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Rencontre avec Virginie Gallezot, céramiste cachée au coeur de la Krutenau

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Ils sont de plus en plus nombreux à prendre leur vie “en main” en choisissant de vivre de leur passion. Séduits par un désir de réaliser des pièces authentiques, faire rimer tradition, savoir faire et innovation, ils nous montrent que l’artisanat n’a pas dit son dernier mot ! Leurs supports ? De la créativité à foison, des mains en or et une bonne pincée de courage.

Pour ce premier “Ô les mains !” (rapport aux activités manuelles, vous l’avez ?) je vous emmène découvrir l’atelier et le travail de Virginie Gallezot, une talentueuse céramiste, tout près de chez vous…

C’est au coeur du quartier de la Krutenau que celui-ci se cache, à l’abri des regards, dans une charmante petite cour entourée de maisons à colombages. Virginie gare son bolide, c’est parti !

Ex-étudiante strasbourgeoise, Virginie tâtonne sur le campus. Passant d’une année de médecine à une année d’histoire de l’art, elle fait finalement des études en science éco et travaille plus de vingts ans pour des compagnies d’assurance. Mais les yeux de Virginie flânent et ses mains ont la bougeotte : « Je passais souvent devant l’atelier de l’Orange Bleu rue des juifs, j’étais très attirée par les disciplines artistiques ». Et je ne peux imaginer que cette idée ne lui trottait pas dans la tête depuis un moment…

En faisant un peu ma curieuse dans l’atelier je tombe sur une boite bien poussiéreuse qui trônait tout en haut d’une étagère… un jouet tour à potier pour enfant ! Difficile de ne pas voir un signe dans cette jolie boîte vintage.

 ► Une formation pas à pas

Au début c’est tout en continuant son activité professionnelle que Virginie s’initie aux techniques de la céramique. Elle prend des cours du soir et fait de nombreux stages un peu partout en France, notamment à l’École d’art de Douai. Plus tard, elle négocie une rupture conventionnelle, ce qui va lui permettre de s’y consacrer pleinement pendant une année. De l’apprentissage des émaux*, au tournage et à la fabrication de moules en plâtre, Virginie ne néglige aucun savoir-faire ! Au contraire elle souhaite tout connaitre, même les techniques qui ne lui serviront peut-être jamais. Ce qui lui plait dans la céramique ce sont les possibilités à l’infini : « La terre a été une révélation », me confie-t-elle.

Et hop ! Seulement deux ans plus tard Virginie se lance dans l’aventure. Une fois les gestes et techniques acquis, il est temps de trouver son style. Elle installe d’abord son premier atelier dans sa cave, à Strasbourg. Son dada ? « Faire de la céramique utilitaire plutôt que d’acheter chez Ikea des objets sans charme ». Tasse de thé à la main, c’est en rigolant que l’on fait l’apologie du goût nettement supérieur de notre breuvage dans une pièce artisanale. Et que l’on vienne nous contredire ! Parce qu’en matière de tasses, Virginie sait de quoi elle parle, et en fait une véritable collection : « Je suis très tasse ! Je n’en ai pas une qui n’est pas d’un céramiste. Même quand je ne faisais pas de céramique j’en achetais. ».

► Mais comment qu’on fait ?

Il existe plusieurs techniques en céramique, la plus connue d’entre elle étant le tournage. Virginie me raconte qu’il n’est pas rare que l’on associe son métier à la fameuse scène du film Ghost, dans laquelle Patrick Swayze et Demie Moore, mains dans la terre, dans une ambiance feutrée, donnent à la technique du tour un caractère très sensuel ! (Pour les curieux le lien se trouve à la fin de l’article).

Mais Virginie, elle, travaille principalement avec la technique du coulage, qui permet de faire des céramiques particulièrement fines et en série. Cette technique nécessite la fabrication de moules en plâtres creux que l’on vient remplir de « barbotine de coulage ». Le plâtre, qui est une matière poreuse, va lentement absorber l’eau contenue dans la barbotine, formant une couche plus ou moins épaisse en fonction du temps de pose. Vient ensuite l’étape du démoulage, puis du ponçage, qui rendra la surface toute douce.

Les pièces sont cuites une première fois et c’est entre les deux cuissons que l’on appose décors et les fameux émaux sur la surface.

Tout en sobriété et en finesse ses adorables tasses prennent forme au fil des étapes. C’est le plus souvent de petits animaux aux traits simplifiés, légèrement enfantins, qui viennent les décorer. Virginie fait en premier lieu des pré-dessins en s’inspirant notamment de photographies d’oiseaux : « J’essaie toujours de trouver des oiseaux qui ont des coiffures, de belles coiffes ». Elle les reproduit par la suite avec des crayons à céramique sur ses pièces. Elle utilise aussi la sérigraphie, par exemple, sa dernière collection de tasses à café est sérigraphiée en or.

Au delà des pièces utilitaires, elle réalise de petites broches en porcelaine. Et lorsque je lui demande où elle se voit dans quelques années, ses projets futurs, c’est sans hésiter qu’elle m’explique qu’elle souhaiterait apprendre de nouvelles techniques : « J’aimerais bien développer les bijoux » me répond-t-elle. L’an dernier, elle a fait une formation pour apprendre à souder et travailler le métal afin de devenir plus autonome dans leur fabrication, et pouvoir ainsi les confectionner de A à Z.

► Un métier aussi diversifié qu’en constant renouvellement

Mais la vie d’auto-entrepreneur n’est pas un long fleuve tranquille et loin s’en faut ! Car elle ne se limite pas qu’à la création. Bien qu’elle soit synonyme de liberté, cette vie implique une multitude de casquettes, et l’obligation de composer avec certains inconvénients : « les revenus incertains, les expositions qui coûtent cher, ne pas avoir de congés payés ».

Pour devenir artisan de sa vie professionnelle, il faut définitivement avoir un goût démesuré pour la débrouillardise ! Être capable de sans cesse se réinventer, nourrir son imagination et sa passion chaque jour. Être curieux de tout et de tous.

En effet, la passion est à la fois source de courage et donne le goût du partage : « Ce que je voulais c’était donner des cours » et c’est le cas depuis 2013. Plusieurs soirs de semaines ce sont de petits groupes joyeux de cinq personnes qui agitent leurs mains dans l’atelier ! Certains élèves, particulièrement assidus et attachés à la céramiste, la suivent depuis le début. Virginie s’adapte aux envies de ses petits apprentis, les guide dans leurs réalisations pas à pas, et renouvelle le matériel en fonction des envies de chacun.

► Internet, outil indispensable de l’artisan d’aujourd’hui

De plus, aujourd’hui il est difficile de percer sans avoir un sens inné de la communication. Les réseaux sociaux ont un rôle important pour la visibilité d’un artiste. De ce côté là, Virginie a dû se remonter les manches ! « J’ai eu un smartphone il y a six mois (…) je n’aurai pas Facebook si je n’avais pas une activité professionnelle ». Malgré ça, elle a réalisé elle-même son joli petit site internet et gère une boutique en ligne sur Etsy. Chapeau l’artiste !

Depuis le début de son aventure en 2011, elle a fait de nombreux salons et expositions tels Eunique à Karlsruhe. Par ailleurs, Virginie est membre de la FREEMA (Fédération régionale des métiers d’art d’Alsace), un regroupement d’artisans d’art, qui organise les salons strasbourgeois « OZ les métiers d’art », qui avait lieu rue de la comédie pendant le Marché de Noël (où vous l’avez peut-être aperçue ?), et « Résonance[s] ». Pour ce dernier, Virginie y participe depuis sa création il y a cinq ans.

Et ce n’est pas fini ! Si vous êtes curieux, vous pourrez bientôt retrouver Virginie et toutes ses merveilleuses créations au Marché des créateurs locaux Artis’Âme qui se tiendra Place d’Austerlitz les 6 et 7 mai, 3 et 4 juin et les 7 et 8 octobre 2017. Elle sera aussi présente aux Journées de la céramique à Fribourg les 24 et 25 juin 2017. Pour les chanceux qui envisagent de se rendre à Paris ces prochains temps, vous pourrez également retrouver ses créations pour la deuxième fois à Empreintes, l’incroyable Concept store des Ateliers d’Art de France, installé dans le quartier du Marais.

► Petites curiosités…

Le métier qui te faisait rêver enfant ?
« Dans mon éducation je n’imaginais pas que céramiste était un métier. Mais peut-être musicienne, ou quelque chose d’artistique ! »

Ton adresse strasbourgeoise préférée ?
« Aller au resto est mon passe-temps favori, j’adore manger ! J’aime bien aller à La Tour de Jade, un vietnamien avenue des Vosges, et le Café Bretelle, c’est mon petit rituel… »

Un artiste du coin que tu aimes tout particulièrement ?
« J’adore Juliette Vergne à Mulhouse ! Je vais faire un stage chez elle de teinture naturelle sur laine. »

Le/la céramiste de tes rêves ?
« Julia Huteau, Blandine Masure ou Laurent Dufour et ses figures animales. »

*Pluriel d’émail, oui comme les dents, ou les baignoires. Ce qui brille quoi !


Ghost
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Commentaires (8)

  1. Un grand moment pour Manon mais aussi pour nous.
    Cette visite narrée avec enthousiasme au cœur de la céramique est une séance de découverte de cet art avec, en prime, la pratique “comment fait-on ?” . Un accompagnement privilégié écrit avec précision par cette amoureuse de l’art et de la photo .
    Moment très intéressant dans l’instantané pour découvrir comment cet art naît entre les mains expertes et les conseils avisés d’une professionnelle.
    Je recommande cette adresse pour celles et ceux qui recherchent une écoute attentive à ce que l’on pourrait définir comme l’union d’une portraitiste et d’une artiste. A quand les prochaines découvertes littéraires de Manon ??????????

  2. Bravo c’est un plaisir de découvrir cette artiste et de lire cet article si passionnant. Merci pour ce délicieux moment.

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