Hier après-midi c’est sous un ciel très bleu qu’ont défilé plus de 10 000 personnes dans les rues de Strasbourg, contre la réforme des retraites. Pour la première mobilisation prévue en week-end, le cortège a rassemblé les Strasbourgeois(es) au-delà des syndicats, dans la joie et la musique.
Des milliers de personnes. Place Kléber avant 11 heures, c’est l’heure du début de la mobilisation. On se cherche, pancartes en main et bonnets vissés sur les oreilles. Les trams circulent encore et les antiquaires sont installés face à la librairie Kleber, infaillibles malgré les manifestant(e)s qui se faufilent entre leurs tables.
En tête, le cortège est toujours délimité par le cordon des syndicats, suivi de près par les étudiants, survoltés et aux slogans qui rassemblent toujours plus. Parmi eux, des manifestant(e)s aux cheveux blancs prennent un malin plaisir à scander en cœur “Macron t’es foutu, la jeunesse est dans la rue”.
Arrivés au pont Saint Nicolas, quelques fumigènes jaunes s’engouffrent dans les arcades sous un soleil franc. Les passants se couvrent le nez avec leurs écharpes et en profitent pour faire quelques photos de la scène digne d’un film de science-fiction.
Cette fois-ci, les enfants sont de la partie. Certains font des origamis d’avions avec les tracts syndicaux distribués dans le cortège, d’autres portent fièrement de petites pancartes de carton, à bout de bras. Le tout en se dandinant aux rythmes des airs révoltés entamés ici et là.
Du côté de la CFDT, c’est avec la chanson “Motivés, motivés”, émanant de la caravane orange affrétée pour l’occasion, que la manif commence. Sifflets en bouche, les syndicalistes défilent joyeusement et semblent tous connaître les paroles par cœur. Parmi eux, un lapin rose dandine ses oreilles au rythme des basses discrètes.
Autre ambiance à la CGT qui avance lentement en traduisant le discours d’un travailleur allemand, au micro, venu déplorer que de l’autre côté de la frontière, la bataille des retraites s’est soldée par un échec – l’âge légal passera à 67 ans en 2029.
Entre les véhicules syndicaux, la marée humaine qui avance désormais sur le quai Saint Nicolas est plutôt silencieuse, et sombre : beaucoup des manifestant(e)s semblent n’appartenir à aucun syndicat ou organisation.
Depuis sa fenêtre du premier étage d’un immeuble ancien, une dame aux cheveux blancs observe. En restant au même endroit, il y en a pour plus d’une demi-heure de spectacle entre le début et la fin de la manifestation.
La CGT et la CFDT ont recensé 20 000 personnes, Force Ouvrière en a dénombré 10 000 et la Préfecture 5 900. Des chiffres équivalents à ceux de mardi 7 février donc, alors que deux autres mobilisations avaient lieu en même temps à Haguenau et Sélestat.
Les chants résonnent entre l’Ancienne Douane et le musée Alsacien. À cet endroit très touristique de la ville, les passants s’arrêtent et filment le spectacle, commentent les pancartes brandies. Certains sourient, d’autres semblent pressés de traverser la foule, d’autres encore valise à la main ont dû oublier que les trams seraient perturbés le matin.
À la vue du nombre de participants, la CGT annonce rallonger le parcours initialement prévu : il ira jusqu’à la place de la République. Pas de problème : la fanfare entame des airs populaires et attire de plus en plus de manifestant(e)s dans son sillage.
C’est à faible allure que le cortège arrive place de la République. Certains enlèvent les gilets fluorescents et se dispersent très vite, d’autres continuent de marcher direction place Kléber. Comme en fin de matinée, c’est une ambiance calme et un peu flou qui domine : “C’est ici la fin ?”, entend-ton ici et là.
Quelques centaines de personnes continuent à marcher, mais, la faute à la faim ou au froid peut-être, la majorité des manifestants choisit de quitter le cortège. “C’était bien, non ?”, demande une dame à son enfant.