Comment est fabriqué le miel et à quoi ressemble le quotidien de celles et ceux qui contribuent à nous régaler dès le réveil ? Roland Saenger, apiculteur illkirchois et fondateur de l’entreprise familiale Le Rucher de l’Ill, nous a accueillis dans sa maison accolée à la miellerie pour nous parler de sa vision du métier et de ses valeurs éthiques et locales.
Roland Saenger a commencé son métier d’apiculteur professionnel il y a 50 ans environ. En 1976, il crée Le Rucher de l’Ill, son exploitation située à Illkirch-Graffenstaden (à 15 minutes de Strasbourg), avec son épouse Nicole – malheureusement décédée il y a deux ans. En 2012, leur fils Maxime se joint à eux. Depuis, son père l’aide au quotidien et souhaite lui transmettre tout son savoir afin de perpétuer cette passion.
Dans l’entrée de leur grande maison, on retrouve leur petit magasin de miel IGP Alsace (signe de qualité). Au total, sept variétés : miel de châtaignier, d’acacia, de fleurs et de fleurs-crémeux, de tilleul, de montagne, de sapin. Et ce n’est pas tout : l’exploitation famille produit également de la gelée royale, du pollen, et des bonbons à la propolis.
Pour en arriver à ce résultat, on s’en doute, un travail laborieux est effectué en amont. Roland et Maxime sont maîtres de tous les maillons de la production : de l’élevage des reines d’abeilles jusqu’à la récolte et au conditionnement des différents produits de la ruche. Pour comprendre ce métier, on vous embarque avec nous dans l’envers du décor.
Dure saison pour les apiculteurs/rices
Pas de temps mort pour les éleveurs/ses d’abeilles qui travaillent d’arrache-pied toute l’année. Néanmoins, les mois de mai, juin et juillet sont des moments forts, ceux de ladite haute saison. D’autant plus que les transhumances (déplacement des ruches d’un lieu à l’autre pour suivre la floraison) ont tout juste commencé.
Le métier d’apiculteur/rice nécessite un énorme investissement en temps, alliant technique et observation de la nature. Surtout quand on a plus de 500 ruches, comme dans cette entreprise familiale.
Pourquoi autant de ruches ? Car en tant qu’apiculteurs professionnels, le père et le fils sont obligés d’en avoir un certain nombre pour vivre de leur profession.
Autre contrainte du métier ? La météo ! En effet, ils ne peuvent pas se permettre d’attendre les journées de beau temps pour aller sur le terrain, car ils ont aussi des « ateliers séquencés » (le mardi et le jeudi, c’est atelier de gelée royale par exemple). Il faut donc s’y rendre coûte que coûte, même par temps de pluie. Certaines ruches sont à l’abri mais beaucoup sont à l’extérieur dans la nature. Et quand celle-ci se déchaîne, comme cette année, le travail se complique. « C’est de la folie, on rentre trempés en ce moment ! », confie Roland.
Des amoureux de la nature
« Quand les gens parlent d’apiculture, ils ont toujours l’image de l’apiculteur qui travaille aux ruches. Il n’y a pas que la récolte du miel : ça, c’est la finalité. » Avant, il y a toute la partie concernant l’élevage, garantir l’hygiène des ruches, etc.
Pour ce père et son fils qui élèvent les reines eux-mêmes, l’élevage est la plus belle partie du travail. « La passion des abeilles, c’est une passion de toute une vie », explique fièrement Roland. Ils viennent tout juste de démarrer deux élevages de reines : « Pour faire un miel, il faut que l’abeille soit très populeuse au moment de cette miellée. Il faut préparer les ruches en fonction de ce qu’on veut faire. »
D’ailleurs, pour offrir la place nécessaire à chaque abeille, Roland et Maxime disposent de beaucoup d’hectares de terrains. Ils prennent le parti pris de laisser pousser l’herbe très haut pour la biodiversité, et laissent les fleurs s’égrener. « Aujourd’hui, quand vous regardez dans les prés, tout est déjà fauché… » Contrairement à il y a 40 ans selon lui, « quand il y avait encore des milliers de fleurs de prés ».
Aujourd’hui, les prairies ressemblent davantage à des oasis vertes. Tout est tellement mécanisé en agriculture que les recoins fleuris (notamment les pâquerettes) se font de plus en plus rares, au plus grand désespoir de Roland.
Des valeurs éthiques et locales
L’entreprise d’Illkirch a pour fil conducteur le respect de l’abeille et de l’environnement. Roland et Maxime travaillent avec des abeilles locales, « celles que la nature leur a donné il y a déjà des millions d’années », et ne vont pas chercher ailleurs ce qu’on trouve ici.
Aujourd’hui, comme dans tout domaine agricole, tout s’achète : autant les ruches que les abeilles. Selon Roland, ce n’est pas éthique. « Quand vous achetez des abeilles, elles ne sont adaptées ni à notre climat, ni à nos plantes, ni à nos maladies. Idem pour les ruches : elles ne sont pas fabriquées avec le bois d’ici, ça vient des pays de l’Est, voire de Chine », explique-t-il.
Les ruches de Roland et Maxime, elles, sont fabriquées avec du bois qui a poussé en Alsace – pratique rare aujourd’hui.
Pour fabriquer eux-mêmes un toit aux abeilles, ils disposent même d’une petite menuiserie à domicile.
Un matériel onéreux et beaucoup de technique
Lorsqu’on tartine son pain de miel, on est bien loin d’imaginer tout ce qu’il a fallu dépenser en amont pour en arriver là. Les équipements des apiculteurs/rices professionnel(le)s sont nombreux et coûteux : plusieurs terrains avec plusieurs ruches, des véhicules tout-terrain pour accéder aux chemins forestiers et de montagne, du matériel de stockage, des chambres froides, et surtout, une machine apicole.
Après la menuiserie, on suit Roland jusqu’à l’atelier : des pots de miel jonchent le sol. Lorsqu’il ouvre la porte de la miellerie, l’odeur du savoureux nectar embaume instantanément nos narines. Devant nous, une énorme machine apicole en inox, « rare en France et même en Europe », nous confie-t-il. Grâce à elle, en une journée, Maxime peut faire jusqu’à trois tonnes de miel.
Dans cette miellerie, beaucoup d’appareils jusqu’alors inconnus pour nous : entre autres, un séchoir à pollen, un réfractomètre pour mesurer l’humidité du miel (qui, pour être bon ne doit pas dépasser les 18% d’eau), un fondoir à cire, un déboxeur qui permet de pousser les cadres, un capteur de niveau pour le miel, des pompes à miel, des fûts d’une tonne…
« En fin de saison, il faut une semaine pour nettoyer l’intégralité des machines », explique Roland.
Si, suite à cet article, vous mourrez d’envie de goûter au délicieux nectar confectionné par Roland et son fils, ou si vous êtes curieux/ses d’en savoir plus sur la confection du miel, on vous invite chaudement à aller rencontrer l’équipe directement dans leur boutique à Illkirch-Graffenstaden (16A rue Vincent-Scotto). Une vraie belle découverte !
Article très intéressant et très instructif! Merci!!
Je prends mon miel depuis 2 ans la bas.
Non seulement d’être très sympas, leur différentes catégories de miel sont juste DELICIEUX.
Allez y les yeux fermés.