Après la chute d’un morceau de sa façade, l’avenir de l’ex-bâtiment du Printemps est revenu sur le devant de la scène. Alors qu’il est vide depuis trois ans, il semblerait qu’un nouveau projet se trame doucement derrière ses portes closes. Petit aperçu de ce qui pourrait arriver, dans les prochaines années, dans un lieu emblématique du centre-ville strasbourgeois.
Un morceau de façade tombe, et subitement, le sujet de l’avenir de l’ex-Printemps est relancé. Alors que le bâtiment est vide depuis le départ de l’enseigne en décembre 2021, un accident heureusement sans gravité est arrivé le 9 janvier dernier : une plaque métallique de 2 mètres est tombée du bâtiment, juste à l’angle de la rue du Noyer.
En plus de la frayeur provoquée par cet incident en plein centre de Strasbourg, cela a relancé les questionnements sur l’avenir d’un bâtiment inoccupé depuis trop longtemps, et qui est devenu un symbole pour celles et ceux qui disent que le centre-ville strasbourgeois se meurt. Néanmoins, plus de trois ans après, il semblerait qu’un nouveau projet prenne forme dans les 7 500 m2 du géant endormi.
Préambule : qui possède réellement le bâtiment ?
Depuis plus de trois ans, le sort du bâtiment du Printemps alimente toutes sortes d’idées et de confusions. En cause : on ne sait pas vraiment qui possède quoi. Pour faire simple, avant 2013, le groupe Printemps, appartenant à un groupe qatari, possédait le bâtiment dans lequel il se trouvait. Post-2013, il l’a vendu au groupe Benarroch-Oussadon, qui possède une flopée de grands bâtiments à Strasbourg et en Alsace.
Aujourd’hui, le bâtiment est la propriété d’une unique société civile immobilière, qui appartient à un fonds d’investissement, lui-même associé à d’autres investisseurs, dans une sorte de pool. Celle-ci a mandaté un gestionnaire [asset manager, en langage financier, ndlr], avec lequel la Ville est entrée en contact l’été dernier. Depuis la fin du second bail en décembre, qui a mis fin aux paiements du Printemps pour l’occupation des locaux, les discussions sont davantage poussées. Pour une raison très simple : désormais libéré de son bail, l’ex-Printemps est prêt à revivre.
Quelles sont les nouvelles pistes pour le futur du bâtiment ?
Selon Joël Steffen, adjoint au commerce, et Laurent Maennel, manager du centre-ville, plusieurs pistes ont été évoquées avec le gestionnaire. Tout d’abord, sur les trois premiers niveaux [sous-sol, rez-de-chaussée et 1er étage, ndlr], une réflexion est menée sur de l’activité commerciale, en une ou plusieurs parties, mais sans plus de détails.
Déjà, première information : tout le bâtiment n’aura pas d’activités commerciales. Logique, selon l’adjoint au commerce : « C’est cohérent parce qu’il n’y a plus trop d’acteurs qui pourraient se positionner sur une surface commerciale sur tout un bâtiment. » Sur le sujet, Joël Steffen assure que le manager du centre-ville alimente le gestionnaire de différentes pistes et contacts.
C’est un très très bon emplacement, qui ouvre sur différentes séquences commerciales du centre-ville ; il faut réussir à le mettre en valeur.
À partir du 2e étage, pour le moment, la Ville n’a pas d’informations à donner : « Les propriétaires réfléchissent mais ne nous ont pas indiqué leurs pistes privilégiées et ce qui fonctionnerait selon les lieux. » Néanmoins, Joël Steffen évoque une possibilité d’y installer des bureaux, voire du co-living [vivre seul dans son appartement, mais avec des parties communes et des services avec ses voisins, ndlr].
Mais surtout, la Ville veut résolument pousser une idée : celle d’un rooftop. Joël Steffen développe : « On a une ville plate donc on a envie de prendre un peu de hauteur. En plus, il n’y a pas de rooftop dans l’hypercentre. » Une donnée qui ne laisserait pas insensibles les propriétaires, qui étudient ce qui pourrait être fait à l’échelle du bâtiment. Bientôt un rooftop sur l’ex-Printemps ? Si on est loin d’y être, l’idée est en tous les cas alléchante.
Concrètement, quel est le rôle de la Ville dans l’élaboration d’un tel projet ?
Si la Ville pousse notamment pour l’idée d’un rooftop, Joël Steffen et Laurent Maennel ont bien conscience de la réalité de l’action publique dans le domaine privé : « Au départ, quand quelqu’un est propriétaire d’un bien et cherche à le louer, notre périmètre d’action est nul : c’est du privé, ils louent ce qu’ils veulent, à qui ils veulent. » De plus, comme le bail est clôturé, la Ville ne peut pas utiliser son droit de préemption, voté en septembre 2023.
Néanmoins, selon Joël Steffen et Laurent Maennel, la Ville a tout de même son rôle à jouer : « Pour un bâtiment emblématique comme celui-ci, il vaut mieux en discuter en amont avec la Ville, pour amorcer un dialogue avec la police du bâtiment et faire avancer les dossiers plus vite. Il vaut mieux être sur de bonnes bases. » En gros, faire gagner du temps au porteur du projet.
La collectivité peut également avoir de l’influence concernant ce qui se trouvera dans le futur bâtiment, notamment en informant sur les grandes tendances du commerce : « Strasbourg est suréquipée en offres alimentaires, mais est en demande d’offres pour les familles et de loisir. Si on a des porteurs de projet dans ce domaine, on essayera de pousser de ce côté dans les discussions. »
Le propriétaire peut choisir l’orientation qu’il veut, mais nous on peut l’aiguiller sur les grandes tendances du commerce chez nous et en France. Le but, c’est pas qu’il y ait de la vacance dans 2/3 ans.
Exemple : alors que l’hypothèse d’installer un hôtel dans le bâtiment existait, la Ville a informé le gestionnaire que l’offre existante était déjà suffisante ; néanmoins, il pourrait avoir un intérêt à développer d’autres formes de logements, tel que le co-living évoqué plus haut.
À la fin, la décision reviendra au propriétaire : « Charge au propriétaire de faire selon ses contraintes ; il va falloir financer les projets, à eux de faire fonctionner leur tableau Excel. » Néanmoins, Joël Steffen et Laurent Maennel sont confiants : : « Le propriétaire du bâtiment veut continuer à le commercialiser ; il a confiance dans le bâtiment et dans la Ville pour lui donner une nouvelle vie. »
Quelles sont les prochaines échéances ?
En premier lieu, si le bâtiment va bientôt reprendre vie, il fallait déjà s’assurer qu’il soit sécurisé, encore plus après l’accident du 9 janvier dernier. Selon Laurent Maennel, c’est le cas : « Les services de la Ville ont alerté le gestionnaire, qui a fait intervenir un bureau d’études pour analyser et sécuriser la zone, ainsi qu’expertiser le bâtiment. À ce stade, ils nous ont dit que tout était ok. »
Maintenant, il n’y a plus qu’à attendre les prochaines informations qui sortiront par rapport au futur projet. Selon Joël Steffen, il est difficile à ce stade de dire combien de temps prendront les travaux : « Cela dépendra de la rapidité pour retrouver des occupants, mais également de l’ampleur du type de projet. » Quoi qu’il en soit, le géant endormi n’a jamais été aussi proche de sortir de son sommeil.