La présidente de Radio France Sibyle Veil annonçait en novembre dernier un grand plan budgétaire comprenant la suppression de près de 299 postes, dont celui des animatrices et journalistes FIP en région. Les trois antennes locales de Bordeaux, Nantes et Strasbourg devraient ainsi cesser leur activité et passer sur le réseau national, avec des informations délivrées depuis Paris. Mais jusqu’au mois de juin prochain, date butoir à laquelle la mesure devrait prendre effet, le comité de soutien de FIP Strasbourg compte bien faire revenir la direction sur sa décision.
On en avait déjà parlé en novembre dernier juste ici, l’antenne strasbourgeoise de FIP radio, (mais aussi celle de Bordeaux et de Nantes) est sur le point de fermer, dans le cadre d’un grand plan budgétaire, dirigé par la présidente de Radio France, Sibyle Veil. Depuis que la décision a été annoncée et doit prendre effet au mois de juin, de nombreux auditeurs se mobilisent. Une pétition commune aux trois antennes est en ligne et réunit aujourd’hui plus de 14 000 signatures. Un collectif de soutien pour FIP Strasbourg s’est rapidement formé et compte bien tout faire pour remporter cette course contre la montre.
FIP : vers une radio sans infos ?
Pour l’ensemble des membres du collectif, FIP représente un objet radiophonique à part, qui a réussi à allier avec brio le local au global. L’antenne strasbourgeoise délivre près de 900 informations chaque mois, qui permettent de faire vivre la culture locale notamment en offrant 400 places de spectacles. Pour Stéphane Litolff, directeur du pôle culturel “Le Diapason” à Vendenheim, les enjeux sont clairs et ils sont les suivants : la pluralité de l’information, le maintien du service public et conserver le lien de proximité. Il précise : “Notre engagement s’inscrit dans une vraie démarche. Il est question de service public ! Cette recentralisation vers Paris me semble complètement hasbeen à l’heure où on mise sur la proximité partout.” Il estime, qu’en tant qu’acteur culturel du territoire, il a sans aucun doute besoin de FIP pour faire venir les publics jusqu’à lui. Et d’ajouter : “FIP, ce n’est pas de la pub, c’est bien du journalisme !”
Les membres du comité de soutien de FIP Strasbourg redoutent les décisions de la direction qui visent à supprimer toute l’information et les journaux pour en faire une radio musicale.
“Pour moi, c’est le Black Radio France Day !”
Pour Jean-Luc Fournier, journaliste à la tête du magazine Or Norme, ce n’est pas une question d’argent. Le budget de Radio France consacré à FIP Strasbourg, n’excède pas les 300 à 400 000 euros. Et les trois stations restantes (soit Bordeaux, Nantes et Strasbourg) coûtent environ 1 million du budget total de Radio France, soit une infime partie : “Sibyle Veil, c’est une costkiller, son but, c’est de faire économiser un maximum à Radio France.”
“Évidemment, les journalistes et animatrices de FIP ne comprennent pas. Elles se donnent depuis des années, et il y a des résultats, de bons résultats et pourtant, on veut les virer.” explique Stéphane Litolff. Il ajoute : “Pour moi, c’est le Black Radio France Day avec tous ces départs volontaires.” Et en effet, toutes les antennes risquent bien de disparaître.
Le combat mené est commun aux trois antennes de Bordeaux, Nantes et Strasbourg. Dans les deux premières villes, les mairies se sont officiellement positionnées afin que FIP y soit maintenu. À Strasbourg, Roland Ries ne s’est pas déclaré en faveur de l’une ou l’autre direction à prendre, mais il a rencontré le 3 décembre dernier Bérénice Ravache (directrice de FIP Radio) et Sibyle Veil dans le cadre de la présentation de leur projet.
Réactions dans le monde politique
Il y a deux ans, le magazine Or Norme du mois de décembre 2017 consacrait une double page à l’avenir de FIP Strasbourg qui semblait déjà incertain. À l’époque, le député du Bas-Rhin et président de la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation de l’Assemblée nationale, Bruno Studer s’était exprimé sur le sujet, en se disant favorable au maintien de l’antenne locale de FIP : “Maintenant sur le plan des informations locales, elle a entendu notre souhait qu’elles perdurent. Un point que j’avais déjà personnellement abordé avec le président de radio France.” Le député avait également assuré qu’il allait suivre le dossier “de très près.”
Mais récemment, il semble finalement s’être rangé aux côtés de la directrice générale de Radio France. Aux courriers qui lui sont adressés, notamment par les auditeurs de FIP à Strasbourg, il répond avec un mail type, présentant le projet de la direction de FIP.
D’autre part, plusieurs personnalités politiques de la région ont affiché publiquement leur soutien à FIP et se positionnent en faveur du maintien de l’antenne et des informations locales. Cet été, la députée Martine Wonner a écrit à Sibyle Veil, afin de lui rappeler l’importance primordiale des antennes locales de FIP dans le contexte social actuel. Plus récemment, en novembre dernier, c’est la députée européenne Fabienne Keller invitait à se mobiliser pour que les Strasbourgeois.es puissent continuer d’écouter FIP Strasbourg et sollicitait l’attention de la directrice générale de Radio France : “Comme beaucoup de Strasbourgeois, je souhaite que l’antenne locale de FIP soit reconsidérée à sa juste valeur et ne fasse pas les frais d’un plan d’économies budgétaires. Merci pour l’attention que vous voudrez bien accorder à cette réalité strasbourgeoise.”
Alain Fontanel quant à lui, 1er adjoint au Maire chargé de la Culture et Vice-Président de l’Eurométropole (et candidat aux élections municipales de 2020), répond sur Facebook lorsqu’il est interrogé sur le sujet : “Je suis favorable au maintien de l’antenne FIP à Strasbourg, comme j’ai eu l’occasion de la dire à de nombreuses reprises depuis le premier rassemblement local début 2017.” Néanmoins, il ne fait état d’aucune lettre adressée à Sibyle Veil.
Plusieurs communes celle de Schiltigheim ou Oberhausbergen ont aussi affiché leur soutien à la mobilisation.
Le collectif de soutien FIP Strasbourg ne compte rien lâcher
Le comité de soutien va rencontrer le député Bruno Studer le vendredi 20 décembre prochain à Strasbourg. Même si les membres ont peu d’espoir de faire évoluer la position de ce dernier, ils pourront au moins rappeler les enjeux d’une telle décision.
Pour la suite, le comité ne compte pas faire relâcher la pression. Il prévoit de solliciter chaque député.e du Bas-Rhin afin qu’il.elle prenne officiellement position sur ce dossier : “On va faire le tour” assure Jean-Luc Fournier, espérant également faire réagir le ministre de la Culture Franck Riester, resté jusqu’alors silencieux.