Deux mois après une rentrée universitaire sous haute tension à Strasbourg, une soixantaine de jeunes venus y étudier sont encore sans domicile fixe dans la capitale alsacienne. Courant septembre ils étaient plus de 1 000 étudiants, pour la plupart étrangers, à attendre une proposition de logement en résidence étudiante de la part du Crous. Aujourd’hui, si la situation des 60 jeunes toujours sans logement sera bientôt résolue (puisque le Crous attend la libération d’une cinquantaine de places sous un délai d’une semaine), plusieurs questions restent en suspens… En effet, si l’ampleur du problème était inédite cette année, la situation est loin d’être exceptionnelle comme le rappelle l’UNEF Strasbourg, l’organisation étudiante qui peine à héberger en urgence de nombreux jeunes laissés sur le carreau depuis deux ans…
Depuis la fin du mois d’août, l’UNEF Strasbourg partage presque tous les jours le même statut : « Nous cherchons, de toute urgence, une personne qui accepterait d’héberger un étudiant sans logement pour la nuit… » Mais que se passe-t-il donc à Strasbourg, pour qu’un si grand nombre de jeunes n’aient toujours pas trouvé de domicile une semaine avant la rentrée… Et deux mois après ?! « Ce qui se passe, c’est qu’entre 150 et 300 étudiants attendent encore une proposition du Crous au moment où nous parlons (ndlr : le 17 octobre). » Colin Jude est président de l’UNEF Strasbourg. Depuis deux ans, cette organisation étudiante se démène pour loger ces étudiants sans logement, de la fin du mois d’août jusqu’au début du mois de novembre cette fois. « Cette année, le nombre de demandes d’aide a vraiment explosé ! L’an dernier, on avait logé plusieurs étudiants chez des militants et des volontaires, et le Père Thomas, un prêtre d’une église proche du campus Esplanade, en avait aussi accueilli quelques-uns. Cette année, lorsqu’on l’a contacté pour faire face aux demandes, il hébergeait déjà 40 jeunes qui l’avaient sollicité directement ! »
Mais pourquoi c’est la hess pour autant d’étudiants ?
Pour obtenir une bourse comme un logement en résidence universitaire, les étudiants doivent faire la demande en ligne d’un dossier social étudiant (aussi connu sous l’acronyme DSE). Cette procédure administrative est à réaliser entre le 15 janvier et le 31 mai pour la rentrée qui suit… Soit avant que la plupart des étudiants aient connaissance de leurs résultats de l’année, et des options qui s’offrent à eux pour la suivante. Colin Jude, à la tête de l’UNEF Strasbourg, identifie ce timing comme étant à l’origine du problème : « Beaucoup de jeunes ne connaissent pas leur affectation avant le mois de juillet ou pire, le mois d’août… Les délais de réponse des universités ne leur laissent plus que quelques semaines voire quelques jours pour se loger ! En août, le parc privé est déjà saturé, et il ne reste plus que les options trop coûteuses. » À ce timing inopportun se surajouterait, pour les étudiants étrangers, un cruel manque d’informations… En France, ils sont accompagnés par l’agence Campus France. Colin accuse l’établissement de ne pas remplir sa fonction : « Ces jeunes sont victimes d’une gestion catastrophique souvent sous-traitée dans le privé. Entre les informations détenues par ces boîtes et celles défendues par les consulats, le processus peut s’étendre sur dix mois… » Résultat, lorsque le Crous de Strasbourg a ouvert une liste d’attente pour obtenir un logement en résidence étudiante le 20 août dernier, celle-ci est très rapidement montée à un millier d’étudiants inscrits… Et un grand nombre d’entre eux ont sollicité l’aide de l’UNEF Strasbourg pour ne pas dormir dehors, parfois sur le conseil du Crous : « Plusieurs étudiants étrangers ont débarqué à l’amicale, avec notre adresse griffonnée sur un papier par des représentants du Crous… On a aidé tous ceux qu’on a pu, mais ce n’est pas notre rôle de remplir leur mission ! » Contactée au début du mois de novembre, la responsable de la communication et de la culture du Crous de Strasbourg, Sarah Boos, faisait état d’une situation en passe d’être régularisée : « Aujourd’hui, 850 étudiants ont trouvé un logement au Crous ou dans le parc privé ! » De son côté, l’UNEF Strasbourg tempère ce bilan : « Beaucoup d’étudiants étrangers sont venus nous demander comment se faire rembourser leurs frais d’inscription afin de rentrer chez eux, faute de logement et d’économies. »
Et alors en deux ans, personne n’a trouvé de solution ?
Oui et non… Courant septembre, lors d’une rencontre avec la conseillère municipale en charge de la vie étudiante strasbourgeoise, et le président de l’office public du logement à Strasbourg, l’UNEF Strasbourg a proposé une solution déjà appliquée (avec succès) par le syndicat étudiant en région parisienne… « L’UNEF Paris a créé une entreprise d’économie sociale et solidaire qui, avec la complicité de plusieurs bailleurs sociaux, monte des colocations dans des appartements qu’ils ne parviennent pas à louer, car ils sont très grands et donc très coûteux. Les bailleurs ont accepté des conventions très souples qui permettent aux étudiants de quitter leur appartement dès qu’ils ont obtenu un logement en résidence universitaire… De ce fait, cette solution ne gêne pas les activités du Crous et elle évite la rue aux étudiants en attente. » Cette solution magique, la Ville de Strasbourg l’a validée… Mais pas le Crous ! D’après Colin Jude, le président de l’UNEF Strasbourg, le Crous aurait refusé pour une question… De rentabilité. « Les représentants nous ont répondu, je cite : “Ce n’est pas rentable.” Ils préfèrent avoir l’assurance d’une liste d’attente conséquente pour être certains de remplir les chambres libérées au deuxième semestre… Quitte à laisser des centaines de jeunes livrés à eux-mêmes. » Contacté à ce sujet le Crous évoque un autre motif à son refus : « Il n’a jamais été question de “garder” des étudiants pour le deuxième semestre ! Notre mission est d’apporter, au plus vite, une solution de logement pour l’ensemble des étudiants en difficulté. On ne s’oppose nullement à ce que des bailleurs sociaux hébergent des étudiants de notre liste d’attente – bien au contraire ! Cependant, la solution proposée par l’UNEF Strasbourg, consistant à ce que le Crous gère des logements du parc HLM à la place des bailleurs sociaux, sort de ses compétences et mettrait des mois à être applicable. » Des mois… C’est ce qu’il reste avant la prochaine rentrée universitaire.
Rendez-vous en septembre 2018 pour le match retour, en espérant que l’on compte moins de jeunes joueurs dans l’équipe sans logement…
J’avais proposé ma candidature à l’Unef durant le mois d’Aout et j’ai réitéré ma volonté d’héberger quelqu’un gratuitement . J’ai un appartement de 85 m² à Strasbourg que je partage avec un chat. Le problème est que je n’ai plus jamais eu de nouvelles de la part de l’Unef. Espérons que la prochaine fois l’Unef ai la gratitude de répondre .