C’est l’histoire d’un éternel recommencement. Comme chaque année, les rues de la ville s’illuminent, les marmites de vin chaud frémissent, les marrons crament un peu… Bref : Noël à Strasbourg, c’est reparti ! Et ça fait presque 500 ans que ça dure : plus vieux marché de Noël de France, le Christkindelsmärik a plein de belles choses à nous raconter.
Lorsqu’il s’agit de donner le coup d’envoi de la période des fêtes, si le monde entier a Mariah Carey, à Strasbourg, on a Jeanne Barseghian. Et pour l’édile, pas de « It’s time » en body rouge, mais une inauguration place de la Gare ce vendredi 24 novembre.
Le job est fait : l’édition 2023 de Strasbourg “Capitale de Noël” est lancée. On est donc officiellement dans notre bon droit si on consacre un article sur deux à la thématique de Noël pendant un mois.
Comme ce petit manège se répète depuis 1570, on s’est dit que ça valait peut-être le coup de s’interroger sur le passé du marché. Si une tentative de prononciation de Christkindelsmärik amènerait tout touriste à une fausse route, ce petit nom témoigne toutefois de toute l’histoire de cette institution strasbourgeoise. Petit retour en images et en anecdotes sur près de 500 ans de magie.
À la base de l'histoire : la naissance du Christkindelsmärik
Si vous recherchez la date du premier marché de Noël à Strasbourg, vous trouverez bien vite 1570. Et c’est vrai, il est consacré à la Nativité mais ce n’est pas le premier marché de fin d’année.
En réalité, les Strasbourgeois(es) se réunissaient déjà depuis près de deux siècles pour un rendez-vous qui se tenait début décembre en l’honneur de Saint-Nicolas. Rien de bien surprenant lorsque l’on sait que son culte est très répandu dans le monde germanique. Ce marché se tenait sur la place de la Cathédrale.
Sauf que Strasbourg voit arriver la Réforme protestante. Et chez les Luthériens, le culte des Saints, ce n’est pas trop ça. On ferme donc ce marché de la discorde mais, sous la pression populaire, on le remplace par un bien plus consensuel, dédié à l’enfant Jésus. On est en 1570 et le Christkindelsmärik est né.
Histoire de rester cohérent, on décale les dates. Et c’est parti pour un marché qui se tient dans les jours qui précèdent Noël, toujours sur la place de la Cathédrale. Au fil du temps, il s’étale place du Château et le long de la rue Mercière. Au XVIIIe siècle, il arrive place du Temple-Neuf !
Le XIXe siècle, une période de changements
C’est en 1830 que le Christkindelsmärik arrive sur la place d’Armes, qui troquera son petit nom contre celui du général Kléber que 10 ans plus tard.
Mais il a été bringuebalé un peu partout dans Strasbourg. En 1848, le marché s’est tenu à l’ancienne gare – actuelle Place des Halles. Il s’installe même, pendant un temps, dans ce qui est aujourd’hui le musée historique de la ville.
Et au fil de ces déménagements, il mue. De ce qui n’était qu’un marché aux épices amélioré, devient progressivement the place to be. Sur le modèle des grandes foires d’hiver, on y trouve bientôt un peu de tout !
Tradition régionale jamais abandonnée depuis, les Strasbourgeois(es) ont rapidement commencé à se plaindre ! En cause, la forte affluence : déjà il y a plus d’un siècle, on était ronchons et un tantinet contrariés de se faire marcher sur les pieds par une foule surexcitée. Une autre rengaine dont on peine à se détacher : « C’était mieux avant. »
La place d’Armes plutôt que celle de la Cathédrale… beaucoup estimaient que le charme de l’événement s’était évaporé. En 1871, ce sont les Allemands qui décident de déménager l’ensemble sur la place Broglie.
Du XXe siècle à aujourd’hui : la liste des interdits au marché de Noël
On se souvient de LA liste. Mais si, vous savez, celle qui, l’année dernière, avait permis à nos politiques de s’écharper pendant une petite semaine sur un débat à base de produits interdits ou non au marché de Noël. En réalité, une telle réglementation existe depuis bien longtemps.
Pendant l’entre-deux-guerres, poissons rouges (c’était très à la mode apparemment) et cartes de vœux étaient bannis de l’événement ! L’idée était de protéger les commerçant(e)s locaux/ales et les traditions.
Si le marché se porte plutôt bien jusqu’aux années 60-70, on remarque à cette période un essoufflement. En cause ? Une forte concurrence des centres commerciaux. On y trouve de tout, à petits prix. Ok, il n’y a pas de vin chaud dans les grandes surfaces, mais bon, à quoi bon aller se les peler dehors alors qu’on découvre avec émerveillement les temples de la consommation ?
Plus les années passent, plus les hivers deviennent douloureux pour les hôteliers/ères et commerçant(e)s alsacien(ne)s. Alors au début des années 90, la réaction est à la hauteur de l’enjeu. Et en 1992, Strasbourg s’autoproclame “Capitale de Noël”.
On commence à penser des parcours qui relieraient les différentes places, sur lesquelles plusieurs marchés sont dispersés. Et c’est toute la région qui s’associe à cette dynamique : petit à petit, plein de petits marchés de Noël fleurissent dans les villages alsaciens.
Pour la première fois en 1994, un grand sapin orne la place Kléber.
Et cette grosse opération de com’ est un succès. Depuis plus de 30 ans, le marché de Noël de Strasbourg a largement repris du poil de la bête jusqu’à devenir une star internationale.
Cette manifestation qui trouve son origine dans l’arrivée de la Réforme protestante à Strasbourg est désormais un grand moment d’union, où marrons chauds et baguettes flambées réchauffent le coeur des Strasbourgeois(es) comme des touristes.
Il était une fois… les origines du marché de Noël de Strasbourg !
Pour aller plus loin, visitez l’exposition virtuelle des archives de la Ville de Strasbourg : Fêtes de fin d’année, fins d’années en fête !
Et si vous voulez tout savoir sur l’édition 2023, notre guide est disponible juste en-dessous, bonne lecture 😉
Très instructif tout en étant léger ! Très belle manière de raconter. Bravo ! Une flemmarde qui ne lit pas toujours les articles jusqu’au bout mais là si ! Attrapée ! Et très belles illustrations. Merci