Hier, Marie-Lorraine Muller, héritière de la marque Schutzenberger s’en est allée à l’âge de 49 ans. Derrière elle, une grande famille étroitement liée au patrimoine historique alsacien touche sûrement à sa fin.
Schutzenberger, c’est un nom que nous avons tous pu entendre à un moment ou un autre dans notre vie de Strasbourgeois.
Que ce soit pour ses bières que l’on a pu redécouvrir en supermarché depuis 2012, par sa gigantesque brasserie de Schiltigheim ou encore son bien connu bar/restaurant de la Place Kléber avoisinant le McDonalds et fermé depuis janvier 2006. Schutzenberger n’est vraiment pas un nom inconnu à l’oreille des Strasbourgeois.
276 années chargées d’Histoire
La brasserie nait à Strasbourg avant 1740 au n° 1 de la rue des Balayeurs dans la quartier de la Krutenau (laissant au passage son nom au restaurant qui s’y trouve actuellement : ” La Patrie “) et fournit la Cour de France d’où son nom de Brasserie Royale.
La Brasserie obtient alors le monopole des armées de Louis XV et Louis XVI, et ses bières sont servies à la table du Roi.
Elle est rebaptisée en 1789 “Grande Brasserie de la Patrie”, nom qu’elle porte toujours aujourd’hui (Grande Brasserie de la Patrie Schutzenberger SA).
En 1866, la brasserie s’étend vers Schiltigheim et investit un terrain d’environ 3 hectares, où vont pousser dessous-dessus une usine souterraine et d’impressionnantes caves, ainsi que des bâtiments jusque dans les années 1970, au gré de l’évolution des méthodes de travail et de la distribution.
Férue d’innovation, la Brasserie va lancer tour à tour la 1ère bière sans alcool, la première bière bio, les premières bières aromatisées (griotte, chocolat) et des brassins de saison (Noël, Printemps), jusqu’à obtenir une gamme de 20 marques différentes. La Brasserie Schutzenberger innove également dans les contenants… on trouve trace de canettes métal dans les années 50, idée trop tôt abandonné sous prétexte que les acheteurs estimaient qu’il n’y avait pas d’avenir pour la bière en boite !
La chute
En 2005, la brasserie (qui compte 69 salariés) connait des difficultés. En 5 ans sa production est passée de 200 000 à 80 000 hectolitres de bière par an tandis que le chiffre d’affaires baisse de 15 à 10 millions d’euros. Elle est placée en redressement judiciaire le 31 octobre 2005. Le 19 avril 2006, la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg décide de la mise en liquidation judiciaire de la brasserie. La brasserie de la Patrie Schutzenberger ferme ses portes le .
Le Schutzenberger était un bar-restaurant appartenant à la brasserie situé place Kléber à Strasbourg. Anciennement Le palais de la Bière, il a été rénové en 1999 par l’architecte Jean Nouvel et renommé Le Schutzenberger. Célèbre pour sa grande terrasse au 1er étage donnant sur la place, il a fermé en 2006 en même temps que la brasserie.
La Brasserie, qui demande la protection de la loi pour apurer ses dettes en 2006, recouvre la propriété du site historique et des marques en 2012, mais privée de l’outil de travail.
Reste un ensemble de bâtiments qui constitue toujours un patrimoine architectural indéniable, et l’âme criante de l’histoire de Schiltigheim : une cité de brasseurs.
Inscrit à l’inventaire des Monuments historiques en 2008, le site a vocation à renaître dans un projet de “cité du brassage” (des idées, des compétences, des valeurs…) autour de la thématique brassicole, incluant une nouvelle unité de production de bière et d’embouteillage, des pôles d’activités et touristiques, sous la houlette des actionnaires familiaux.
Perpétuer une idée
La procédure de liquidation est clôturée par l’extinction du passif en décembre 2011. En avril 2012, Marie-Lorraine Muller produit un premier brassin de bière Jubilator.
L’année 2013 marque la renaissance de Schutzenberger après six ans de procédure à la suite de la liquidation judiciaire de La grande brasserie de la Patrie Schutzenberger débutée en 2006. Les héritiers et actionnaires se sont battus pour conserver les marques et reprendre l’activité.
Schutzenberger ressort depuis 2012 ses bières principales : Jubilator, Bière sur Lie (Schutz 2000), Patriator, Brassin de Mars et Brassin de Noël.
La saga continuait donc, après 6 ans de parenthèse, avec le même ADN d’innovation, de rassemblement et d’ouverture d’esprit… la prestigieuse histoire qui est passée entre les mains de deux Rois, de quelques célébrités et de milliers d’alsaciens se retrouve aujourd’hui face à une nouvelle difficulté…
Textes et images : Wikipédia & Schutzenberger.fr