Ce samedi 8 juillet au matin, à Strasbourg, ce sont quelques centaines de personnes qui ont répondu à l’appel des partis, syndicats et associations de gauche. Onze jours après la mort de Nahel, et une semaine après les violences urbaines qui ont suivi, les participant(e)s ont appelé à la justice sociale et réaffirmé leur opposition aux violences policières.
« Justice pour Nahel », « Pas de justice, pas de paix » : tels étaient les slogans repris en coeur par les manifestant(e)s strasbourgeois(es), réuni(e)s place de la République à partir de 10h.
Défilant jusqu’à la place de la Bourse, tous et toutes avaient une lecture très politique de cet événement : « Il y a à la fois des problèmes dans la police et dans la gestion des quartiers, mais les deux dépendent de l’État », déclare Cédric, 33 ans.
« Il faut des réformes de fond pour la police et ses techniques. Sinon de tels événements vont se reproduire, il y aura toujours plus de répression mais les problèmes sociaux seront encore là », continue Fabienne, 63 ans.
« Il ne peut pas y avoir d’apaisement sans réforme en profondeur de la police »
Le cortège a défilé pendant une heure et demie, encadré par un dispositif policier plutôt léger, esquivant la Grande Île initialement prévue mais finalement interdite par préfecture. En chemin, chacun(e) a en tête les récents événements et leurs conséquences.
Sur la question des 300 voitures brûlées dans le Bas-Rhin, ou encore des écoles attaquées, personne n’approuve. Mais ils sont nombreux à mettre cela en balance avec la violence étatique, qu’elle passe par la police ou bien par la surdité du gouvernement face aux revendications populaires :
« Nous les syndicats, nous nous sommes unis pendant la réforme des retraites, nous avons été confrontés à la brutalité d’Emmanuel Macron, indique Esther Bauer, du syndicat Solidaires. Sur ça comme sur les récents événements, il ne peut pas y avoir d’apaisement sans justice sociale, et sans réforme en profondeur de la police. »
Aux côtés des syndicats et associations, des élus politiques étaient également présents au devant de la manifestation, dont les deux députés locaux de la NUPES, Emmanuel Fernandes et Sandra Regol : « On ne peut pas continuer à avoir une partie de la population qui a peur de la police, le droit à la sûreté est garanti par la loi », s’exclame la députée écologiste.
« Même l’ONU dit qu’il y a un problème de racisme systémique dans notre police, abonde son collègue insoumis. Donc ça suffit ce discours qu’on entend trop souvent, qui considère que le racisme est une opinion, répandue dans la société et donc dans la police. Non, le racisme c’est un délit ! »
Des passants aux avis plus mitigés
En ce samedi matin, de nombreux curieux observent les drapeaux et écoutent les slogans en passant, sans savoir qu’une manifestation était prévue.
Fabrice, restaurateur rue des Orphelins, est sorti au cas où, pour surveiller sa terrasse : « Ils nous l’ont retournée la semaine dernière, mais là ça a l’air assez calme. » Interrogé sur le climat politique et les récents événements, il ironise : « Là pour les 100 jours d’apaisement [décrétés par E.Macron], je crois que c’est raté. De toute façon il y a un ras-le-bol général, sur les retraites par exemple ils sont passés en force, les gens ont l’impression de ne pas être écoutés. »
Croisée quai des Bateliers, Angélique, elle, ne voit pas le rapport entre la mort de Nahel et les dégradations infligées aux magasins Vuitton, Lacoste ou Apple : « Il y a d’autres moyens de se faire entendre que piller ces pauvres commerçants, déjà bien éprouvés par le Covid. Et en ce qui concerne la police, comme les pompiers, on ne peut pas les applaudir pour le Bataclan ou le Covid, et les caillasser ensuite. »
Le cortège s’est également terminé dans le calme, place de la Bourse, avec une prise des paroles des différentes organisations présentes. Et si toutes sont tombées d’accord sur la volonté de continuer la mobilisation et de ne pas laisser tomber les jeunes des quartiers populaires, ceux-ci semblaient cependant être les grands absents de cette marche.
Géraud Bouvrot