À Strasbourg comme en France, le phénomène des « dark kitchens » ne cesse de prendre de l’essor. De plus en plus de ces cuisines fantômes sans service si salle peuplent les applications de livraisons, dont certaines poussent le concept sans doute bien trop loin. Exemple avec une adresse située 20A rue des Glacières, qui propose pas moins de 18 adresses, pas toutes impeccables au vu des notes.
Dopées par la crise sanitaire d’il y a 4 ans, la livraison s’est durablement installée dans les habitudes des Français(es), comme des Strasbourgeois(es). En 2022, plus d’un Français(e) sur deux s’était fait livrer un repas dans l’année. On estime le chiffre d’affaires de la livraison à 7 milliards d’euros et celui-ci devrait même atteindre 9,2 milliards en 2026.
Parallèlement à l’essor de la livraison, le phénomène des « dark kitchens » s’est lui aussi durablement installé sur les plateformes de livraisons ubérisées. On décompte près de 1 500 cuisines fantômes sur les plateformes selon les derniers chiffres disponibles, probablement très sous-estimé. On vous parlait déjà de leur implantation à Strasbourg il y a deux ans et demi.
Mais forcément, avec la croissance de la livraison en ligne et les perspectives économiques offertes par les dark kitchens (moins de frais, une gestion simplifiée, possibilité de proposer une large gamme de produits et de concepts en même temps…), les dérives et abus commencent à fleurir sur les applications de livraison. Et alors que des bien connues se sont implantées dans le paysage (Taster, celles de Deliveroo), d’autres fleurissent dans l’ombre.
À Strasbourg, il n’y a sans doute pas meilleur exemple que la supérette unique du 20A rue des Glacières, dans le quartier de la Petite France, ironiquement située en face des Haras, fleuron de la gastronomie alsacienne. Tous les jours, on pourrait passer devant la supérette sans la remarquer, et sans jamais imaginer qu’elle renferme au moins 18 restaurants.
20A rue des Glacières : une supérette unique, pour 18 concepts de restaurants sur les applis !
Mooli Japan Kitchen, Tata Chick, Smashy Pita, Wings Box, Chichiko, Clasico Argentino Empanadas Express ou JFK Burgers… Il est probable que vous ayez déjà vu ces adresses passer sur une appli. Les photos sont toujours les mêmes, avec un gros plan sur les produits, soit pris de face soit pris de haut. Elles proposent toujours la même offre pour attirer l’oeil : 1 produit acheté = 1 offert. Et généralement, des jeux de mots sur le nom de leurs produits, Orgasmeat remportant la palme du mauvais goût sur le sujet.
La supérette unique du 20A rue des Glacières propose ainsi du smash burger, des tacos, des empanadas, des ailes de poulet, de la cuisine japonaise et des burgers classiques. Le tout, toujours cuisinés au même endroit. Un vrai tour du monde culinaire finalement, en ne quittant jamais la Petite France. Même si sur ce sujet, parler de culinaire serait peut-être présomptueux.
Car le vrai souci reste dans la qualité des produits proposés. Si l’on se fie aux notes sur les applis, elles sont presque toutes sans appel : si Bopy Burgers ou Fat Smash s’en sortent relativement bien avec 4.3 et 4.2 [sachant que généralement, on peut enlever quelques dixièmes à une note sur les applis par rapport à Google, ndlr], 13 adresses ont 4 étoiles ou moins, accaparant ainsi les premières places des restaurants les moins bien notés de Strasbourg. De quoi rebuter les estomacs les plus solides, qui ont même survécu au feu Morfal.
Il ne semble pas non plus y avoir de réels efforts de modération des plateformes ubérisées sur la question. Des adresses aux notes catastrophiques continuent en effet d’être mises en avant parce qu’elles proposent des offres type 1 produit acheté = 1 offert. Et il n’est jamais indiqué que le restaurant dans lequel on peut commander est, ou non, une dark kitchen.
Comment repérer si le restaurant dans lequel on commande est une dark kitchen ?
Car si l’adresse du 20A rue des Glacières est symbolique de la dérive du phénomène des dark kitchens, ce n’est évidemment pas la seule à Strasbourg. Alors comment savoir si vous avez affaire à une dark kitchen ?
Pour être sûr(e) de ne pas vous faire avoir, quand vous arrivez sur la page d’un restaurant, cliquez toujours sur l’onglet « Informations ». Vous verrez ensuite l’adresse et vous pourrez aller voir la carte. Cela vous donnera déjà un premier indice pour savoir si le nom du restaurant existe également en physique, et pas seulement sur les applis ubérisées.
À force, vous commencerez également à reconnaître plusieurs fois la même adresses, comme le 20A rue des Glacières, mais aussi 101 route de la Wantzenau ou 5 place du Vieux-Marché-aux-Vins. Car il est toujours bon de savoir où est-ce que l’on envoie notre argent, surtout pour éviter les maux d’estomac quelques minutes après.