Ce dimanche 11 novembre, on commémorait le centenaire de la fin de la Première guerre mondiale, cette « guerre qui devait mettre un terme à toutes les guerres ». Emmanuel Macron, Angela Merkel, le Donald… beaucoup de monde est venu en France pour se souvenir d’un passé tragique. Les commémorations étaient aussi présentes à Strasbourg, où personnalités locales, militaires ou encore simples passants se sont recueillis devant les monuments aux morts. Au réveil cependant, les strasbourgeois ont eu une petite surprise : un drapeau alsacien rouge et blanc flottant au sommet de la flèche de la Cathédrale, dans le ciel bleu de Strasbourg. Un acte qui n’a pas manqué de faire réagir.
Note de l’auteur : Je ne pense pas que, dans la vie, il y ait de bonnes ou de mauvaises situations. Juste des gens qui sont pour l’indépendance de la région Alsace et d’autres qui sont davantage partagés, ou même contre. Tout ça pour dire que cet article n’est pas orienté. Ça vaut tout de même le coup de le préciser.
Ce 11 novembre aurait dû être le jour de la commémoration de la Première guerre mondiale ; il en fût autrement. Sans évidemment voler la vedette à cette dernière, le drapeau Rot un Wiss flottant sur la flèche de la Cathédrale a remis sur le tapis la tendance indépendantiste alsacienne, peu satisfaite par les décisions tièdes du gouvernement quant au statut de l’Alsace. Petit rappel des faits de cette journée de dimanche finalement plus mouvementée qu’on ne l’aurait pensé.
Un drapeau qui flotte dans le ciel, un moyen de revendication
Clairement, ce drapeau alsacien accroché à la flèche de la Cathédrale est une revendication qu’on peut qualifier de politique. La date n’est évidemment pas prise au hasard ; la Première Guerre mondiale marque en effet une période douloureuse pour l’Alsace-Moselle, encore sous contrôle allemand depuis la défaite française face à la Prusse en 1870 et jusqu’en 1918.
Bien entendu, la place des Alsaciens et des Lorrains au sein de l’armée allemande ne fût pas aisée – euphémisme de l’année. En tout et pour tout, 380 000 Alsaciens et Lorrains ont été mobilisés au sein de l’armée allemande. Certains combattirent pour l’Allemagne – alors même que la langue française fût interdite en Alsace-Lorraine – d’autres s’engagèrent dans l’armée française. Un statut toujours difficile et particulier, pas allemand, mais pas français non plus.
C’est cette dualité qui fait la particularité de l’Alsace, et la Première Guerre mondiale n’a fait que renforcer ce sentiment de n’appartenir à personne. Par ailleurs, ce statut quelque peu ambigu de l’Alsace-Lorraine fait que les monuments aux morts arborent l’épitaphe « À nos morts », en lieu et place de « Morts pour la France ».
Un drapeau qui a provoqué de multiples réactions
Quand les strasbourgeois se sont rendus compte de ce drapeau qui flottait dans le ciel bleu de ce dimanche matin, les réactions n’ont pas tardé à arriver. La plus « importante » est celle d’Alain Fontanel, qui a fustigé l’acte en question. Il faut dire que ce dernier a été réalisé sans autorisation de qui que ce soit, donc est par définition illégal. En outre, Alain Fontanel insiste sur le fait que cette journée n’est pas une journée qu’il faut instrumentaliser, mais une où il faut se souvenir et rendre hommage aux dix millions de personnes qui ont trouvé la mort lors de cette guerre. Qui n’a duré que quatre (très longues) années…
Par ailleurs, il ajoute que la semaine dernière, c’était le drapeau européen qui flottait au-dessus de la Cathédrale – un drapeau qui n’a pas que des admirateurs –, alors que le 23 novembre, ce sera le drapeau français, en hommage au serment de Koufra du 2 mars 1941, qui sera hissé au-dessus de Môman.
Mais tout ce post Facebook, que vous pouvez retrouver ici, a lui aussi fait réagir. Rien qu’en lisant les commentaires, on se rend compte des différents points de vue quant à l’acte d’accrocher le drapeau rouge et blanc. Certains fustigent l’Europe et la France, d’autres rappellent la place particulière de l’Alsace dans l’Histoire, alors que certains critiquent le geste.
Le drapeau a été très vite retiré des yeux des Strasbourgeois, puisque dès 10h, plus de drapeau rouge et blanc. La Fondation de l’œuvre de Notre-Dame, qui s’occupe de l’entretien et de la conservation de la Cathédrale s’en est occupé, et chacun a pu vaquer à ses occupations dominicales. Presque comme si de rien n’était.
Alors finalement, qu’est-ce qu’il reste de cet événement ? Un drapeau alsacien qui flotte dans le ciel de Strasbourg, au-dessus de son monument le plus symbolique, le jour de la commémoration d’une guerre qui a marqué l’Alsace dans sa chair. L’acte était illégal, peut très bien être accusé d’instrumentalisation, mais démontre néanmoins qu’il y a des gens qui luttent pour faire valoir la place de l’Alsace en France et dans la Première Guerre mondiale. Pour que l’on n’oublie pas ce qui s’est passé de 1870 à 1918. Et au vu de la résonance médiatique nationale qu’a eu ce drapeau qui flotte, on peut dire que le coup est réussi.
Le 11 novembre 2018, pendant quelques heures, le drapeau historique de l’Alsace a flotté au point le plus haut dans le ciel strasbourgeois. Quel magnifique hommage à nos aïeux alsaciens sacrifiés durant des siècles sur l’autel de la rivalité entre l’Allemagne et la France !
Mais « c’est dangereux de faire ça », et bien oui ; servir une cause fondamentale avec audace et détermination est souvent dangereux.
Évidemment « c’est illégal », alors que nier l’existence de l’Alsace et de son peuple est au contraire parfaitement légal en France. Nos représentant élus le font d’ailleurs jusqu’au sommet de l’État. Alors lorsque la République ne se rend pas compte de ses dérives, c’est bien au Peuple de les lui rappeler, sinon qui d’autre le ferait !?
Bien sûr certains trouvent cela « extrémiste », mais vouloir être reconnu et respecté en tant que peuple, avec une culture spécifique, une Histoire bien plus complexe que celle enseignée officiellement dans les écoles, vouloir se comprendre sois-même et être compris des autres, refuser de n’être qu’un numéro pour être un Être humain à part entière, et bien non, ça n’est en aucun cas de l’extrémisme!
En revanche cela dérange énormément les esprits centralisateurs qui sont aux pouvoirs en France et qui s’imaginent que cette dernière n’est que la juxtaposition de colonies parisianisées.
Or, si la France n’est pas ou ne devient pas davantage que la somme de ses parties, si notre nation continue d’écraser ses régions et ses peuples historiques pour avoir la sensation d’exister, si notre pays ne fait que parler d’Europe sans jamais vouloir la faire réellement par peur de disparaître, alors toutes les victimes de tous les conflits qui ont eu lieu sur ce continent et au-delà resteront vaines à jamais.
Est-ce si difficile à comprendre ?
Vive l’Alsace, vive la France, vive l’Europe !