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« Strasbourg, Schilik, c’est mort, presque tout a disparu » : avec les grands projets de rénovation, l’Urbex évolue

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L’urbex, contraction d’exploration urbaine, consiste à s’introduire dans des lieux laissés à l’abandon, cachés, difficiles d’accès et souvent interdits. Anciens bunkers, hôpitaux laissés en friche, industries, châteaux en ruine, vieux manoirs… Si certains sont tombés amoureux de l’urbex par le biais de la photographie, de plus en plus d’autres se laissent aujourd’hui tenter, attirés par le frisson et l’envie de vivre une expérience, ou parfois même en espérant se faire un nom sur Youtube ou TikTok. En Alsace comme partout, l’urbex a bien évolué et séduit chaque année de plus en plus de curieux, mais avec quel impact sur la pratique ? On est allé discuter avec El Cheeba, une pratiquante alsacienne depuis plus de dix ans.



© El Cheeba



Ces dernières années à Strasbourg, on a vu plusieurs lieux bien connus des pratiquants de l’urbex disparaitre. Tu peux m’en parler un peu ?

C’est vrai qu’on compte de moins en moins de lieux qu’on pourrait qualifier d’emblématiques. Strasbourg, Schilik, c’est mort, presque tout a disparu. Il y a de plus en plus d’habitants, il faut des écoles, des parkings, des immeubles, donc ça a construit partout. Il y avait la fameuse maison du bâtiment, avec une vue de ouf sur toute la ville, mais je n’ai jamais pu la faire car quand je voulais y aller c’était avant la fin, il y avait des drogués et des gens chelou qui squattaient. Il y avait le bâtiment Chrysler à l’entrée de la place de Haguenau, l’imprimerie ISTRA à Schiltigheim, la brasserie Fisher, Kronenbourg ou encore l’ancien Relais de la Poste… Tous ces lieux ne sont plus praticables.


Où vont les pratiquants d’urbex en Alsace à présent ?

Maintenant que les grosses industries abandonnées se font rares, l’urbex s’oriente d’avantage vers les maisons, manoirs et châteaux dans la région, il faut se rabattre sur ce qu’il reste. C’est malheureux, mais il y a aussi beaucoup de lieux qui ont fermé à cause du Covid, certains bistrots de village, des discothèques, les établissements victimes de la crise qui se retrouvent soudainement à l’abandon.



Tu fais de l’urbex depuis un bail. Comment tu as commencé ? Quelle approche as-tu développé avec la pratique ?

Mon père travaillait sur les chantiers et m’emmenait souvent avec lui. Un jour je l’accompagnais sur le chantier du Conseil de l’Europe. J’ai adoré cette atmosphère, voir ces squelettes d’acier devenir petit à petit des édifices. Ça a toujours été l’exploration que j’aime le plus dans l’urbex : le fait de couper de tout, de ta semaine, tu es seule avec toi-même, dans des lieux de plusieurs milliers de mètres carrés vides, c’est un moment privilégié. Mes lieux favoris, c’est les industries. Avec les maisons j’ai toujours eu cette impression de violer les lieux, de pénétrer dans la vie privée, dans le sanctuaire de quelqu’un.


Qu’est ce qui a changé dans la pratique aujourd’hui ?

Disons que c’est devenu beaucoup plus populaire, et que cela a des répercussions. Il y a de plus en plus de jeunes qui font des vidéos d’urbex en espérant se faire un nom sur les réseaux sociaux, Youtube ou Tiktok. Seulement, ils n’ont pas toujours les bons réflexes de discrétion, ils oublient des détails apparents sur leurs vidéos, des panneaux, des indices flagrants, donc il suffit à n’importe qui d’être un brin attentif pour trouver l’emplacement du lieu. Et puis beaucoup de personnes échangent entre elles, se balancent les spots. Le souci c’est que ça engendre souvent de nombreuses visites, dont certaines se concluent par des vols, de la destruction voire des incendies, particulièrement en Alsace.



Comment tu procèdes pour trouver tes spots ?

Normalement tu n’es pas censé échanger tes découvertes avec les autres, disons que c’est l’une des règles du jeu. Moi j’exerce en solo, il y a tout un travail d’enquête et de recherche qui fait partie du truc pour moi. Tu cherches sur Google Maps, tu te renseignes sur le passé industriel, tu épluches les archives, tu regardes les liquidations dans les journaux. Quand des gens publient des photos, tu essaies d’y trouver des indices.


Ça t’arrives de te retrouver dans des lieux ou le temps semble s’être arrêté soudainement ?

Complètement ! Ça fait partie de la magie de l’urbex. Quand c’est des usines qui ferment après des liquidations et que les gens qui y travaillent apprennent qu’ils vont perdre leur emplois, toute leur vie s’écroule. Alors ils laissent tout en place, leurs effets personnels, les dossiers des RH, et ils disparaissent. La première fois où je me suis introduite dans l’imprimerie ISTRA (Schiltigheim), il y avait encore les dossiers confidentiels de patients, des radios, des dossiers médicaux. Un jour, dans une baraque j’ai aussi trouvé des photos de jeunes handballeurs…c’était un peu glauque. 



Il y a une visite de lieu qui t’a plus marquée que les autres ?

La tour de refroidissement à Charleroi ! T’en vois jamais par ici, c’était impressionnant de voir ça en vrai et de l’intérieur. Ce qui joue beaucoup aussi, c’est l’excitation de rentrer dans une enceinte interdite. Un jour, un mec m’a contactée pour pénétrer dans la raffinerie de Reichstett, il était 8 h du mat il faisait -10, c’était un délire. L’urbex c’est ça aussi, s’offrir l’opportunité de visiter des lieux que tu n’aurais jamais pu visiter autrement, moi ça me fait du bien, c’est mon échappatoire. 


Ton “job” de passionnée ne s’arrête pas à pénétrer dans des bâtiments puis d’en sortir. Qu’est ce que tu fais après ?

Non, c’est vrai. Je fais un travail méticuleux de tri et d’archivage de toutes mes photos depuis mes premières années de pratique. Sur mon site, on peut retrouver presque toutes mes visites, en Alsace mais aussi ailleurs dans le monde. C’est comme un travail de mémoire. Souvent, il y a même des endroits où je retourne deux, trois fois pour suivre l’évolution. J’essaie de commenter un maximum mes photos, de raconter quelque chose sur les endroits que j’ai visités une fois qu’ils ont été démolis, de garder une trace du passé. Comme mon site est bien référencé, j’ai parfois même des personnes âgées qui tombent sur mes articles et qui m’écrivent pour me dire qu’ils ont bossé à ISTRA dans les années 70 ou à Fisher, et qu’ils peuvent m’envoyer des photos. Les gens m’envoient parfois des documents ou des fichiers, et m’apprennent eux-mêmes des choses que je ne savais pas sur certains endroits.

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Commentaires (1)

  1. Schiltigheim a vraiment changer du tout au tout . Je suis nee en 1963 dans cette commune . J ai vecu dans cette commune pendant 15 ans , apres cela des maisons et des immeubles ainsi que des salles de ports on pousser comme des champignons . Pratiquement plus aucun endroit dans cette commune , il ni a de manifique parc avec des arbres ou les enfants puissent jouer sans avoir de la pollution . Ces bien dommage , car moi j ai connu cette ville qui etait manifique , tres fleurie , avec des jardins , des champs , on se baigner dans le rhin car l eau n etait pas si polluer et si sale , des espaces avec des arbres fruitiers , notre mere et grand mère laver encore le linge dans les lavoirs . Tout a etait raser pour mettre du béton et encore du béton. Schiltigheim et devenu comme strasbourg que du béton. Sa na plus rien na voir avec mon enfance . Bien triste tout cela .

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