Originaire de Barr, Laurent Bessot n’est pas tout à fait un artiste dans la norme. Si ses œuvres témoignent une Alsace authentique, folklorique et souvent drôle, elles ont cette particularité d’être réalisées avec ce que notre région produit meilleur. On a échangé avec cet artiste peintre passionné de viticulture, qui a troqué aquarelles et acryliques contre du pinot noir et de la bière brune.
À l’origine, il était pâtissier. C’est au cours de cette première vie que Laurent Bessot découvre un vaste horizon de possibilités : il s’éclate grâce aux colorants alimentaires et au pastillages. Celui qui, depuis l’enfance, a toujours été passionné de dessin envisage bien vite ses pâtisseries comme des œuvres d’art.
Et puis il y a cet artiste de chez lui, Claude Babinger. Celui qui, à cette époque, est déjà un vieux monsieur est bien connu du côté de Barr. Il s’illustre en réalisant ses tableaux au vin blanc et à l’aquarelle. Ces “vignerelles” marquent Laurent Bessot.
“Je ne maîtrise rien !”
C’est dans les années 2000, lorsque son frère rentre des États-Unis après ses études, qu’il se décide à sauter le pas. De l’autre côté de l’Atlantique se développent à ce moment-là les brasseries artisanales.
Le frangin Bessot, inspiré par son expérience américaine, décide de brasser sa propre bière et fonde l’Abreuvoir, brasserie associative à Breitenbach. “Il a brassé une Stout, et là je me suis dit : pourquoi pas dessiner quelque chose avec sa bière ?”
Une fois sèche, cette bière reconvertie en peinture ne donne pas à Laurent Bessot une teinte qui le satisfait. Les tons sont trop pâles. Il a alors l’idée de la faire réduire à la casserole. Le tour est joué : les couleurs sont réhaussées.
Quant au choix de la bière, rien n’est laissé au hasard : “Mes bouchons, je les fait avec de la Licorne Black et de la Guinness. La couleur vient de la torréfaction.”
S’il confesse avoir originellement essayé la Licorne black pour “le côté alsacien”, celle-ci a rapidement montré son intérêt : une fois sèche, la Guinness est matte ; la Licorne Black, elle, revêt un aspect brillant.
Et puis l’aventure artistique prend un autre tournant lorsque des papys alsaciens soulèvent à Laurent Bessot une observation on ne peut plus pertinente : “Ils m’ont dit que c’était totalement bête de dessiner du vin avec de la bière”. Un ami vigneron lui offre alors un carton de pinot noir. Problème réglé.
Là encore, l’artiste peintre fait réduire son vin et a ses préférences : “Je veux toujours les millésimes les plus récents, c’est là où les couleurs sont les plus vives”.
Malgré tout, il demeure tout le temps une part de hasard : “Je ne maîtrise rien ! Un pinot peut violacer, etc. Je ne choisis pas : on m’offre des bouteilles, je prends ce qui vient.”
"Je suis fier de mon coin”
Avec leurs tons rosés, pourpre et beige, les œuvres de Laurent Bessot se reconnaissent au premier coup d’œil. Il y a aussi bien sûr le sujet, celui qui revient le plus souvent. L’Alsace y est beaucoup représentée, le vin souvent, des scènes de vie, érotiques parfois.
Toujours on retrouve cette authenticité, ce côté nostalgique qui transparait par cet aspect ancien, mais aussi par la sincérité des scènes qui se jouent. “L’Alsace est prédominante dans mes dessins ! Je suis fier de mon coin. L’Alsace, le vin, la bouffe !”
On peut, par exemple, suivre les aventures de ses attachants bouchons de liège. Cocasses parfois, qui prêtent à sourire, tout le temps.
Mais attention, qui dit authenticité ne dit pas vieillot : Laurent Bessot détourne également régulièrement des classiques de la pop culture et de la publicité, ou agrémente ses dessins de références modernes et décalées.
Du robot transporteur de Star Wars métamorphosé en moule à baeckeoffe, jusqu’au délicatement parfumé Riesling n°5 by Alsace, en passant par Sangoku qui s’élance à l’assaut des vignobles, tout se revisite… à la mode alsacienne s’il vous plait !
“Bien sûr que le but est de faire sourire !” s’exclame-t-il. Pour atteindre son objectif, il ne se limite pas au conventionnel : “l’Alsace ce n’est pas que des moules à kougelhopf, j’aime le coté décalé donc j’essaie de trouver autre chose que l’Alsace usine à touristes”.
Je n’ai jamais trop réussi à rentrer dans les cases... donc au bout d’un moment je me suis dit : autant faire ça à fond !
"Un paysage peut m'inspirer, ou une anecdote"
Passionné de viticulture et d’oenologie, Laurent Bessot allie donc sa passion et son talent au service de ses œuvres. Ainsi, il se retrouve à parcourir les vignobles français et adapte son art à ses découvertes : “Un paysage peut m’inspirer, ou une anecdote”.
C’est ainsi que celui qui peint principalement au pinot noir en Alsace va tester d’autres appellations au cours de ses vadrouilles : “Je parle aux gens, visite les grands crus, découvre les terroirs : ça m’élargit mes horizons”.
L’été dernier, ses pérégrinations l’ont conduit à la découverte des Côtes de Rhône ou encore dans le Lubéron. Et la pratique de la peinture rencontre ainsi l’artisanat viticole : “Une grappe de pinot noir, lorsqu’on la presse, le jus est blanc. C’est la peau qui donne la couleur. Le contact avec la peau, donc la macération, les anthocyanes. C’est vraiment ça qui m’intéresse.”
En tout cas, le succès est au rendez-vous. Aujourd’hui, Laurent Bessot collabore avec des institutions : de la cérémonie du guide Michelin jusqu’à la carte du Crocodile, en passant par l’auberge Frankenbourg, ses dessins voient du beau monde !
Prochainement, on pourra le retrouver le 25 juin à Ottrott à l’occasion des 70 ans de la Route des Vins, mais aussi cet été à la Foire au Vins.
Pour acquérir une œuvre, ça se passe en ligne, sur ses réseaux. Eh pssst… il fait aussi dans la personnalisation, sur demande ! Allez donc faire un tour du coté d’Instagram ou de son site web !