Comme beaucoup de monde, j’ai voulu franchir le cap de la nouvelle année 2017 avec quelques “bonnes” résolutions et objectifs à atteindre.
Au delà de moins fumer, partir plus en voyage et qui sait, peut-être rencontrer l’homme de ma vie, je me suis dit qu’il serait intéressant de dépasser quelque chose d’assez tabou : la nudité.
Pourquoi ça ?
De manière générale, je suis le genre de mec à qui ça ne pose pas de problème de se mettre en maillot à la piscine ou à la plage, mais quand il s’agit d’aller se foutre à poil à Caracalla, là, je passe mon tour !
Être nu c’est quelque chose que je réserve à la personne qui partage mon intimité, mais qu’il m’est impossible de faire devant d’autres personnes. Enfin, c’est ce que je croyais…
Un jour, une amie me raconte qu’elle pose nue de temps en temps pour un cours de dessin. Une grande conversation s’ensuit avec elle, mais la conclusion est irréfutable : je ne pourrai JAMAIS faire ça (surtout ne JAMAIS dire JAMAIS).
Le temps passe. Je rencontre d’autres personnes à l’aise avec la nudité. Et je vieillis aussi, ce qui me permet de me sentir de mieux en mieux dans mon corps de gringalet (une de mes anciennes camarades de promo m’a quand même surnommé le « phasme ». Oui oui, vous savez, cet insecte dégueulasse, long et très fin. Sympa hein ?).
Puis vient la folie des bonnes résolutions et là je me dis (je ne sais toujours pas vraiment pourquoi) : « En 2017, je pose nu ». Le pire dans cette histoire, c’est que j’étais sobre et lucide lorsque ma décision fut prise…
Après l’obtention du numéro de téléphone de la prof d’un cours de dessin et quelques SMS échangés, me voilà face à une date : le 30 janvier.
Je pensais que ça allait prendre des mois et n’imaginais ABSOLUMENT PAS que ça allait être aussi rapide. Ça craint.
La veille.
Mes amis étaient au courant depuis le début de cette folle idée, mais me voici la veille de ce fameux jour et je commence à avoir besoin d’en parler. Je suis en poste de nuit et je raconte à mes collègues que je vais poser nu le lendemain pour un cours de dessin devant une quinzaine de personnes.
Les réactions sont encourageantes, mais la plupart d’entre eux me disent qu’ils ne pourraient jamais faire ça et que je suis quand même fou.
Jour J.
Je me réveille tranquillement. Douche, café. Puis tout d’un coup, grosse prise de conscience : dans moins de 6 heures je vais être à poil devant des inconnus. L’angoisse.
Les heures passent, je n’arrête pas de les compter (un peu comme avant un examen oral qui te terrifie). Je suis seul chez moi, je ne tiens plus en place. Je saute dans la voiture et je fonce en fumant clope sur clope. Vive les bonnes résolutions.
Je me demande bien pourquoi je me suis lancé ce genre de défi, mais je décide d’assumer et de ne pas faire faux bond, d’autant plus que j’avais fait le malin devant mes collègues la veille. Je ne peux plus faire marche arrière.
J’arrive avec 20 (très très longues) minutes d’avance… Accueilli par la responsable, elle m’emmène signer mon contrat (et oui, on touche un peu de sous quand on se dévoile. J’ai reçu 35 € pour 2 heures).
Je vais me déshabiller, mais remets quand même un short et un T-shirt histoire de ne pas attendre complètement nu en plein milieu de la pièce que les artistes soient prêts.
Les participants (principalement des retraités… ouf) viennent me parler en me demandant si je suis le modèle du jour. Ça m’enlève déjà un poids, ils ont l’air d’être complètement à l’aise. D’autant plus qu’ils ne seront pas quinze, mais 9. Ça aussi ça m’aide.
Puis vient le moment où la prof me dit : « Bon ben on va y aller » (ALLER OÙ ? FAIRE QUOI ? AAAAAH). Et là, et là… ben je me fous entièrement nu devant toutes ces personnes et je m’assois sur une table recouverte d’un draps avec 3 projecteurs qui éclairent mon corps.
Première pose.
Je choisis d’être assis face à eux (quitte à se montrer, autant le faire directement). Il fait un peu froid… (messieurs, vous me comprenez) et je ne me sens pas à mon avantage, mais tant pis. Je les regarde les uns après les autres et je me rends compte qu’ils s’en foutent complètement.
10 minutes plus tard, deuxième pose. Je m’allonge sur la table et regarde le plafond. Je souris tout seul et me dit « T’es quand même sacrément con, mais qu’est ce que ça fait du bien ».
J’enchaine les poses. Vient le moment de la dernière. Je décide de me mettre dans un position, qui au bout de 30 secondes me crispe tout le corps. Et bien évidemment, je n’ai pas le droit de bouger pendant 20 minutes.
Petit conseil : privilégiez le confort !
Ça y est, c’est terminé. On me dit que j’ai bien posé (ça fait toujours plaisir à entendre) et me voilà en train de me rhabiller le sourire aux lèvres : ça, c’est fait.
Je me rhabille et vais voir les différents dessins réalisés. Au delà de remarquer que je suis hyper longiforme et que mon petit bidon (obrigado mon voyage à Lisbonne et ses multiples pintes de bière !) n’a échappé à personne. C’est vraiment très étrange de voir son corps reproduit et encore plus quand il est nu. Mais au final, je me suis senti super bien et surtout, j’ai réussi à assumer mon corps.
Ce que j’en ai tiré.
Ça m’a permis de me rendre compte à quel point un corps n’est qu’un corps. Quelque chose qu’on passe notre vie à essayer d’assumer alors que pour les autres il est beau dans toutes ses imperfections.
Étant infirmier de métier, je suis tous les jours confronté à la nudité de mes patients. C’est devenu une banalité de mon quotidien professionnel. Et pourtant, je dois avouer que grâce à cette inversion de situation, je me suis rendu compte aujourd’hui que pour mes patients, ça ne doit pas être évident.
Je ne suis pas convaincu que dorénavant, je serai moins pudique devant mes proches, mais je dois dire que cette expérience aura été tout de même extrêmement positive. Aujourd’hui, je sens qu’il y a quelque chose de plus léger en moi.
Beaux résultats rgraphiques pour un chouette article !
Merci 🙂
Article intéressant. Est-il possible d’avoir le numéro de la prof d’art pour pouvoir également poser nu ?
Merci d’avance
Bonjour, la personne responsable ne souhaite pas que je communique autour du groupe en question, mais il est très facile de trouver sur Strasbourg : art déco, association, etc. Bon courage 😉
Merci,
Je suis dans la même situation que vous… en mars je pose… nu… et super complexé…
j’ai aussi eu le droit aux différents nom… phasme, stiksy, fil de fer…
Pour mon ventre ce sera un séjour en Allemagne… mais le résultat aura été le même…
Donc merci pour votre page… elle me redonne un peu de confiance. Allez vous réitérer?
Bonne continuation
Vu les esquisses résultant de cette séance, on peut penser qu’il n’y avait rien de honteux à montrer (même ce bidou lisbonnais). Avec mon embonpoint (léger, léger…) je serais sans doute bien incapable de m’exposer ainsi. Car, bien qu’en définitive ce soit une question très personnelle, la correspondance aux critères de beauté communément admis est sûrement capitale.
“Les participants (principalement des retraités… ouf)” → Petit coquin. 😉
Expérience intéressante à transmettre. Merci pour cet article. 😀
Bonjour,
Merci pour votre témoignage.
Je dessine des visages en public, les modèles posent devant moi, habillés bien sûr car nous ne sommes pas dans un cours de dessin, juste une performance artistique. Pratiquement à chaque prestation, un homme (je suis une femme) me demande les yeux dans les yeux “Vous dessinez les nus?” Sans doute le fantasme de l’infirmière leur refait surface. N’en pouvant plus d’entendre cette question chargée de sous-entendus, je réponds inexorablement “C’est bête j’ai oublié mes loupes…” Croyez-vous que cette remarque les décourage? que nenni, ils persistent et sont fiers comme des coqs du trouble qu’ils pensent causer. La taille de leur pénis doit être proportionnelle à leur cervelle.
Ils n’auraient pas votre courage de pauser sans leur caleçon devant le public.
Aussi désormais j’ajoute en parlant fort “votre braguette est ouverte… vous avez du persil dans les dents…” @balancetonporc , oui je ne peux être aussi vulgaire qu’eux vu que l’on me paie pour dessiner, mais pas pour être insultée. Les femmes à proximité de ce porc n’en reviennent pas que l’on ose me poser une question pareille, et pourtant c’est très courant. Si vous avez des idées de réponses pour démolir ce genre de type, envoyez!
Oui j’ai dessiné des nus aux Beaux-Arts, incroyable l’émoi que cela causait dans mon entourage, à force je ne disais plus rien et je ne montrais mes dessins qu’à des initiés.
Continuez, on manque de modèle intelligents 😉
Merci pour ce beau témoignage qui donne envie d’aller au bout de ses envies!!!