Un an après notre visite de l’Euroasis, nous sommes retournés voir où en est cet espace collaboratif dédié aux transitions. Entre aménagements, nouveaux projets mais aussi difficultés de gouvernance et bail précaire, ce lieu innovant cherche son équilibre.
Les herbes hautes et désordonnées ont laissé place à une petite allée, au 4 chemin Goeb, à l’orée de la forêt de la Robertsau. Nous avions poussé les grilles de l’Euroasis il y a un an. Un collectif citoyen réuni depuis 2017 venait d’en obtenir les clefs après avoir été choisi par la ville pour louer ce terrain de 20 500m².
« L’idée d’Euroasis c’est d’être le laboratoire des transitions à Strasbourg, rappelle Lionel qui nous accueille ce jour-là. C’est-à-dire un lieu pour imaginer le monde de demain, de manière plus positive en tenant compte de l’écologie mais aussi le côté sociétal et environnemental. On pourrait y rencontrer des personnes, faire des formations ou des événements. L’ADN du projet c’est d’être ouvert à tous. »
Des premiers mois actifs
Les trois villas occupant le terrain et inhabitées depuis plus de quinze ans étaient alors à peine visibles, camouflées sous la broussaille. Des détritus ici et là témoignaient de brefs épisodes de squattages divers. « On a dû couper, déblayer, nettoyer pendant plusieurs semaines », raconte Lionel. En traversant le terrain on aperçoit ici et là des piquets pour délimiter certains espaces. « C’est pour protéger certaines espèces végétales ou animales, explique notre hôte. Ici par exemple il y a une fourmilière ». C’était l’un des engagements pris auprès de la ville. Le lieu est aussi devenu un refuge LPO et des matinées d’observation des oiseaux sont organisées.
À son arrivée sur le terrain, le collectif bénéficie de l’engouement des débuts. Dès le mois de septembre, un festival est organisé sur place pour présenter les lieux. Différents espaces extérieurs sont aménagés : un parcours sensoriel pieds nus à destination des plus jeunes, un espace fumeur ainsi qu’un point d’eau et un four à tartes flambées construit par de petites mains.
Les membres d’Euroasis se répartissent par activités. L’un est notamment chargé du jardin de permaculture où poussent citrouilles et tomates. Il faut pour le rejoindre, passer par un chemin où prend forme une drôle de construction en terre, ressemblant à une maison de Hobbit : « C’est une love-shack, décrit Lionel. Une petite habitation en boue. On l’a commencée pendant le festival et depuis c’est un atelier qui continue. L’idée c’est de faire des constructions atypiques ».
Un bail restrictif
Si les extérieurs semblent prendre forme, malgré quelques moins d’absence dus à la crise sanitaire, les ambitions et projets annoncés voilà un an sont encore loin. Restaurant, espace de coworking, salles pour événements : rien de tout ça n’a vu le jour. Les villas restent vides et délabrées. Tout est à faire. En cause, pour commencer, un problème de bail selon Lionel. « On a pour l’instant un bail très restrictif, explique-t-il. Notre projet c’est d’investir les bâtiments mais là on n’a pas le droit d’y être, ce qui nous empêche de les rénover et de réaliser les activités prévues. On est en stand-by. On a aussi beaucoup de restrictions, pour l’instant pour pouvoir entrer sur le terrain il faut être officiellement membre. »
Le bail précaire, de courte durée, doit prendre fin le 30 septembre. Un dossier doit être présenté à la ville dans les prochains mois pour obtenir un bail emphytéotique, c’est-à-dire de longue durée, en l’occurrence 25 ans. Avec, à la clef, plus de libertés. En attendant, « ça nous empêche d’avancer », insiste Lionel.
Trouver sa place
Autre difficulté rencontrée au cours de l’année : l’organisation des membres. Le collectif revendique depuis ses débuts un fonctionnement holacratique, c’est dire sans hiérarchie. Pour ce faire, le collectif cherche ses marques. « On s’est très vite retrouvés à plus de 150 personnes, avec des nouveaux qui nous rejoignaient. Mais on n’avait pas mis en place de processus d’intégration et lors des réunions, les décisions prises avant étaient sans cesse remises en question. Ça n’avançait plus. » Au mois de décembre, cette situation couplée aux températures descendantes et donc à la baisse de présence sur le terrain, mène à une « crise de gouvernance », raconte Lionel. « Une partie des gens, parmi ceux qui prenaient des décisions, ont décidé de partir. Il y avait un manque d’informations, certains ne se sentaient pas écoutés. C’est l’humain qui entre en jeu, c’est normal. »
Après quelques semaines de flottement, ceux restés décident de reprendre les choses en main, avec un objectif : relancer le projet. Une assemblée générale extraordinaire a lieu le 8 mars en présence de près de 30 personnes. Sept personnes sont élues sur le principe des élections sans candidat, tels des « pompiers » pour éteindre l’incendie et remettre sur pied le projet. Un mandat d’un an maximum et qui doit prendre fin aussitôt le bail emphytéotique signé. « Après on refera une élection et une nouvelle gouvernance sera mise en place. », assure Lionel.
« L’idée c’est de ne pas avoir un système pyramidal mais d’être plusieurs à prendre des décisions. Certains sont là pour dynamiser l’activité de leur groupe mais n’ont pas plus de pouvoir que les autres. »
Un projet qui évolue
La mission des sept élus consiste désormais à élaborer un nouveau dossier qui sera présenté à la Ville. « Le premier dossier avait été présenté en 2017, depuis le projet a évolué. On a pris note des contraintes imposées mais aussi du potentiel des extérieurs, on a beaucoup appris. » Certaines ambitions perdurent : l’événementiel, le coworking, le restaurant. D’autres ont disparu. « On avait un projet d’école alternative mais l’école, NovAgora, a fermé donc ça ne se fera pas, ou pas avec eux. » Enfin, de nouvelles idées ont germé : « On voudrait développer une micro-brasserie et on réfléchit à un système de récupération de l’eau pour chauffer une des villas ».
Certaines initiatives, qui n’étaient pas au programme à l’origine ont déjà pointé le bout de leur nez. Une caravane ornée d’un graffiti coloré a été transformé en bar, il s’agit du « Carabar ». Le mercredi soir, La Ruche qui dit Oui, permet de se fournir en produits locaux avant de se retrouver autour d’un apéro.
Les membres d’Euroasis, toujours en quête de nouvelles idées, de nouveaux projets et de nouvelles mains pour les réaliser multiplient les occasions d’aller à leur rencontre. Pour retrouver toutes leurs activités et dates de présence sur les lieux, rendez-vous sur leur page Facebook ! Le lieu accueillera notamment Le camp climat du 20 au 23 août.
Votre article est très très gentil . Il suffit de passer à pied chemin Goeb pour comprendre : les extérieurs ne sont pas entretenus et sont dans un état déplorable, sans compter les objets, palettes etc.. qui trainent. Cette association se révèle visiblement totalement incapable de gérer ce patrimoine magnifique.
C’est une question de perspective. Le lieu est magnifique, si j’ai bien compris, il n’a pas été entretenu avant, un admirable potager en permaculture a vu le jour en quelques mois, le mercredi soir est organisée la distribution de la Ruche qui dit Oui et c’est pour moi un vrai plaisir d’y aller.
“Le lieu n’est pas entretenu”
Refuge LPO protection de la biodiversité,
Non vous ne verrez jamais des pelouses tondue, des espaces tiré au cordeau.
“Des palettes trainent”
Pour certaines elles délimitent une zone qui protège un endroit précis quant aux autres elles ne “traînent” pas mais sont stockées pour construire les bacs qui serviront à la permaculture et à construire différents éléments.
Voilà quelques explications nécessaires ce lieu est et doit rester “sauvage” en grande partie puisqu’il fait partie de la ceinture verte. Il ne ressemblera jamais au parc de l’orangerie.