Alors que la municipalité a officiellement acté le début des travaux de La Laiterie en 2024, l’Espace K s’inquiète. La raison ? Le Cabinet des curiosités du café-théâtre va devoir accueillir le Club, la petite salle de la Laiterie. Une décision qui a fait réagir le Kafteur, association occupant les lieux, allant jusqu’à la création d’une pétition.
Le 5 mai dernier, la Ville annonçait le début des travaux de La Laiterie, prévu pour l’automne 2024, 30 ans après sa création. En projet : une jauge de 1 164 places, de meilleures conditions d’accueil pour les spectateurs/rices et les artistes, ainsi qu’une refonte des abords du lieu, dans un quartier qui va s’en retrouver modifié.
Dans toutes ces améliorations, une décision cristallise depuis les débats : celle de déménager le Club, la petite salle de La Laiterie, dans l’actuel cabinet des curiosités de l’Espace K. Conséquence ? Cela enlèverait une salle, sur les deux présentes, à l’association Le Kafteur, sur place depuis 8 ans. Une décision qui inquiète cette dernière.
Une pétition pour alerter sur la situation
Si les débats sur le sujet ont été relativement courts lors du dernier conseil municipal, entérinant le vote des débuts des travaux de La Laiterie, le Kafteur a néanmoins décidé de publier quelques jours après une pétition intitulée : « S’opposer au projet de mise à mal de l’activité du Kafteur au sein de l’Espace K ».
Signée depuis par près de 2 600 personnes, elle a été mise en ligne pour « alerter non seulement le public mais aussi les élus et la Ville, pour leur dire qu’ils n’avaient peut-être pas pensé à tout et sont allés trop vite dans leur réflexion de construire une nouvelle salle dans un espace qu’on occupe », selon Jean-Luc Falbriard, comédien, metteur en scène et associé à la programmation depuis 30 ans au Kafteur.
Dans la pétition, le Kafteur refait une chronologie des événements qui ont amené à la prise de décision des futurs travaux de La Laiterie durant les années 2022 et 2023. Une prise de décision à laquelle Jean-Luc Falbriard assure que le Kafteur n’a pas été associé.
Désormais, il souhaite « essayer de faire bouger les lignes et réfléchir soit à une autre solution, soit à pouvoir bien penser les tenants et aboutissants de cette décision, pour qu’on puisse maintenir un projet artistique que l’on développe depuis qu’on est sur ce site ».
Une cohabitation « impossible techniquement »
Et le Kafteur s’inquiète pour son futur. Si l’on en croit Jean-Luc Falbriard, la cohabitation entre Le Club et l’Espace K « ne sera pas possible techniquement », notamment à cause de soucis d’insonorisation et d’acoustique. En outre, selon l’associé à la programmation, cela mettrait à mal d’autres projets artistiques, reposant sur l’utilisation des deux salles, comme par exemple les Chistmas Shows.
Cela taperait également au portefeuille de l’association, qui utilise également cette salle pour des événements privés ; une source de financement qui manquerait, alors que les subventions de la Ville au Kafteur ont baissé de 2,5%. Pour pallier à cela, Anne Mistler a néanmoins annoncé, lors du conseil municipal du 10 mai, une dotation de l’Eurométropole à l’association.
Mettre en oeuvre un concept original dans une salle de rock qui n’a pas la même modularité que celle qu’on a actuellement, on a du mal à voir comment c’est possible.
Si certain(e)s Strasbourgeois(es) se demandent si le Kafteur ne pourrait pas utiliser le Club en dehors des concerts qui y seraient organisés, Jean-Luc Falbriard est catégorique dans la négation : « On est très sceptiques. Les besoins techniques d’une salle de spectacle/théâtre ne sont pas les mêmes que ceux d’une salle de rock. Et si à chaque utilisation on doit rentrer dans une gestion d’espace, on va devenir des gestionnaires de salle, ce qui n’est pas notre métier ».
Il voit donc mal comment cette cohabitation pourrait fonctionner : « On a besoin de visibilité. Si dans deux ans on doit revoir la voilure, quel intérêt ? On est là pour proposer nos projets, et sans cet espace-là dans les mêmes locaux, on n’y arrivera pas ». Avant d’ajouter : « Ne pas avoir anticipé ça, c’est assez dénigrant pour ce que l’on a réussi à mettre en place ».
Des discussions en attente avec la Ville
Lors du conseil municipal du 10 mai dernier, la municipalité a répondu aux élu(e)s Pernelle Richardot (PS) et Joris Castiglione (PCF) qui demandaient plus d’informations concernant l’Espace K. Anne Mistler n’avait pas de réponses à apporter pour le moment, mais annonçait que des réflexions étaient en cours.
Pour Syamak Agha Babaei, l’époque d’un utilisateur sur un espace et pour un usage est terminé. Il a également affirmé qu’après des recherches, le Cabinet des curiosités était le seul endroit qui permette techniquement une co-activité.
Il va falloir pour nous réfléchir à la suite.
À ce sujet, une réunion est prévue début juin, pour que l’exécutif puisse donner ses arguments de faisabilité. De la visibilité bienvenue pour Jean-Luc Falbriard : « Pour l’instant, on ne nous a pas exposés les arguments, on a juste dit : « c’était faisable » ». Il annonce qu’ils leur feront remonter leurs besoins en espace, en moyens, « si par malheur ce projet devait vraiment se concrétiser ».
Si le projet tel quel devrait voir le jour, ce qui en prend le chemin, il faudra pour le Kafteur réfléchir à l’avenir. Selon le résultat de la réunion, l’association verra quels leviers actionner avant l’été pour continuer de faire parler de leur situation. Parce que, comme le dit Jean-Luc Falbriard : « Deux ans, pour nous, c’est déjà demain ».