À Strasbourg et alentours, nombreux/ses sont celles et ceux qui agissent à leur niveau pour valoriser la filière locale et bio sur le territoire. Producteurs/rices, transformateurs, distributeurs, institutions, gérant(e)s de commerces ou consommateurs/rices : on a rencontré des femmes et des hommes engagé(e)s pour une agriculture plus propre et une consommation plus saine. Avec l’aide de l’Agence Bio, qui pour la deuxième année consécutive lance la campagne nationale #BioRéflexe et de l’association Bio en Grand Est qui déploie la campagne en région, on en a appris davantage sur les bénéfices d’une consommation à la fois locale ET biologique. On vous partage tout ce que l’on a appris lors de ces rencontres.
Depuis plusieurs décennies, l’agriculture biologique se fait une belle place au soleil. Encadré par une loi européenne depuis plus de 30 ans, ce type de production défend « le respect de l’environnement et de la protection du climat, de la biodiversité, de la santé humaine et du bien-être animal », selon la définition de L’Agence Bio.
Si le Bio Tour de la campagne nationale #BioRéflexe s’arrêtera du 6 au 8 septembre à la Foire européenne de Strasbourg, aujourd’hui, c’est un autre rendez-vous qui vous attend. Après une immersion dans le monde du bio avec un brasseur et un boulanger, mais aussi une plongée dans le fonctionnement de l’Ordonnance Verte, qui offre gratuitement des paniers de fruits et légumes bio aux mamans, direction Solibio.
Sur place, on a rencontré Ludovic Lay, le jeune directeur de cette coopérative alsacienne, qui fournit la restauration collective et les magasins spécialisés du territoire en produits frais, locaux et bio.
Avant toute chose : c'est quoi Solibio ?
Créée en 2008 et installée du côté du Marché Gare, en périphérie proche de Strasbourg, l’entreprise Solibio approvisionne des client(e)s à travers toute l’Alsace.
Fruits et légumes, produits laitiers, viandes fraîches, pains artisanaux ou produits d’épicerie : toutes ces productions issues de l’agriculture biologique proviennent directement de fermes et de champs situés à 90% en Alsace et en Lorraine, avant d’être redistribuées par Solibio.
Les produits bio sont ultra-frais (livrés dès le lendemain de la récolte), la traçabilité est respectée, la qualité des produits est au rendez-vous, les distances des transports sont réduites, les emballages aussi, et l’entreprise ne stocke rien, ce qui évite une perte de marchandises.
En tout, plus d’une trentaine de producteurs et productrices (toutes et tous actionnaires de l’entreprise) confient leurs précieuses denrées à Solibio, qui les revend à près de 300 client(e)s.
Ces client(e)s (des cantines scolaires en majorité), sont également engagé(e)s dans une démarche d’approvisionnement plus vertueuse, qui valorise le travail des producteurs/rices.
Et pour mieux comprendre le fonctionnement de cette coopérative et l’importance de participer à la mise en lumière du label « Bio » dans la région, Ludovic Lay, 32 ans, le nouveau patron de Solibio, a répondu à nos questions.
• Qu’est-ce qui vous a donné envie d’entrer dans cette entreprise ?
Au départ, je suis ingénieur de formation. Au fil des années, j’ai été de plus en plus sensible à la cause climatique, et petit à petit, j’ai pris conscience des enjeux autour de l’alimentation et des sources d’approvisionnement de cette alimentation.
Qu’est-ce qu’on mange exactement, d’où ça vient, qui l’a produit, comment ? Toutes ces questions ont commencé à raisonner de plus en plus fortement dans ma tête. J’ai donc commencé à travailler pour la DRAF (Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt) pour aider au développement de la filière bio et du circuit court. L’idée de défendre une alimentation plus saine et plus locale ne m’a plus lâché.
Avec ce bagage accumulé à la DRAF, et l’expérience qui était devenue la mienne, j’ai eu envie de devenir mon propre patron et tenter un nouveau défi en accord avec mes valeurs, et me voilà aujourd’hui chez Solibio.
• Pouvez-vous me parler de votre rôle ?
J’ai toujours pensé que bien manger était d’une importance capitale, et le plus souvent, ça passe par le bio et le local, car un produit bio venu du bout du monde n’a pas d’intérêt.
J’ai également toujours aimé le volet social dans une entreprise. Accompagner, mettre en lien, développer une filière plus vertueuse, nourrir le mieux possible la population et rémunérer correctement celles et ceux qui produisent et travaillent la terre, le tout dans une entreprise dont je partage l’éthique. L’idée me plaisait bien, et le challenge aussi. Depuis mon arrivée à ce poste, en juillet 2023, je fais en sorte d’approvisionner nos clients, par exemple des écoles ou des Biocoop, en produits bio, locaux, frais et de qualité.
Bien sûr, Solibio est une entreprise, et elle doit faire de la marge comme les autres, mais nous avons une approche collective du business, car tous nos partenaires sont actionnaires, on réfléchit donc ensemble.
• Quelles actions mettez-vous en œuvre auprès des producteurs et productrices ?
Le but est de faciliter la vie de celles et ceux qui produisent, de leur faire gagner du temps, de l’argent, et de leur permettre de vendre leurs produits correctement, toute l’année, le tout en obtenant une juste rémunération.
On va donc négocier les prix pour eux, avec la force de notre réseau. On va constituer des gammes de produits, gérer le transport, le conditionnement, la logistique, tout ça pour que tout le monde y trouve son compte : celles et ceux qui produisent, les consommateurs, et nous-même.
• Pourquoi est-il important pour vous de travailler dans ce domaine ?
Je pense que l’alimentation saine et durable est l’enjeu prioritaire de notre siècle. Aujourd’hui, on peut agir dans de nombreux domaines pour lutter contre le changement climatique. Par exemple, on peut choisir de moins prendre l’avion, et il faut le faire, mais je pense que l’alimentation est ce sur quoi nous pouvons et nous devons agir le plus au quotidien.
Dans mon travail, je défends à la fois cette idée, car je suis en contact avec des femmes et des hommes qui apportent des solutions concrètes, et en même temps, je me sers de mes compétences pour aider.
• Pour vous, pourquoi la consommation bio et locale et un enjeu primordial ?
Prenons l’exemple d’un maraîcher labellisé bio en périphérie de Strasbourg. Dans son champ, il n’utilisera pas de pesticides nocifs pour l’humain, ni des produits nuisibles aux insectes, qui doivent se développer dans ces champs, et faire vivre à leur tour la biodiversité. Avec l’agriculture biologique, des alternatives naturelles à ces produits sont utilisées et c’est beaucoup mieux pour la nature.
L’objectif ? Ne pas détruire le vivant. Et le vivant, c’est aussi l’eau qui se retrouve polluée dans des champs mal traités, de l’eau qu’on va ensuite boire…
Bien sûr, si vous cultivez des concombres bio par exemple, votre rendement sera en moyenne 20% plus faible que dans une culture conventionnelle.
Par contre, votre concombre sera sain, plus nutritif, le goût sera meilleur car il aura pris le temps de pousser, et le prix de vente que vous allez proposer vous permettra de vous y retrouver. Et en plus de respecter la biodiversité, les sols et l’eau (qui constituent quand même la base de la vie) un concombre bio et local sera moins sujet à l’inflation et aux variations des prix du marché. Vous gardez donc davantage le contrôle sur vos prix et votre marge.
• Est-ce que la pédagogie sur le bio va dans le bon sens selon vous ?
Je trouve qu’il y a des efforts qui ont été faits dans certains domaines, mais encore une fois, tout réside dans les choix politiques de nos élus. Par exemple, dans le cadre de la loi Egalim, la Ville de Strasbourg souhaite passer à 50% de produits bio, dont deux tiers locaux, dans les cantines scolaires.
C’est une politique assumée qui va dans le bon sens, elle permet d’acheter des produits diversifiés, qui varient toute l’année, mais aussi de pérenniser et de structurer la filière bio en Alsace.
D’ailleurs, dans la région, nous avons énormément de producteurs et productrices qui travaillent la terre juste à côté de Strasbourg, et ces personnes viennent souvent sur les marchés pour vendre leur production, ce qui fait du Bas-Rhin le champion de France de la vente en direct, c’est une chance !
Bien souvent, ces producteurs sont labellisés bio ou en phase de le devenir. Selon moi, la population est donc sensibilisée et elle sait pourquoi elle consomme bio, elle a juste parfois besoin d’un petit coup de pouce pour aller encore plus loin. Et puis, il ne faut stigmatiser personne, inutile de séparer les adeptes du bio et les autres. Aujourd’hui, il faut plutôt redonner aux gens l’envie de cuisiner avec des produits plus sains et locaux.
De temps en temps, vous pouvez faire le choix du bio, le choix de passer dans un magasin spécialisé, sur un marché, ou chez un producteur près de chez vous. Vous trouverez peut-être davantage de plaisir à préparer un bon produit, plus sain, plus frais, et de qualité.
Si vous voulez en savoir plus sur la campagne #BioRéflexe, vous pouvez cliquer ici 😉