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Gilets Jaunes : un samedi d’affrontements à Strasbourg pour l’acte XII

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Samedi dernier, un voile blanc a recouvert la ville toute la journée, mais malgré la saison, ce n’était pas de la neige. D’épais nuages de gaz lacrymogène se sont étendus à de multiples reprises, annonçant au loin les affrontements à distance entre Gilets Jaunes et forces de l’ordre. Bilan : Plusieurs blessés, chez les manifestants comme chez les forces de l’ordre, et des dégradations. Pour Strasbourg, l’acte 12 de la mobilisation des gilets jaunes ressemble fortement à l’acte 9, mais en plus intense. Entre 2000 et 3000 personnes étaient présentes au plus fort de la manifestation. Retour en images.

Photos et texte sauf précision: M.L. pour Pokaa.fr

Strasbourg, capitale européenne. Symbole fort pour les Gilets Jaunes à quelques mois des élections européennes qui doivent nommer nos représentants au Parlement d’une UE toujours plus contestée (des listes électorales Gilet Jaune ont même vu le jour, approchées par des personnalités politiques allant de Florian Phillipot à Françis Lalane…). Il était logique que la ville redevienne le théâtre d’affrontements entre Gilets Jaunes et les forces de l’ordre. Tout commence comme d’habitude : une petite assemblée s’organise place de la République, puis c’est rendez-vous avec des groupes de Belfort, Metz et d’autres délégations alsaciennes devant le Parlement pour 11h.

Une escalade de la violence en crescendo

Par contre, cette fois-ci, ça dérape vite, probablement dû à la tension exponentielle de l’actualité de ces derniers jours. Les premiers gaz lacrymogènes arrivent tôt vers le Parlement, autour d’une interpellation musclée d’un individu vraisemblablement en possession d’un pétard, comme pour annoncer l’escalade incontrôlée de la situation dans la suite de la journée. Vers 14h à la Gare, à défaut de ne pouvoir y rentrer, certains Gilets Jaunes entament des jets de projectiles. Les affrontements et les gaz recommencent donc sur la place de la Gare. Puis après une longue marche, rebelote, et ce de manière impressionnante, devant le siège de l’Eurométropole et aux abords de l’Hôtel de Police, alors qu’une centaine de Gilets Jaunes tentent d’envahir un axe autoroutier. Les échanges projectiles contre lacrymogènes reprennent régulièrement, entrecoupés quelques moments de flottement, avant que le cortège reparte vers le centre.

Vers 17h, c’est le retour vers les Halles d’une foule désormais survoltée et énervée qui s’est mêlée aux passants venus faire leurs achats du samedi. Qu’importe : les forces de l’ordre placent un nuage de gaz lacrymogène, accompagné de grenades de désencerclement, à travers la place, allant presque jusqu’à la place de l’Homme de fer et rue du Faubourg de Saverne.  A partir de là, le gros des dégradations survient : vitres, poubelles terrasses, bennes à verres et autres éléments du mobilier urbain sont pris pour cible. Jusqu’à 19h, la foule se disperse, se perd et se recompose dans le centre-ville, sur une zone allant du MAMCS à Broglie, en passant par la place du Corbeau et la Petite France. De nouveaux gros affrontements ont lieu rue du 22 Novembre et place Kleber, alors que les forces de l’ordre décident de procéder aux interpellations. Bilan : 19 interpellations, 9 blessés légers chez les forces de l’ordre selon la préfecture. Un syndicaliste ferait partie de nombreux blessés côtés manifestants, il aurait prévu un signalement à IGPN et s’interroge sur la nature du tir à l’origine de sa blessure.

De plus, dans une dépêche par l’AgenceFrancePresse reprise massivement dans les médias nationaux, le consistoire israélite du Bas-Rhin a fait part dimanche 3 février de sa « forte émotion » après que de « violents propos antisémites » auraient été proférés près de la Grande Synagogue en début de journée, pendant le jour du Shabbat: « La loi française permet à chacun de manifester librement, mais elle doit condamner avec fermeté et d’un bras fort les insultes antisémites ».

S’en est suivi la condamnation de ces propos par le préfet Jean-Luc Marx ainsi que celle du maire Roland Ries (voir plus bas), qui prend pour la première fois la parole sur le sujet des gilets jaunes, publiquement sur Facebook. Le président du Consistoire, Maurice Dahan aurait déclaré récupérer des éléments dans l’optique d’un dépôt de plainte. Tout comme pour la casse, il serait hasardeux de généraliser ce genre de comportement avec l’ensemble du mouvement des Gilets Jaunes à Strasbourg.

Plusieurs groupes de gilets jaunes ont par la suite condamné ouvertement la casse, tout comme les injures à caractère raciste ou antisémite qui auraient été scandées par une poignée d’individus pendant la journée de samedi. Pendant la manifestation, des “perturbateurs” se faisaient régulièrement rappeler à l’ordre, voire se faisaient éjecter du cortège et la dégradation du mobilier urbain était empêchée là où cela se pouvait. Par contre, une fois la fin de journée arrivée et le cortège dissout en plusieurs groupuscules par les gaz lacrymogènes… “impossible de contrôler” les perturbations pour les gilets jaunes, n’ayant pas de réel “service d’ordre” habituellement présent dans des manifestations syndicales… preuve s’il en faut de la volonté d’horizontalité du mouvement. Un débrief de la journée de samedi est prévu ce mardi soir au centre Bernanos et l’acte 13 de samedi prochain est déjà dans les starting blocks sur Facebook.

Communiqué de la préfecture

Deuxième journée de grosses tensions pour Strasbourg

Voici quelques éléments de contexte et “d’analyse”, ayant suivi le mouvement depuis ses prémices, pour comprendre comment on est arrivé là, et pourquoi la tension et les violences atteignent même notre belle ville européenne, habituellement calme dans les mouvements sociaux, même chez les gilets jaunes.

Des scènes similaires à celles de ce samedi à Strasbourg ont lieu depuis fin novembre dernier un peu partout en France. Chaque samedi depuis le 17 novembre dernier, une foule de Gilets Jaunes se rassemble pour faire entendre un profond malaise social, un sentiment grandissant d’injustice et une détresse économique. Jusqu’en décembre, le gouvernement fait la sourde oreille. La seule réponse aux manifestants semble être du gaz lacrymogène, des grenades désencerclantes, des coups de bâton et des tirs de LBD (lanceurs de balle de défense ou flashball).

Après l’incompréhension, et face au manque de dialogue, vient la colère, et les partisans de la colère. C’est le retour des « casseurs » dans les manifestations.  Les gilets jaunes et leur mouvement sont réduits aux actions des diverses minorités qui les composent. Tour à tour, ils sont à la fois citoyens lambdas, mais aussi antisémites, complotistes, racistes, beaufs, ahuris, égoïstes, voyous de quartier, blackblocks d’extrême gauche, milices fasciste, radicaux écologistes, campagnards, chômeurs alcooliques et assistés… bref ils sont montrés comme “des pauvres” dans un mépris de classe assourdissant. Ou, du moins, comme des gens méprisables.

De fortes tensions et une mobilisation nationale ayant fait fléchir le gouvernement

A force de rond-points bloqués, de dégradations du mobilier urbain et du patrimoine, de destruction stratégique et réfléchie de structures bancaires ou de symboles institutionnels et de jet de projectiles allant des bouteilles en verre en passant par pétards, les pavés et les “bombes artisanales”, le gouvernement finit par fléchir en décembre, espérant une accalmie pour les vacances ; plusieurs mesures sont annoncées, la taxe sur le diesel (à l’origine de la discorde) est repoussée et un « Grand Débat » est lancé (mascarade de débat, et campagne LREM pour les élections européennes, selon une majorité de gilets jaunes).

Mais pendant ces semaines de mobilisation dans les rues et sur les ronds-points, les Gilets Jaunes se sont rencontrés, se sont parlés et ont commencé à discuter politique. Ils ne se revendiquaient, ni de droite ni de gauche. Ils sont abstentionnistes, déçus de la politique partisane traditionnelle, des corps intermédiaires comme les syndicats, de l’impunité et  de l’incompétence des élites. Ils découvrent le RIC (référendum d’initiative populaire), le complotisme, les « fake-news » et la répression policière en quelques semaines. Ils forment des groupes et font évoluer leurs revendications. Pour ceux de Strasbourg, ça se traduit par plusieurs demandes, similaires à celles qu’on peut trouver ailleurs en France: RIC, suppression de la hausse de la CSG, encadrement du prix des loyers, suppression du CICE, rétablissement de l’ISF, suppression des taxes sur les produits de première nécessité, plus de démocratie, de services publics, de salaires…).

Et puis, se prendre du gaz toute la journée ou tenir un rond-point, ça soude. Encore plus quand on voit la même chose partout en France, et pas grâce aux « médias traditionnels et corrompus » dont la foule agresse parfois les pigistes précaires, mais grâce aux Live Facebook des copains, qu’on partage en masse sur les réseaux.

Dès lors, on discute des  propositions du gouvernement. Elles ressemblent étrangement à de la bonne poudre aux yeux, la preuve, même le CAC40 s’y met. Alors, il n’en est rien, les ronds-points français restent occupés jusqu’à ce que les forces de l’ordre les évacuent. Et parfois les Gilets Jaunes y retournent. Le mouvement reste toujours aussi soutenu par la population. La foule continue de crier « Macron démission » et  les affrontements tournent en boucle sur les chaînes d’info en continu, sous fond de scandale d’état avec l’affaire Benalla et de début de guerre civile vénézuélienne.

Le mois de janvier sonna les deux mois de la contestation et l’heure du bilan : les victimes de la répression policière se comptent par centaines, avec parmi eux des mutilés à vie. Côté force de l’ordre, on a aussi des blessés, mais surtout c’est l’action sur le terrain qui pose problème : pour cause, les ordres d’en haut et l’incompétence des services voisins (notamment la BAC), parfois inhabitués à ce qu’on appelle le « maintien de l’ordre » (censé pousser à la désescalade et la gestion dans la calme des mobilisations à la base pacifiques). Les reproches fusent, politiques, médiatiques, civils… La viralité et l’émotionnel des réseaux sociaux diffusent la colère autour de l’armement policier. La polémique sur le LBD (lanceur de balle de défense) et les grenades désencerclantes renaît.

Le ministre de l’intérieur se terre dans le déni, voire le mensonge. Les LBD sont désormais dotés de « caméras-piétons », obligatoires, mais uniquement dans des « conditions normales » aux critères flous. Les demandes de suspension du LBD sont rejetées par le Conseil d’Etat. L’assemblée vient de voter une loi « anti-casseurs » liberticide pour les manifestants et intimidante pour le citoyen. Ce projet de loi est critiqué même par des proches du gouvernement et des membres de la majorité. Des entreprises licencient à cause de la perte économique due au mouvement, d’autres licencient leurs employés ayant affiché leur soutien au mouvement.

La CGT tente une nouvelle main tendue au Gilets Jaunes

Début février, la CGT ressort de l’obscurité et annonce une grève générale avec un soutien allant de la France Insoumise au NPA, espérant récupérer une partie des Gilets Jaunes. A Strasbourg, ce mardi, ça s’est traduit par une manifestation de 2h forte de 1500 personnes, de place de la République au centre administratif, avec plus d’une centaine de gilets jaunes, contents d’être là, “côte à côte avec la CGT, mais pas main dans la main”.

Pendant ce temps, Marine LePen et le Rassemblement National reviennent en force sur l’échiquier politique, dépassant LREM dans certains sondages pour les européennes. Macron paraît toujours aussi hautain et hors-sol. Il veut réguler la presse, et de plein de manières différentes. Une nouvelle hausse des prix sur différents produits de grande consommation rentre en application, nouveau coup dur pour le pouvoir d’achat et le « pouvoir vivre » défendu par les Gilets Jaunes. De nouveaux plans de licenciements sont prévus dans différents secteurs, dont certains services publics déjà au bord du gouffre. Et on n’a même pas parlé climat. Difficile aujourd’hui d’entrevoir une sortie par le haut. La plaie ouverte pendant cette crise des gilets jaunes (crise qui perdure) ne se refermera pas de sitôt, et risque de laisse une bien vilaine cicatrice… une de plus, une de trop ?

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