Formé en 2020, Exotica Lunatica est un projet très présent sur les scènes régionales depuis un an. Se distinguant par des sonorités polyphoniques, quasi-chamaniques, les deux chanteuses nous emmène faire le tour du monde, en nous immergeant dans une musique mêlant chants traditionnels, électro et voix. Nous sommes allé(e)s à la rencontre d’Eleanna et Daphné, ce duo qui propose de brouiller les frontières musicales et physiques, pour se laisser aller à un langage universel : celui de la musique.
Exotica Lunatica, c’est d’abord la rencontre de deux personnalités charismatiques, aux parcours aussi riches que diversifiés. La première, Eleanna Konstanta, est une chanteuse lyrique formée au Conservatoire d’Athènes.
Rapidement, elle se passionne pour la musique traditionnelle grecque, et y trouve une manière de se défaire des carcans étriqués du monde de l’opéra : « Enfant, ma vie c’était l’opéra, je rêvais d’être Maria Callas. Mais ce monde [du glamour] m’a vraiment dégoutée. J’ai eu la chance d’être premier rôle très jeune. J’ai fait des grandes scènes, des grandes salles, mais j’étais vraiment trop jeune pour voir autant de laideur… Il y avait beaucoup de narcissisme, d’ego, et des jalousies dans ce milieu… », se souvient Eleanna.
La deuxième, Daphné Hejebri, est une compositrice strasbourgeoise de musique contemporaine, qui a pu collaborer avec des hauts lieux de la culture actuelle. Elle se passionne depuis toujours pour tous les types de sonorités, qu’elle aime transformer, manipuler, et réorganiser à sa sauce.
Des âmes soeurs artistiques
Les deux artistes se sont rencontrées à Athènes, dans une jam, via des ami(e)s commun(e)s. Une rencontre qui a tout changé dès les premières minutes : « C’était un coup de coeur, et on s’est directement mises à faire de la musique ensemble […]. C’était la première fois de ma vie que je créais vraiment de la musique avec quelqu’un d’autre, parce que moi, j’ai eu l’habitude d’écrire, et de composer en solo. Et là, c’était hyper naturel avec Eleanna, jamais je n’avais eu une connexion artistique si forte. On pense pareil, on a la même sensibilité », raconte Daphné, pleine d’enthousiasme.
« C’est pareil pour moi, nous deux c’est évident », complète son acolyte.
Cette passion musicale dévorante a rapidement donné envie à Eleanna de quitter sa Grèce natale, pour venir rejoindre Daphné. C’était aussi le moment pour elle de couper avec son ancienne vie de chanteuse lyrique, et de donner un second souffle à sa carrière, et à son quotidien : « Pendant la période du covid, j’ai rencontré beaucoup de hippies, et ça a complètement changé ma vision de la vie. »
L’idée de ce duo atypique est née dans un appartement. Et ce qui n’était d’abord qu’un projet privé, caché dans leur cocon, a rapidement eu besoin d’éclore au grand jour et d’être partagé. Tout a commencé par un heureux hasard, qui a précipité le destin d’Exotica Lunatica : « En fait, on devait aller aux Canaries, parce que c’était mon rêve d’y aller ! Et parce qu’il faisait trop froid en France », plaisante Eleanna. « Sauf que la veille, je suis tombée super malade, donc on n’a pas pu prendre l’avion. Et puis, on s’est dit qu’on allait en profiter pour écrire un album en trois semaines », rajoute Daphné.
Les deux acolytes ont donc enregistré leur album, rapidement créé un crowdfunding qui a dépassé leurs attentes, et organisé une release party au Blue Note Café de Strasbourg en juin 2023. Et à partir de là, tout s’est précipité à une vitesse folle. La sauce a pris, tellement vite, tellement fort, qu’elles se sont rapidement retrouvées propulsées sur différentes scènes, partout en France et en Europe.
Une musique sensorielle
Ce qui nous touche dans la musique de ce duo franco-grec, c’est surtout le voyage sonore, dans les racines profondes de la musique. Il suffit de fermer les yeux et de se laisser aller pour divaguer à l’autre bout du monde, sur les mers, en glissant sur des vagues de sonorités aux couleurs chatoyantes.
Heureux qui, comme le public d’Exotica Lunatica, fait bon voyage. Leurs créations, influencées par diverses musiques du monde, européennes ou moyen-orientales, nous entraînent dans une invitation à l’introspection, et à la danse purificatrice, quasi-chamanique : « C’est un peu cliché de dire ça, mais pour nous la musique est un langage universel. Ça parle à l’âme, ça parle au corps avant tout. »
Pour faire appel à l’essence même de la musique, en plus d’utiliser divers instruments comme la guitare, le piano ou encore des tambourins, le duo a mis la voix au centre de sa pratique : « Le seul instrument qui ne te trahira jamais », souligne Eleanna.
De par leurs formations musicales respectives, toutes deux ont appris à jouer avec leurs cordes vocales, et à creuser au fond de leurs capacités. Cette « musique sensorielle », selon les termes de Daphné, leur permet de se connecter au monde et aux autres, en faisant appel aux souvenirs propres de chacun(e). L’âme et le corps sont impliqués.
La connexion entre les êtres et la nature, mais surtout avec leur public, est un des moteurs de leur musique : « On voulait créer du lien avec les gens, on était dans cette démarche de pouvoir prendre tout ce qui nous habite et de pouvoir l’offrir […]. On aime quand les gens nous font un retour de ce qu’ils ont ressenti en écoutant notre musique, parce que ce n’est jamais deux fois la même chose, et ce n’est pas forcément ce à quoi nous pensions. »
Des images qui s’écoutent
Avec Exotica Lunatica, l’œuvre d’art est complète. C’est ainsi qu’au plaisir de faire de belles sonorités, se joint celui d’y apposer de belles images. Toutes deux passionnées de réalisation, elles se sont déjà distinguées par l’esthétisme de leurs clips. On ne peut s’empêcher d’être subjugué(e) par la beauté vertigineuse des paysages, dans lequel évoluent souvent des danseuses qui viennent sublimer les sonorités du duo. Daphné et Eleanna font des morceaux qui se regardent, ou peut-être est-ce des images qui s’écoutent ?
Perfectionnistes, et dans une volonté d’autonomie complète, les deux artistes ne comptent plus les heures qu’elles ont passé à s’auto-former en vidéo. L’image est léchée, travaillée et manipulée. Une force et une passion dont ces deux bourreaux de travail sont très fières, et qui leur a permis d’être là où elles sont aujourd’hui : « On a eu beaucoup de chance, mais on est aussi des passionnées, des travailleuses acharnées qui n’arrêtent jamais de repousser leurs limites. »
Leur dernière performance à Strasbourg ? Un concert aux fenêtres en collaboration avec l’espace Django le 27 juin, rue Thiviers au Neuhof. Autre temps fort de cet été, un concert le dimanche 14 juillet à 19h dans le cadre de l’incontournable festival Jazz à la Petite France. Le rendez-vous est pris.
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Hâte de les revoir en concert! C’est tellement magique!