L’Insee vient de publier une étude approfondie sur la pauvreté dans la région Grand Est. Réalisée à partir de données datant de 2020, elle établit que 14,5% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Pour les moins de 30 ans, cette proportion grimpe à 20%.
Selon une étude publiée par l’Insee, 764.000 personnes vivent sous le seuil de pauvreté dans la région Grand Est, soit 14.5% de la population régionale. Situé dans la moyenne nationale, le niveau de pauvreté reste stable par rapport aux données récoltées en 2017.
Dans la région, le Bas-Rhin et le Haut-Rhin font figure de bons élèves, moins touchés que les autres départements. Cependant, leur taux de pauvreté est en légère augmentation, passant de 13% à 13.2% de la population entre 2017 et 2020.
Mesurer les différents aspects de la pauvreté
La pauvreté peut prendre de multiples formes. Dans la loi, sont considérées comme pauvres les personnes « dont les ressources matérielles, culturelles et sociales sont si faibles qu’elles sont exclues des modes de vies minimaux acceptables ». Si cette définition est suffisamment large pour englober différents aspects de la pauvreté, généralement on privilégie pour le calcul, une approche en fonction des revenus.
En France, le seuil en dessous duquel une personne est considérée comme pauvre est fixé à un revenu inférieur à 60% du revenu médian. Pour cette étude portant sur des données de 2020, le seuil se situe à 1.120€ pour une personne seule, 1.680€ pour un couple et 2.350€ pour un couple avec deux enfants.
Les grandes villes particulièrement touchées par la pauvreté
Quand on regarde dans le détail la répartition de la population pauvre dans la région, elle se concentre dans les grands centres urbains. En Alsace, ce sont, sans surprise, Strasbourg et Mulhouse qui affichent les taux de pauvreté les plus élevés. Un habitant sur cinq est concerné dans ces deux villes, quand les campagnes semblent plus épargnées avec des taux inférieurs à 10% dans la plupart des communes d’Alsace.
Globalement, le Grand Est se démarque des autres régions françaises par des taux de pauvreté plus élevés en ville, mais des campagnes moins touchées. Il est à noter que des disparités existent entre communes rurales. La proximité d’un centre urbain faisant diminuer de façon significative le taux de pauvreté.
Des jeunes et des travailleurs plus pauvres
S’il est un chiffre qui fait froid dans le dos à la lecture de ce rapport, c’est celui de la répartition de la pauvreté en fonction de l’âge. À l’échelle régionale, près du quart des ménages de moins de 30 ans vivent sous le seuil de pauvreté.
Une proportion significativement supérieure à la moyenne nationale. À contrario, les seniors sont moins touchés, la proportion de ménages pauvres passant à un sur dix au-delà de 60 ans.
Autre élément inquiétant, l’emploi ne protège plus nécessairement de la pauvreté. Quand on regarde la situation des personnes vivants sous le seuil, la majorité d’entre elles (58%) sont sans activité et 17% en retraite. Le reste, soit 25%, ont un emploi ou une activité rémunérée.
L’importance des mécanismes de redistribution et de protection sociale
Cette proportion importante de travailleurs pauvres témoigne que de nombreuses personnes (précaires, temps partiel, indépendants, etc) naviguent à la limite du seuil de pauvreté. Pour s’en rendre compte, il faut regarder l’effet des mécanismes de redistribution, prestations sociales et impôts.
Sans eux, le taux de pauvreté dans le Grand Est s’établirait à 21.5% des ménages, contre 14,5% actuellement, avec une proportion beaucoup plus importante de personnes exerçants une activité professionnelle.
Une image sans doute en dessous de la réalité
Cette étude publiée à partir des données de 2020 constitue la photographie la plus précise dont nous disposons sur la pauvreté dans la région Grand Est.
Pourtant, il faut considérer quelques limites à ce travail statistique. Les revenus ne disent pas tout. Des personnes au-dessus du seuil peuvent avoir des difficultés financières, par exemple un fort endettement, qui les amènent dans des situations vécues, similaires à d’autres personnes vivants en dessous du seuil. Dans la vie de tous les jours, la pauvreté ne s’arrête pas dès que vous dépassez 1.120€ mensuel.
Enfin, cette photographie, si précise soit-elle, est une image du passé. Depuis 2020, la situation économique s’est largement dégradée. En 2022, l’inflation était de 5.2% et la hausse des prix se poursuit en 2023. De nombreux acteurs associatifs tirent la sonnette d’alarme sur la situation des ménages les plus modestes.
Une partie de la population, fragilisée, pourrait déjà avoir franchi la limite du seuil de pauvreté. En 2023, celui-ci s’établit à 1.377€ mensuel pour une personne seule.