Entre deux contrats, trois acrobates professionnels ont choisi de dresser leur mât chinois sur le parvis de la cathédrale de Strasbourg. Tous les jours, quand la météo le permet, le trio d’artistes propose un petit spectacle d’un quart d’heure environ, aux alentours de 17 h 30.
Devant le tympan délicatement ouvragé de la Cathédrale de Strasbourg, ils sont trois à voltiger à près de cinq mètres du sol. Sur un mât, un grand monocycle ou des chaises extrêmement hautes, Nhât-Nam Lê, Paul Herzfeld et Domitil Aillot évoluent dans les airs avec une facilité déconcertante. Aimantent le regard d’un public conquis.
Depuis deux semaines et jusqu’à la fin du mois d’octobre, les trois acrobates jouent tous les jours sur le parvis quand la météo le permet. « Une petite routine d’une quinzaine de minutes » mise au point avec l’aide de Bruno Uytter, le chorégraphe de la revue Scoute et de la compagnie alsacienne Motus Modules.
Des artistes passionnés
Circassiens professionnels, les trois artistes sont des enfants du pays. Mais ils ont beaucoup voyagé. Issu du milieu de l’escalade, Nhât-Nam Lê a fait la connaissance de Paul Herzfeld à Graine de cirque, où ce dernier était venu donner un stage entre différents contrats. Diplômé de l’école nationale de cirque de Montréal, ce spécialiste du mât chinois a travaillé au Cirque du soleil, à Las Vegas et au cirque Roncalli, en Allemagne, entre autres endroits.
Originaire de Strasbourg lui aussi, Domitil Aillot s’est découvert une vocation de circassien à quatre ans, dans l’ambulance qui l’emmenait à Hautepierre après qu’il soit tombé en voulant jouer les funambules sur un balai entre deux chaises. Formé à l’école nationale du cirque Annie Fratellini à Paris, il a vécu 20 ans aux États-Unis et s’est produit un peu partout dans le monde – dont les diners spectacles et théâtres de variétés allemands – avant de revenir en Alsace cette année.
"C'est la plus belle scène du monde !"
« On s’est beaucoup croisés ces cinq-six dernières années à Strasbourg, l’été, retrace Domitil Aillot, à l’origine de ce projet éphémère. Particulièrement pendant la pandémie. À ce moment-là, tout s’est arrêté. On ne savait pas trop quoi faire alors on s’entraînait dans les parcs de Strasbourg. On installait notre mât au parc de l’Orangerie ou aux Contades, entre nos contrats. »
« En mars dernier, à mon retour en France, j’ai monté un petit spectacle avec Paul et Nhât-Nam à l’école Graine de cirque. Et finalement, je leur ai proposé que l’on joue quelque chose devant la cathédrale cet été.«
Le lieu ne doit rien au hasard. « C’est magnifique ! C’est la plus belle scène du monde ! », s’enthousiasme Domitil Aillot, un sourire dans la voix. « Je le voyais aussi comme une sorte d’hommage à tous les artistes que j’ai vus se produire ici et qui m’ont donné envie de faire de même. » Pour les trois circassiens, jouer dans la rue représentait aussi un défi.
« On essaie de voir si on arrive à attraper le public et à le garder avec nous, poursuit l’acrobate. On essaie de leur donner un petit moment de rêve et de douceur au milieu des tracas du quotidien. Si on arrive à leur faire oublier leurs problèmes le temps du spectacle, c’est que du bonheur finalement.«