Théo Kwiek, jeune habitant du Polygone, est manouche, fier de son quartier et depuis peu, champion d’éloquence ! À 14 ans, le jeune homme a été sélectionné dans son collège de Solignac par l’association strasbourgeoise D-Clic et a remporté la première phase des concours d’éloquences organisés par cette dernière.
Un débit de parole intarissable une fois en confiance et un large sourire, Théo Kwiek marque par sa maturité. L’adolescent de 14 ans, « bientôt 15 », est scolarisé à Solignac : « dans un REP+ », précise-t-il.
S’il insiste sur ce dernier point, c’est pour deux raisons. De un, il est particulièrement conscient, en tant que manouche et habitant du Polygone, de la place qui lui est attribuée par la société. De deux, parce que ce détail a tout à voir avec le sujet qui lui a permis de remporter la première place du concours d’éloquence organisé par l’association D-Clic : « Est-il possible de dépasser le déterminisme social ? »
Théo a pu défendre ce sujet par l’affirmative, devant un jury, le 14 mars dernier. Entre argumentaire ciselé et expériences personnelles, il a su faire vibrer son auditoire et a remporté cette première phase haut la main.
« La vision des gens sur le quartier du Polygone, et sur la communauté manouche, est en générale négative, et je souhaite changer ça. Ramener ce trophée, c’est à la fois prouver aux jeunes de mon quartier qu’on peut faire mieux que la place qu’on nous donne, et amener un autre regard extérieur », explique Théo, très investi.
Un talent repéré à l'école, par sa professeure d'allemand
Lors de ce premier tour du concours, c’est face à une sélection de 32 élèves de l’Eurométropole qu’il a convaincu. La deuxième phase, organisée le jeudi 18 mars dans les locaux de France Télévisions à Paris, a réuni 17 élèves. Théo Kwiek s’est classé troisième. Une déception pour le jeune homme, qui aura tout de même la responsabilité d’être le présentateur de la finale. Celle-ci se tiendra au Théâtre de Hautepierre, le 30 mai.
Doté d’une aisance à l’oral remarquable, Théo a été repéré par sa professeure d’allemand pour ses talents. Ce qui ne constitue pas une surprise pour sa famille : « Théo est non seulement un bon élève, il aime l’école, mais il est surtout très à l’aise à l’oral », témoignent-ils/elles, dont sa maman, Sabrina.
En plus, il avait déjà attiré les regards lors du passage, dans son collège, de l’association D-Clic pour un concours de simulation de création d’entreprises. Et ce sont l’ensemble de ces soutiens qui lui ont permis de porter haut les couleurs de son collège et de sa communauté.
Un grand cœur et de belles ambitions
Dans sa quête d’excellence, Théo trouve également le temps de se consacrer à ses passions, que ce soit le football, la pêche ou la piscine. Son énergie débordante et sa curiosité insatiable rencontrent un cœur généreux. « Théo a 20 mois d’écart avec son petit frère, qui est atteint d’autisme, explique Sabrina, et jamais il ne l’a tenu à l’écart. Au contraire, ils passent beaucoup de temps ensemble et sont très proches. »
Une proximité dont il est aisé de témoigner en les voyant ensemble, dans le salon familial. « Il a longtemps souhaité devenir footballeur professionnel », explique sa mère. Quand on lui demande la raison, le jeune homme sourit simplement : « J’adore le foot, et je voulais gagner assez pour ouvrir des maisons pour la prise en charge des enfants handicapés. »
Théo ne se contente pas de rêver, il agit. En envisageant une carrière dans l’immobilier, il souhaite concrétiser ses ambitions professionnelles tout en restant fidèle à ses valeurs de communication, de contact humain et de dépassement de soi. « Ce concours d’éloquence a servi de déclencheur. Je pensais devenir peintre en bâtiment jusqu’ici, et d’ailleurs mes stages s’étaient très bien passés ! Aujourd’hui je vois de nouvelles possibilités s’offrirent à moi et je souhaite les saisir en rentrant en bac pro commerce et me spécialisant dans la relation client. »
Le jeune homme est d’ailleurs en recherche de stage pour juillet, et d’une alternance pour la rentrée. Si vous avez des idées, rendez-vous dans les commentaires !
Quand on l’écoute, chaque mot prononcé est une étape vers un avenir où les rêves n’ont pas de limite et où chacun(e) peut trouver sa voie, « quelles que soient son origine ou son histoire », appuie-t-il. À travers ce discours, rendu sien et intime, Théo ne cherche pas seulement à convaincre, mais aussi à briser un imaginaire collectif délétère et à inspirer celles et ceux qui l’écoutent.
Dans cette époque où les sinistres prédictions semblent se multiplier, l’histoire de Théo, ce jeune de 14 ans qui, malgré un début de vie peut-être difficile, se démarque par sa remarquable lucidité face aux défis qui se présentent à lui, insuffle en moi un regain d’optimisme dans un contexte souvent empreint de pessimisme.
Au milieu du discours omniprésent sur LA VICTIMISATION, il est revigorant de croiser un personnage tel que Théo, qui refuse de se laisser entraîner par cette narration et qui, au contraire, semble avoir une profonde compréhension des enjeux de la vie, défiant ainsi les attentes et les préjugés.
C’est un témoignage vibrant de résilience et de maturité chez un jeune qui, selon les normes de la société, pourrait être considéré comme défavorisé.
En célébrant Théo, nous célébrons non seulement sa propre réussite, mais aussi le potentiel qui réside en chacun de nous pour surmonter les circonstances difficiles et émerger avec force et clarté.
Puissent de nombreux autres enfants « des quartiers » être inspirés par son exemple, et en attendant, je lui souhaite tout le meilleur dans ses futures entreprises.