’écologiste se mesurera à Étienne Loos de la majorité pour garder son mandat de députée.
Les candidat(e)s restants
- Sandra Regol (Nouveau Front populaire – Les Écologistes) (députée sortante) : 47,60 % (32,99 % des inscrits)/20 631 voix
- Étienne Loos (Ensemble – Renaissance) : 24,26 % (16,81 % des inscrits)/10 513 voix
Les enjeux
Comme au foot, un match n’est jamais joué d’avance. Néanmoins, Sandra Regol part avec un large avantage face à son concurrent. Presque 10.000 voix séparent les deux candidat(e)s, et le candidat de la majorité présidentielle devra presque doubler son score pour espérer l’emporter. Il a notamment reçu le soutien d’Irène Weiss, la candidate LR, et ses 2.787 voix, ainsi que celui d’Éric Elkouby, ancien très éphémère député de la 1e circonscription.
Pour tenter de rattraper son retard considérable, Étienne Loos a une stratégie : « municipaliser » le scrutin. En d’autres termes : associer Sandra Regol à Jeanne Barseghian, « les deux soeurs jumelles », pour capitaliser sur un rejet de la population strasbourgeoise envers la maire écologiste. Il dénonce ainsi l’augmentation du coût du stationnement, du prix du tram ou celle de la dette de la collectivité, dans ce qui pourrait être une intervention en conseil municipal. Il s’emmêle en revanche les pinceaux en critiquant « la politique destructrice de l’alliance Verts/LFI à Strasbourg », puisque le conseil municipal strasbourgeois n’a pas d’élu de ce mouvement politique.
Quant à Sandra Regol, elle continue d’afficher une campagne sur le terrain, pour convaincre les 30 % d’abstentionnistes du 1er tour pour s’assurer une victoire confortable, dans une circonscription qui n’a échappé qu’une fois à la gauche depuis 1997.
2e circonscription (Krutenau, Esplanade, Meinau, Neudorf, Neuhof-Stockfeld et Illkirch-Graffenstaden)
Première des deux triangulaires strasbourgeoises, la 2e circo verra s’affronter au 2e tour Emmanuel Fernandes (Nouveau Front populaire – LFI), Rebecca Breitman (Modem – Ensemble) et Viriginie Joron (RN). Un scrutin où le candidat du NFP part largement favori, cumulant les voix de ses deux adversaires.
Les candidat(e)s restants
- Emmanuel Fernandes (Nouveau Front populaire – LFI) (député sortant) : 43,91% % (29,50 % des inscrits)/21 533 voix
- Rebecca Breitman (Ensemble – Modem) : 22,56 % (15,16 % des inscrits)/11 063 voix
- Virginie Joron (RN) : 21,22 % (14,26 % des inscrits)/10 407 voix
Les enjeux
C’est l’une des 80 triangulaires du territoire national. Avec une particularité : c’est la gauche qui est sortie en tête. Il n’y a donc pas eu de désistements du côté de Rebecca Breitmann, puisque la consigne était d’éviter les cas de figure où le RN sortait en tête. Ayant fait mieux en termes de voix que son mentor Sylvain Waserman en 2022, la conseillère municipale d’opposition maintient donc sa candidature, pour incarner « la voie de ceux qui refusent la fatalité entre la LFI (sic) et le RN ».
Comme pour Étienne Loos, son retard sera néanmoins très difficile à combler, même si elle pourra compter sur le soutien de Thibaud Philipps, le maire LR d’Illkirch, ville où la candidate est arrivée seulement 3e, et le report des 3.287 voix d’Alexandre Wolf Samaloussi. Pour le RN, Virginie Joron a enfin réussi à atteindre le 2e tour d’une élection législatives, portée par la dynamique de son parti d’extrême droite faisant plus de 2,5 fois plus de voix qu’en 2022. Fraîchement élue députée européenne, elle semble néanmoins plutôt se concentrer à préparer sa candidature aux municipales strasbourgeoises de 2026, l’une des rares élections à laquelle elle ne s’est pas encore présentée.
Pour Emmanuel Fernandes, l’avance apparaît comme suffisamment confortable pour l’emporter, même si les configurations des triangulaires restent toujours indécises. Comptant sur ses 18 137 voix récoltées à Strasbourg [49% des suffrages exprimés, ndlr], il dispose d’un matelas conséquent. Il continue néanmoins les tractages sur les marchés, et notamment à Illkirch, où ce serait une vraie performance de terminer 1er, devant le RN.
3e circonscription (Cronenbourg, Robertsau et Schiltigheim, Bischheim, Hœnheim, Reichstett et Souffelweyersheim)
Deuxième triangulaire strasbourgeoise, la 3e circo pourrait basculer à gauche, une rareté dans un bastion de la droite. Thierry Sother (Nouveau Front populaire – PS) fait la course en tête devant Bruno Studer (Ensemble – Renaissance) et Stéphanie Dô (RN).
Les candidat(e)s restants
- Thierry Sother (Nouveau Front populaire – PS) : 37,94 % (24,44 % des inscrits)/17 355 voix
- Bruno Studer (Ensemble – Renaissance) (député sortant) : 28,99% % (18,67 % des inscrits)/13 260 voix
- Stéphanie Dô (RN) : 23,10 % (14,88 % des inscrits)/10 567 voix
Les enjeux
Comme dans la 2e circonscription strasbourgeoise, le fait que la gauche sorte en tête et non pas le RN donne « l’excuse » au député sortant Bruno Studer de maintenir sa candidature pour le 2e tour. Faisant 2.000 voix de plus par rapport au 1er tour en 2022, le député Ensemble arrive pourtant en deuxième place, loin derrière Thierry Sother et le Nouveau Front populaire. S’il arrive premier à Reichstett et Souffelweyersheim, Bruno Studer est arrivé en 2e position à Strasbourg, Schiltigheim et Bischheim loin derrière son rival du PS.
Du côté du RN, là encore les résultats sont en progression, et notamment à Strasbourg où Stéphanie Dô a atteint 19,25 % à Cronenbourg et à la Robertsau. Néanmoins, le retard conséquent accumulé sur le candidat du Nouveau Front populaire rend improbable une victoire le 7 juillet, pour une candidate peu présente sur le terrain et pas ancrée dans la 3e circonscription.
Si le principe d’une triangulaire tend vers l’indécision, le très faible report de voix possible [les trois candidat(e)s ont réuni 90% des voix du 1er tour, ndlr] impliquerait des positions figées. Seule inconnue qui changerait l’issue du scrutin : la participation. À chaque bloc de motiver ses troupes, alors que l’abstention était de 34,56 %, la plus haute à Strasbourg.
Le 7 juillet, Strasbourg aura trois nouveaux/elles député(e)s. Trois 2e tours où la gauche fait pour le moment assez largement la course en tête, mais qui seront également à surveiller dans les deux triangulaires. Premiers éléments de réponse dès 20h, pour une soirée sous haute tension qu’on analysera ensemble.