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Elles ont 36, 42 et 56 ans : rencontre avec 3 femmes qui ont repris leurs études à Strasbourg

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Reprendre ses études à l’âge adulte n’est pas forcément qu’un rêve. En 2022, après deux ans de crise sanitaire liée au Covid-19, nombreuses sont les personnes à avoir exprimé l’envie de faire une reconversion professionnelle. Vous avez peut-être même entendu parler du phénomène de « grande démission », qui n’a pas vraiment eu lieu dans l’Hexagone, même si nombreux/ses sont les salarié(e)s qui ont sauté le pas. Et aujourd’hui, on vous raconte les parcours de trois strasbourgeoises, de retour sur les bancs de la fac !

Commencer une nouvelle vie, gagner plus ou encore s’épanouir au travail : fin 2021 et début 2022, le nombre de démissions avait atteint un niveau historiquement élevé pour des raisons diverses, avec environ 520 000 départs par trimestre, selon la Dares. Un chiffre qui aurait (peut-être) encore pu progresser davantage, si la forte inflation n’était pas rentrée dans le jeu, obligeant certaines personnes à mettre de côté ce souhait de reconversion.

Pour mieux comprendre ce besoin de changer de carrière, on a rencontré trois femmes à Strasbourg, aux parcours distincts, mais avec un point commun : elles sont retournées à l’université, pour changer de voie. Rencontre.

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Strasbourg nacelle nacel + hauteur panorama cathédrale toits
© Coraline Lafon / Pokaa

Retours sur les bancs de la fac, pour reprendre sa vie en main

« Pendant des années, j’ai nettoyé des salles de classe, et bientôt, je vais y enseigner. » Quand on rencontre Mélanie, 36 ans, la première chose qu’on remarque, c’est sa bonne humeur : « Je suis contente de raconter mon parcours, ça peut aider d’autres personnes. » Originaire de Tours, elle vit à Strasbourg depuis plusieurs mois et commence en cette rentrée une licence en sciences de l’éducation, parcours « Professorat des écoles ».

Pourtant, au départ, ce changement de vie n’était pas vraiment prévu. « J’ai été serveuse après le lycée, j’ai appris sur le tas et après plusieurs années dans le métier, le covid a mis en pause ma vie pro, avec la fermeture des restaurants. » Au moment de leurs réouvertures, difficile de trouver un poste stable. Elle devient agente d’entretien et de restauration scolaire, en tant que contractuelle dans la fonction publique. Sur le moment, ce métier lui convient et lui permet d’avoir une vie de famille à côté.

« Sauf qu’au printemps 2022, je viens à Strasbourg voir un ami, et il me dit “mais tu vas pas faire ça toute ta vie”, car il me connaissait bien et il me voyait faire autre chose. Et puis j’avais jamais eu mon bac, alors une idée a commencé à germer. » Pour faire une croix sur cet échec, et face à la difficulté d’être titularisée dans son poste, elle démarre en septembre 2023 un cursus pour obtenir le DAEU (diplôme d’accès aux études universitaires), l’équivalent du bac.

Cours du soir après cours du soir, fiche après fiche, Mélanie réussit son pari : « Quand j’ai vu les résultats, j’ai pleuré, car j’ai lâché un an de stress, et puis un mal-être d’adolescente disparaissait. » À l’époque, alors qu’elle vit à 700 kilomètres de la capitale alsacienne, c’est notamment dans notre ville qu’elle décide de s’inscrire à l’université, « j’ai tout de suite aimé Strasbourg ».

Campus Esplanade 4
© David Levêque / Pokaa

Si Mélanie a décidé de rejoindre l’Éducation nationale, Naïssa, elle, a fait le choix de la quitter. À 42 ans, cette Strasbourgeoise n’hésite pas à le dire : « Si on pense qu’il faut changer de voie, il faut oser, sinon on le regrette. » Une philosophie qu’elle a appliquée dans sa vie professionnelle, mais également en amont, dans son parcours universitaire.

Après le bac et de très bons résultats, Naïssa a fait un an de prépa bio à Metz, une licence musicologie pour devenir professeure de musique et un DEUG en 2 ans, avant de rejoindre le CFMI (Centre de formation de musiciens intervenants) à Sélestat pour deux ans d’alternance. « On avait de la théorie et de la pratique dans des classes, mais je n’étais pas vraiment prof, plutôt intermittente du spectacle. Après ce cursus, j’ai bien vu que c’était une profession précaire et à ce moment-là, j’ai 25 ans, le seul truc que je veux, c’est de la stabilité. »

reprise d’études
Naïssa. © Anthony Jilli / Pokaa

En 2007, elle rejoint alors la fac en troisième année de sciences de l’éducation et fait un an de prépa. « J’arrive 6e au CRPE, le concours pour enseigner dans les écoles, et je débute ensuite un an d’alternance payée, avant d’être diplômée à 27 ans. » 

Mais après presque 14 ans dans l’enseignement, notamment en tant que remplaçante les dernières années, elle n’en peut plus : « Les conditions de travail se sont dégradées, on nous demandait de plus en plus de choses. Au moment du covid, j’ai pu souffler un peu, et je travaillais depuis chez moi, mais ma santé mentale en avait pris un coup. »

Si elle explique qu’elle n’a jamais vraiment « trouvé sa place dans ce métier », c’est grâce à un long travail sur elle-même, et un bilan de compétence, qu’elle a pu sortir d’un burn-out et d’une dépression pour se rendre compte qu’elle voulait devenir psychologue. « Au final, moi aussi je souhaite aider les gens, mettre ma pierre à l’édifice. Et puis, j’ai fait un travail de déculpabilisation sur moi-même, pendant des années je voulais rentrer dans un moule qui ne me correspondait pas. »

Ainsi, en 2023, grâce à une équivalence et son expérience en REP (réseaux d’éducation prioritaire), Naïssa intègre directement la troisième année de psychologie. « C’était difficile, je devais rattraper beaucoup de cours, j’avais l’appréhension d’être avec des plus jeunes et j’avais peur du regard des professeurs. Mais au final, j’ai rencontré des étudiantes incroyables et mon parcours a été une force, les profs ont vu que je pouvais ramener un petit truc en plus. »

Et il y a quelques jours, elle a fait sa rentrée en master psychologie (psychopathologie clinique psychanalytique). « Je suis fière, la sélection était drastique, il y avait seulement 40 places pour 1400 candidatures et j’ai réussi. Cette année, je vais même travailler chez un psychologue une fois par semaine pour mon stage. »

Après Mélanie et Naïssa, direction la terrasse d’un café pour rencontrer Isabelle. Professeure documentaliste depuis plus de 10 ans, elle décide en 2018 et en parallèle de son CDI, de commencer une licence de sociologie à 50 ans : « J’avais envie de changement, mes enfants étaient grands donc je pouvais faire ce que je voulais. »

Un choix de cursus qui n’est pas dû au hasard : « J’ai beaucoup travaillé l’orientation professionnelle avec les élèves et je voulais comprendre pourquoi l’Éducation nationale n’arrivait pas à tous les aider dans leurs projets, notamment en REP et REP+ ou dans les zones rurales. »

Depuis Strasbourg, elle suit alors pendant 3 ans des cours en distanciel, avec juste les examens en présentiel (jusqu’au covid qui a changé la donne). Après la licence, elle continue avec un master à Angers, toujours à distance pour continuer de travailler à côté, et un autre à la fac de Dijon.

Et depuis plusieurs mois, elle a même commencé une thèse en collaboration avec une association à Paris. « L’objectif est de s’intéresser à la façon de recruter dans les entreprises et dans l’Éducation nationale, pour réduire les inégalités femmes-hommes et les discriminations à l’embauche. C’est un sujet passionnant, qui n’était pas celui que j’imaginais au début de ma licence, mais dans tous les cas, c’est un peu comme une deuxième vie qui débute pour moi. »

Un sentiment partagé par Mélanie : « Clairement, la reprise d’études, c’est un peu comme une seconde jeunesse. J’ai passé le bac à 35 ans et maintenant je suis à la fac. Je vais même passer le permis dès que j’en ai les moyens. Mais par contre, financièrement, ce n’est pas simple ce changement de vie. »

Etudiants campus esplanade
© David Levêque / Pokaa

Trouver du soutien chez ses proches, surtout face à la réalité financière

Comme l’évoque Mélanie, la reprise d’études entraîne également des changements dans le quotidien, et dans les revenus.

« Du jour au lendemain, on a un salaire en moins à la maison. Avec mon conjoint, on s’est soutenu, car lui aussi fait une reconversion pour devenir professeur à la fac. La chance qu’on a, c’est qu’il continue son activité de tatoueur en parallèle, et j’ai une bourse. Mais en master 2, je vais certainement devoir faire un prêt étudiant », explique Naïssa. « Mais ça vaut le coup, ma fille de 9 ans voit bien que je suis plus heureuse qu’avant et ça lui fait du bien. Et puis c’est sympa, par exemple l’autre fois on rigolait car on avait des contrôles le même jour. »

Un soutien sur lequel Mélanie a aussi pu compter, en la personne de Zacharie, 11 ans, son fils : « Je la voyais bien devenir professeure des écoles, et je suis content pour elle. » La mère poursuit : « Il s’est vite adapté, parce que moi je suis venue à Strasbourg, mais lui, il a déménagé près de Paris, chez son père. Mon ex-mari m’a vraiment aidé, il a compris que j’avais besoin de temps pour réussir, et on a donc changé notre mode de garde. »

reprise d’études
Mélanie et son fils Zacharie. © Anthony Jilli / Pokaa

Du temps qui sera peut-être consacré à un job étudiant. « Avant, j’avais un salaire de 1 650€, maintenant avec le chômage je gagne 1 100€, et les droits vont s’arrêter à un moment. Si je ne trouve aucune aide, je vais devoir travailler. La précarité, c’est aussi un choix de vie, surtout quand il faut payer 1 900€ à la fac pour pouvoir faire ses études. Heureusement, mes amis et ma famille ont pu m’aider, et je ne pourrais jamais assez les remercier. »

Isabelle, elle, n’a pas quitté sa fonction de professeure documentaliste avant cette année. « Sinon, ça aurait été trop compliqué, là maintenant avec la thèse je suis payée pour faire de la recherche, et c’est sympa, il faut l’avouer. Mais je ne veux pas faire une carrière universitaire, pour le moment, je me laisse porter. »

Tout comme Mélanie, Isabelle met néanmoins le doigt sur un problème : « Il n’y a pas grand-chose de fait pour aider les adultes qui reprennent leurs études. Heureusement que les groupes Facebook existent pour s’entraider entre étudiants sur les questions administratives par exemple, parce que sinon on est vite seule et c’est compliqué quand on fait son retour dans un monde qu’on a quitté depuis longtemps. »

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© Samuel Compion / Pokaa

Merci à Mélanie, Zacharie, Naïssa et Isabelle pour leurs témoignages. Si vous voulez en savoir plus, l’université de Strasbourg propose plusieurs pages, sur son site internet, dédiées à la reprise d’études. La première donne des informations générales et des conseils, et elle est disponible en cliquant ici, la deuxième concerne plutôt l’inscription à un cursus, avec un planning des différentes étapes que vous devez connaître, elle est visible juste là.

Et surtout, bonne rentrée 😉

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Elles ont 36, 42 et 56 ans : rencontre avec 3 femmes qui ont repris leurs études à Strasbourg

Commentaires (1)

  1. Bonjour, bravo à vous mesdames. Moi aussi j’ai repris les études à l’âge de 53 ans pour être infirmière après de longues années de travail en étant aide soignante .Mes enfants sont grands, j’avais envie d’évoluer dans ma profession et d’être beaucoup plus utile aux patients, de les prendre en charge dans la globalité. … Mais j’avoue que ce n’est pas du gâteau, les cours sont intenses et la précarité s’y ajoute… Mais je tiens le coup. Là, suis en 2e année.. j’aurais bien souhaité partager aussi mon expérience.

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