La crise sanitaire dans laquelle le pays s’est engouffré en mars 2020 a contraint de nombreuses entreprises à revoir leur fonctionnement. Des milliers de salariés ont alors fait entrer leur travail à la maison, revoyant ainsi leur organisation ainsi que leurs relations professionnelles. Et si certains ont pu souffrir d’isolement et mal vivre cette situation, d’autres y ont trouvé un nouvel équilibre. Au point d’appréhender un retour au sein de leur entreprise, comme en témoignent trois Strasbourgeois et Strasbourgeoises.
« Si on me demande de revenir en présentiel, je partirai, sans même me retourner. Ma décision est prise ». Pour Julie*, employée dans un service client et en télétravail depuis le début de la crise sanitaire, impossible de faire machine arrière. « J’ai un travail que je peux faire intégralement à distance et c’est quelque chose que j’ai trop apprécié pour revenir en présentiel ».
Il faut dire que la jeune femme évoluait dans une équipe aux relations tendues. « Ça a vraiment été un renouveau pour moi de découvrir cette façon de travailler. » Même si le télétravail a pu, lui-même, générer quelques tensions. « En juillet, l’année dernière, on nous a dit que ce serait bien de revenir un peu, pour que les collègues qui sont obligés d’être présents, aux expéditions par exemple, voient qu’on travaille aussi, que ça leur ferait du bien de nous voir à la machine à café. Alors que chez moi, je fais les mêmes horaires. »
C’est justement, aussi, cette pression des uns sur les autres que fuit Julie. « Dans mon contrat, j’ai normalement, une certaine flexibilité horaire. Mais il y a parfois un espèce de flicage de la part de personnes mal intentionnées. Tu te sens obligée de traîner alors que tu as terminé ton travail, pour ne pas qu’on dise que tu es partie plus tôt. En télétravail on a beaucoup plus de liberté. » Une liberté d’organisation dont ne pourrait plus se passer la Strasbourgeoise. « On a aussi plus de temps de loisirs, puisqu’on a 8 à 10h de trajet en moins par semaine. Par contre quand je travaille je suis dans une dynamique plus productive. Je suis plus focalisée sur ma tâche, à partir du moment où j’allume mon ordinateur jusqu’au moment où je me déconnecte. Alors qu’au travail on arrive, on fait le tour, on va prendre un café, on vient te voir… », explique Julie qui comprend malgré tout que le télétravail ait pu être difficile pour d’autres.
“J’appréhende le moment où il va falloir y retourner”
La sensation d’être plus productif en travaillant à son rythme, c’est aussi le sentiment partagé par Olivier*, un fonctionnaire strasbourgeois de 43 ans. « Le télétravail m’a tout de suite plu, parce que je travaille quand je veux. » En télétravail, Olivier se doit d’être connecté et disponible de 9h à 11h, puis de 14h à 16h. Le reste de son temps, il le répartit comme bon lui semble, tant que le travail est réalisé. « Je trouve qu’au bureau on a souvent une baisse de rentabilité en début d’après-midi. Là je peux faire une petite sieste, ou aller à la piscine par exemple. En choisissant mes horaires de travail, je suis plus efficace. » Un constat qu’Olivier ne semble pas être le seul à dresser : une étude de l’Institut Sapiens publiée en mars 2021 révèle que le télétravail aurait permis d’augmenter la productivité des salariés de 22%.
Autre avantage pour le père de famille : la possibilité d’accorder plus de temps aux siens. « En télétravail, je travaille tôt le matin ou tard le soir, par exemple quand les enfants dorment et un peu moins en milieu de journée. » Résultat : « j’appréhende le moment où il va falloir y retourner en septembre faire sept heures d’affilé, sur des horaires définis », confie Olivier, qui a fait une demande pour maintenir trois jours de télétravail par semaine, de manière durable.
Même du point de vue de la communication entre collègues, le télétravail présenterait des avantages selon Olivier. « Au bureau on est chacun dans un bureau individuel, alors qu’avec le télétravail il y a des réunions d’équipe en visio. Avant on ne se retrouvait qu’avec les personnes avec qui on avait des affinités mais là, on parle avec des personnes avec qui on n’échangeait pas forcément avant. »
“Je vais devoir refaire des efforts vestimentaires et de sociabilisation“
Albertine*, qui travaille elle aussi dans un service client, n’a pas adhéré immédiatement au principe du télétravail. « Je suis arrivée dans mon entreprise en septembre 2020 et je suis passée en télétravail à la fin du mois d’octobre. Au début ça a été vraiment dure parce que je n’étais pas totalement formée, j’avais du mal à obtenir des réponses à mes questions, surtout qu’il n’y avait pas vraiment d’esprit d’équipe. »
Travailler en présentiel a aussi des avantages qu’on ne retrouve pas à la maison constate Albertine : plus de restaurant d’entreprise, moins d’équipement informatique, une chaise moins confortable, pas de climatisation. Pourtant, la Strasbourgeoise a rapidement découvert de nombreuses compensations au travail depuis chez elle. « Au début, j’avais l’impression de devoir être devant mon ordinateur aux heures demandées, alors que mon travail est très cyclique et par moment il n’y a rien à faire. J’attendais devant mon ordi et je m’ennuyais. Après j’ai compris que je pouvais faire ce que je voulais, que personne ne me voyait. Je me suis mise à faire la cuisine, à m’occuper de mon appartement, à faire des activités manuelles ou à mettre la télé en fond. Mais dès qu’un mail ou une tâche arrivait, je faisais ce que j’avais à faire. »
Une flexibilité à laquelle sont venus s’ajouter toute une série d’atouts : « J’ai, normalement 50 minutes de trajet, là je peux me lever à l’heure où je commence, prendre mon petit-déjeuner devant l’ordinateur, rester en pyjama. Y retourner, ça ne m’emballe qu’à moitié parce que je vais devoir refaire des efforts vestimentaires et de sociabilisation. Comme je ne travaille pas à Strasbourg, les pauses déjeuner avec mes copines en ville, je ne pourrai plus non plus. En plus, il n’y a pas une bonne ambiance, ça ne donne pas envie d’y retourner. » Albertine pense alors trouver son équilibre avec la nouvelle proposition de son employeur : l’autorisation de deux jours de télétravail par semaine. « L’entreprise a bien compris que personne ne voulait revenir », conclut la Strasbourgeoise.
*Le prénom a été modifié.
Je suis tellement d’accord avec cet article que j’en suis venue à penser qu’il faudrait une loi qui interdise qu’on fasse venir un salarié sur site pour rien.
Ci dessous l’article que j’ai fait parvenir à différents médias…
——
A la rédaction,
Je souhaite partager avec vous mon témoignage concernant le dispositif de télétravail, dans le but soit d’être publiée ou alors tout simplement de rejoindre d’éventuels autres témoignages que vous auriez recueillis.
Aujourd’hui 1er juillet 2021 nous devons revenir en présentiel progressivement, pour ensuite adopter à nouveau un rythme normal au 1er septembre, et j’avoue que je me demande ce que je fais au bureau… En vérité, je suis révoltée.
Nous sommes une équipe très soudée, qui communiquons beaucoup entre nous dans le cadre de notre travail de comptabilité dans une université. Lorsque la crise sanitaire a commencé en mars 2020, nous avons revu tous nos process pour les adapter en dématérialisé. Nous avons donc pu télétravailler à 100% pendant quasiment un an (sauf rares besoins ponctuels du servcie).
Grâce aux outils informatiques mis à disposition, nous avons eu recours de façon très régulière à la visio, ce qui nous a permis de ne jamais nous sentir seuls ou isolés.
Les contraintes calendaires liées à notre profession ont été honorées, exactement comme si nous avions été en présentiel.
Satisfaite, notre hiérarchie nous a félicité pour notre sérieux et notre discipline durant toute cette période de crise. Beaucoup de nos interlocuteurs n’ont d’ailleurs jamais remarqué que nous étions en télétravail.
Grâce à ce nouvel aménagement du temps de travail, nous avons constaté un impact considérable sur notre budget (absence de transports) mais aussi sur notre qualité de vie, avec notamment plus de temps pour concilier notre vie privée et notre vie professionnelle (certains passent 2 à 3 heures par jour dans les transports !)
Mais comme on dit toujours, « toutes les bonnes choses ont une fin », et aujourd’hui nous sommes de retour au bureau, sans savoir pour quelle raison.
La première chose qui me choque c’est le bruit autour de nous ; les voitures, les collègues, la photocopieuse, les ordinateurs… A 9h30 j’étais déjà stressée…
En période estivale, notre bureau atteint sans problème les 33° dès le matin… alors que chez moi j’ai la clim…
Le retour sur la route, dans les bouchons, m’a rappelé à quel point il était confortable de travailler chez moi, m’accordant même une séance de footing avant 7h, chose impossible autrement vu la durée du trajet domicile-travail.
Le dispositif de télétravail dans la fonction publique a pourtant évolué depuis le décret 2020-524 du 5 mai 2020, mais ce n’est pas suffisant. Je pense que l’aménagement du télétravail doit pouvoir se faire en accord avec sa hiérarchie, et dans la limite des besoins du service. En d’autres termes, chacun devrait pouvoir télétravailler autant qu’il le souhaite, et non pas uniquement 2 jours par semaine.
Ce qui me révolte d’autant plus, c’est qu’on vit une époque où les mots « environnement » et « pouvoir d’achat » sont au cœur des débats, et je ne comprends pas pourquoi des salariés qui peuvent et qui veulent télétravailler 2, 3 ou même 4 jours par semaine ne peuvent pas le faire. Pourquoi les personnes qui accomplissent correctement leurs missions en distanciel doivent revenir en présentiel du jour au lendemain, sans aucun motif ?
Il faut que le gouvernement réagisse et adapte ses lois, rapidement.
Merci de m’avoir lue, et en espérant que les témoignages changeront les choses.
A une époque où on parle d’environnement et de pouvoir d’achat, il devrait être interdit de forcer des salariés qui veulent et qui peuvent télétravailler à venir sur site pour rien ! Surtout si ça fait 1 an qu’ils travaillent en distanciel à 100% sans problème.
Tellement vrai. J’y retourne depuis 1 semaine et le stress est remonté et tt ceux qui va ac… Tellement bien en télétravail et tellement plus efficace.