« La fin de l’abondance ». La petite phrase d’Emmanuel Macron n’est que le dernier exemple d’une réalité qui arrive en courant : les prix de l’énergie explosent et l’hiver va être rude. Le prix de gros du mégawatt/heure a par exemple battu un nouveau record, atteignant les 1000 €, contre 85 auparavant. À Strasbourg et dans l’Eurométropole, il a été décidé de prendre les devants et de réfléchir à plusieurs options pour plus de sobriété énergétique. On fait le point.
« On se trouve dans une crise énergétique sans précédent ». Pia Imbs n’y va pas par quatre chemins en préambule de la conférence de presse sur la hausse des prix de l’énergie. La présidente de l’Eurométropole énonce la « gravité de cette situation qui impacte les états, les collectivités locales à tous les niveaux, les entreprises et surtout la vie quotidienne de nos concitoyens ».
Une hausse du prix de l’énergie qui pèse sur le budget de la Ville et de l’Eurométropole
Pour l’Eurométropole, la donne est la même : la hausse des prix de l’énergie va peser de plus en plus sur son budget. Le coût du gaz a par exemple connu une hausse de près de 500 % à l’achat pour la métropole, représentant une hausse de 4.5 millions d’euros dans le budget 2022, et de plus de 10 millions dans celui de 2023. Largement au-delà des prédictions des collectivités strasbourgeoises et eurométropolitaines, qui s’attendaient davantage à un doublement. Pour ne rien arranger, Pia Imbs « s’attend à la hausse exponentielle de l’électricité, dont le marché est très tendu ».
Pour la Ville de Strasbourg, la situation se révèle en tout point similaire. Selon Jeanne Barseghian, cette situation « nous place aujourd’hui dans une situation inédite, sans commune mesure avec toutes les situations que l’on a pu avoir ces dernières années ». La maire de Strasbourg alerte que « nous sommes dans un moment de grande bascule », avant d’ajouter : « Mais c’est une bascule prévisible car les alertes du GIEC nous alertent sur cette situation depuis des décennies ». Très offensive à l’encontre du gouvernement et le chef de l’État, elle déclare également : « On doit accélérer sur les questions énergétiques, sur la dépendance aux énergies fossiles ». Avant de conclure : « Il va falloir qu’on sprinte sur un certain nombre de sujets ».
Éclairage public, énergies renouvelables et chauffage des bâtiments : les premières hypothèses d’une sobriété énergétique à de l’Eurométropole
Très clairement, Strasbourg et l’Eurométropole veulent accélérer sur le sujet de la sobriété énergétique, dont on va beaucoup entendre parler ces prochains temps. Pia Imbs rappelle ce qui a déjà été fait sur le territoire en termes d’énergie renouvelable, comme des réseaux de chaleur rénovés qui devraient garantir un prix stable de l’énergie. Plus généralement, le territoire souhaite « voir comment d’une manière plus concrète aller sur davantage de sobriété énergétique ». La présidente de l’Eurométropole dévoile quelques hypothèses, pas encore arrêtées à ce stade, pour former un « cadre très rigoureux pour l’ensemble des territoires » :
- Démarrer la période de chauffe le plus tard possible
- Faire respecter scrupuleusement la température réglementaire dans les bâtiments publics à 19 degrés
- Réfléchir sur une fermeture de certains bâtiments eurométropolitains, très énergivores et peu utilisés
- Promouvoir un guide d’éco-geste autour de la sobriété pour les habitantes et habitants
- Réduction de l’éclairage public
- Renforcer le télétravail
À la Ville, les objectifs de Jeanne Barseghian suivent la même logique : « Il faut montrer l’exemple aux habitantes et habitants sur ce qui est de nos propres politiques publiques ». La maire de Strasbourg évoque la température moyenne des bâtiments à 19 degrés, même dans les écoles où d’ici le mois d’octobre, tous les bâtiments auront une sonde, pour pouvoir régler les températures. Elle précise que, pour les crèches, la température irait plutôt autour des 21 degrés.
Par ailleurs, la maire n’exclut pas des « mesures plus radicales », comme interdire les enseignes lumineuses par arrêté municipal. Elle évoque également le sujet de la publicité numérique, en s’y déclarant fortement opposée mais en rappelant le contrat qui les lie avec JC Decaux. En somme, des objectifs qui devront faire baisser de 10% « les consommations d’énergies globales sur la Ville et sur l’Eurométropole de Strasbourg, aussi longtemps que cette crise écologique nous impactera ».
« Il va falloir apprendre à vivre sobrement » : une nouvelle réalité qui débute à Strasbourg
La donne est importante pour Strasbourg, surtout financièrement. En effet, le budget énergie équivaut à 12 millions d’euros pour la Ville cette année. Si rien n’est fait, Syamak Agha Babaei annonce que le budget énergie de l’année prochaine serait aux alentours de 61 millions d’euros. Ce serait donc 240 millions en plus à trouver au cours du mandat. Cette nouvelle réalité implique donc à la municipalité de faire des choix, et principalement du côté de l’adaptation du service public. Les musées fermeront ainsi deux jours par semaine au lieu d’un (on vous en parle plus en détails prochainement) et d’autres changements sont sans doute à venir. L’objectif reste que la Ville puisse protéger les plus vulnérables, malgré la crise. Jeanne Barseghian a d’ailleurs annoncé qu’il n’y aurait pas d’augmentation du prix des cantines scolaires pour 2022. Un surcoût qui sera donc assumé par la Ville de Strasbourg
Forcément, cette réalité pèse sur la politique événementielle de la Ville. Jeanne Barseghian a par exemple annoncé qu’ils renonceraient cette année à leur événement « Rues libérées » sans voiture. Néanmoins, pas de panique : le marché de Noël aura bien lieu. Consciente de devoir désamorcer des polémiques avant même qu’elles aient le temps d’arriver sur la scène politique locale, la maire a rassuré son monde : « Le marché de Noël aura lieu mais on travaillera sur sa sobriété et sur son eco-responsabilité ». Elle évoque par exemple réfléchir à éteindre l’éclairage public là où il y a déjà des illuminations. Mais en tous les cas, selon la maire, le constat est clair : « Le monde d’après doit devenir une réalité dès maintenant ».
La hausse des prix de l’énergie touche tout le monde, même l’Eurométropole et Strasbourg. Les collectivités réfléchissent ainsi à plusieurs scénarios et hypothèses afin d’aborder cette période très difficile qui s’annonce de la meilleure manière possible. Ce n’est clairement pas la dernière fois que l’on parlera de sobriété énergétique mais le point positif réside dans le fait que nos collectivités veulent d’abord donner l’exemple.