À l’heure où les sentiers vosgiens se chargent de randonneurs en quête d’air pur et de grands espaces, il faut ruser pour trouver des coins tranquilles. Châteaux, jardin, grotte miraculeuse et ruines gallo-romaines : direction Hutlehouse, en Moselle, pour une marche pleine de surprises à moins d’une heure de Strasbourg en voiture.
Sur le parking du club vosgien de Phalsbourg-Lutzelbourg, nous ne sommes que deux ce dimanche matin de Pentecôte. Pas un chat à l’horizon, et l’impression d’être seules au monde devant cette vue sur la vallée, nimbée de lumière matinale. Le vent souffle dans les cimes derrière nous, et les chants d’oiseaux sont particulièrement nombreux et mélodieux. Je n’ai pas encore commencé à marcher que j’ai déjà le sourire au coin des lèvres : cette première randonnée depuis le troisième déconfinement s’annonce prometteuse.
Nous nous mettons en route tranquillement sur un sentier plutôt plat et couvert. Rapidement, des lacets se succèdent en pente douce. Il est 10h30 et la lumière rasante habille la forêt d’un vert lumineux. Au terme d’une heure de marche paisible et solitaire, nous arrivons à la première étape du parcours : le rocher du Muguet. Un endroit dégagé et ensoleillé, idéal pour lézarder en admirant la vallée et des anciennes tours de château sur les hauteurs. Au programme de ce premier arrêt : café, graines et bronzette.
Un château hanté
De retour sur le sentier, nous continuons notre descente au fond de la vallée pour déboucher sur le canal de la Marne au Rhin, que nous traversons au niveau de l’écluse 26. De l’autre côté, un peu de sport nous attend. Car comme tout randonneur le sait, ce que l’on a descendu, il faut ensuite le gravir.
Après une heure et demie passée à musarder sur le chemin, une belle côte de près de 2 kilomètres nous attend. Deux-cents mètres de dénivelé, à flanc de coteau. Et deux écoles. Celle de ma compagne du jour, à la foulée régulière et entêtée, bien décidée à ne rien lâcher. Et la mienne, de type: « Ça grimpe dit donc. Et si je m’arrêtais une dizaine de fois, histoire de profiter de la vue d’autant de manières différentes – oui on ne voit que des troncs d’arbres mais c’est joli quand même. »
Une demi-heure plus tard, nous sommes enfin en haut de la crête. Mais je dois reconnaître que j’en ai plus bavé ici que sur les chemins des Hautes-Vosges, du côté du Hohneck et des quatre lacs. Merci les confinements pour ces jambes en mousse. Petite pause près de la maison forestière du Schweizerhof pour se sustenter après l’effort et nous voici reparties.
En suivant la crète, nous arrivons tranquillement à la deuxième étape de cette randonnée : le château du Grafenstein. Ou plutôt les châteaux, car il y a sur le site deux structures distinctes. Le plus grand des deux aurait été fondé au XIIe siècle par un dénommé Meribodo de Grafenstein. La légende raconte qu’une dame blanche hanterait ses ruines, se transformant tous les vendredis en un crapaud avec une clé en or dans la bouche. Celui qui accepterait de l’embrasser la délivrerait alors du maléfice et aurait accès, grâce à la clé, à toutes les richesses qu’elle aurait amassées de son vivant. Pas de bol, nous arrivons à 14h un dimanche.
Une grotte miraculeuse
Mais installées sur un banc sous un arbre pour déjeuner, nous pouvons tout de même constater qu’une certaine magie est à l’œuvre au pied de ces vieilles pierres. Une averse diluvienne se déchaîne sans prévenir, un quart d’heure après que nous ayons commencé à casser la croûte. Par miracle, nous restons au sec malgré un feuillage clairsemé au-dessus de nos têtes. Et le soleil revient 5 minutes plus tard, radieux. Aurait-on rêvé ?
Le sentier nous emmène ensuite en direction de la grotte Saint-Vit. Et surprise, celle-ci se cache sous un jardin alpestre coloré et joliment entretenu. Quelques visiteurs profitent du panorama offert depuis un rocher planté d’une croix. Nous descendons une volée de marches pour parvenir à l’entrée de la cavité, aménagée en chapelle. Autrefois, cette grotte était un lieu de pèlerinage où l’on exorcisait les personnes atteintes de la danse de Saint-Guy, une maladie aujourd’hui connue sous le nom de Chorée de Sydenham qui provoque des mouvements involontaires.
© A.Me / Pokaa
Après cette étape, le sentier redescend une nouvelle fois dans la vallée, en direction du canal mais aussi de la Zorn que nous traversons. Il est 16h30 et une dernière côte nous attend. Plus de 150 mètres de dénivelé mais en lacets cette fois. Restent qu’ils sont peu nombreux et que la pente est raide.
Au sommet, le chemin serpente entre les arbres en direction des ruines gallo-romaines du Wasserwald. Ces pierres sont les vestiges d’un village qui aurait été construit par les Médiomatriques, une tribu celte dont on pense qu’elle aurait quitté la vallée pour les hauteurs après que leurs terres eurent été confisquées par les Romains et confiées à des peuples germaniques.
Sur ces derniers kilomètres de cette randonnée comme les premiers, personne à part nous. Le sentier étire ses derniers kilomètres sur du plat. Un coup d’œil au podomètre en arrivant à la voiture : 21 kilomètres tout de même. Un peu fatigués, nous jetons tout de même un dernier coup d’œil à la vallée depuis le parking. Le vent chante toujours dans les arbres. Les trilles des oiseaux n’ont pas fini de résonner dans nos oreilles.
© A.Me / Pokaa
La rando en résumé
🏔 La difficulté de la rando 7/20
⬆️ Dénivelé: 200 m
🥾 Distance: 21 km
🕧 Durée: environ 6h30
🚙 Y aller: une heure de Strasbourg en voiture