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À la quincaillerie de la Krutenau, Patrick Daté est le génie du quartier

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Depuis plus de douze ans, Patrick Daté, la soixantaine tout rond, trouve des solutions, répare les lampes et encadre les tableaux des habitants de la Krutenau. Le propriétaire et tenant de la Quincaillerie de la Cité, au 52 rue de Zurich, est l’un des personnages emblématiques du quartier.


Avec son piercing à l’arcade droite, sa chemise à fruits et ses lunettes rondes et rouges, Patrick sourit. « Je peux continuer à travailler pendant l’interview ? », demande-t-il doucement. Ce samedi matin vers 11h, il lui reste encore quelques colis à trier derrière son comptoir. Une playlist légère et un peu groovy habille les murs surchargés d’objets en tous genres, sur fond de bip-bip de machine à scanner les arrivages du jour. Rencontre.


Une vraie caverne d’Alibaba

“Lorsque les gens entrent dans ma boutique, ils la comparent à une caverne d’Alibaba”, raconte Patrick. Des casseroles sont accrochées au plafond, entourées de poubelles neuves, au-dessus de pots de fleurs en terre posés sur le sol et en dessous de vis de toutes tailles. Difficile de dresser une liste exhaustive des produits que vend le quincailler. Au fond, derrière un comptoir, des colis entassés méthodiquement côtoient des produits de nettoyage multicolores et des ustensiles de cuisine perfectionnés. “Parfois, on dit même que c’est la maison du bonheur”, sourit-il.

Quelques minutes après le début de l’interview, un homme arrive, tuyau à la main. “Il me faut un petit embout comme ça”, dit-il en désignant une espèce de vis métallique. Ni une ni deux, Patrick disparaît derrière les étagères et fouille ses tiroirs. Après avoir hésité entre deux tailles de boulons, il ne trouvera pas la pièce exacte pour cette fois, mais le client repartira avec un nouveau tuyau. La quête n’aura pris que quelques minutes, l’homme sera satisfait.

Outils de jardin, vis de toutes tailles, tournevis et pinces intrigantes… “Je sais à peu près exactement où tout se trouve”, explique le quincailler en désignant un meuble ancien avec une centaine de tiroirs. “Je peux me tromper deux fois environ, mais je connais tout par cœur”. Impressionnante performance dans un décor où tout semble minutieusement rangé à sa place et attendre d’être trouvé.

Pour les moments de canicule, Patrick est paré. “Il va faire tellement chaud cette semaine que j’ai affiché les températures”, explique-t-il en désignant sa vitrine. Sur plusieurs feuilles A4 imprimées en couleur, les prévisions affichent jusqu’à 38 degrés pour le week-end à venir. À côté, une pile de ventilateurs est disposée dans différentes gammes de prix.


Personnage emblématique de la Krutenau depuis 20 ans

Quant au nom de son échoppe, Patrick dit n’avoir aucun mérite. “Je tenais une boutique d’encadrement à côté, puis j’ai sympathisé avec le propriétaire de la quincaillerie, et de fil en aiguille je la lui ai racheté il y a douze ans”, explique-t-il. “Elle existe depuis 70 ans”. Dernière trace de sa vie d’avant : à droite de l’entrée, derrière des machines à moudre le café et des tas de pinces à linge enroulées dans du plastique, une table nappée avoisine un présentoir de cadres. “Je faisais de l’encadrement d’objet”, explique-t-il.

Pendant huit ans, il tenait une boutique où il présentait les objets apportés par les clients. “C’est artistique : je fabriquais des caissons, des passe-partout, de belles moulures…”. À la quincaillerie, désormais “ça reste de l’encadrement basique”, précise-t-il. Les clients viennent avec leur image, il y ajoute le carton de fond, le verre en avant et la baguette… et voilà le travail. Plus rien à voir avec son activité précédente. “Mais ça me plaît toujours”, assure-t-il.

Encadrement ou quincaillerie, Patrick est toujours resté dans son quartier de la Krutenau, “c’est comme un village dans la ville”. Aux premières loges de la transformation du quartier, il dit cependant ne pas avoir observé de grands changements ces vingt dernières années. “Les loyers augmentent et il y a beaucoup d’étudiants, mais c’est surtout il y a plus de 30 ans que le quartier était différent”. Sa source : Jean-Luc, l’ancien patron de la quincaillerie qui lui contait un quartier mal famé et très propice aux bagarres entre voyous.


Commerçant de proximité, au service de clients qui le lui rendent bien

Le rôle de Patrick, “c’est d’être commerçant”, estime-t-il très simplement. Ce qu’il aime surtout, c’est le contact. “C’est magique”, murmure-t-il. “Je rends service et les gens me le rendent bien, tous les jours j’ai des clients qui viennent ils repartent avec ce qu’ils cherchent”, poursuit-il simplement.

En deux heures, plus d’une vingtaine de personnes ont passé la porte ouverte de la quincaillerie ce samedi matin. Le mot d’ordre d’une matinée ensoleillée, c’est la convivialité. Le soixantenaire fait des blagues : “Ce rouleau de skotch ? 300 euros”, dit-il très sérieusement. Le client rit doucement, il paiera finalement moins de 5 euros.

Pour le patron de la quincaillerie, “il n’y a pas de demande étonnante”. La seule à laquelle il pense, c’est cette dame qui un jour, lui a demandé de l’huile bronzante. “Ça je n’en ai pas, j’ai du savon de Marseille par contre”, sourit-il, l’air un peu désolé. Pas de cosmétique donc à la quincaillerie, mais tout le reste. Il estime le taux de satisfaction des personnes qui passent le voir à 98%, environ. Preuve s’il en faut, ses clients viennent de partout, habitués ou non. “Certains viennent d’Eckbolsheim, de la Wantzenau ou de Geispolsheim, parce qu’ils savent qu’ils trouveront ce qu’ils cherchent”.



“Je ne fais pas ça pour l’argent”

Peu après avoir repris la boutique, Patrick se diversifie et devient point relais, en décembre 2009, et “ce n’est pas une mince affaire”. Chaque jour, ce sont environ 80 colis qui lui sont livrés et qu’il doit scanner, annoter et ranger. “Lorsque le client arrive, ça doit être rapide”, explique-t-il. En plus de ceux qu’il reçoit, “les gens m’en rapportent aussi pour des retours : parce que la taille ne va pas, ou la couleur, ou la matière”.

“C’est un énorme travail”, avoue-t-il. “C’est un service que je rends, car gagner de l’argent avec ça, on oublie”. Et pour cause : par colis traité, Patrick est rémunéré… 30 centimes. Mais les gens le lui rendent bien assure-t-il.

“Sur dix clients qui viennent chercher un colis, trois m’achètent quelque chose”, estime-t-il. Et Patrick n’hésite jamais à prendre le temps pour les aider. Seule chose qu’il ne fera pas : aiguiller une personne qui, après être allé se fournir dans un magasin franchisé pour son objet, viendra lui demander comment s’en servir. Il se permettra aussi une remarque si le colis que vient chercher un client contient ostensiblement un objet qu’il vend lui-même, mais toujours sur un ton mi-sérieux. “Parfois les gens me disent que s’ils avaient su, ils me l’auraient acheté directement”. Car impossible pour Patrick de proposer des prix aussi bas que sur internet.

quincaillerie krutenau
© Laurence Georges / Pokaa

Malgré le cap de la soixantaine passé, pas question pour Patrick de penser à la relève. “Tant que la tête fonctionne et que les jambes me portent, je suis ici et je continue à travailler”, justifie-t-il en pointant son visage. Et son travail n’est, selon lui, “pas fatiguant ni usant”.

Ouverte sept heures par jour du mardi au samedi, la quincaillerie est l’une des six dernières du centre-ville de Strasbourg. Et à écouter Patrick, c’est un terrain de jeu inépuisable : “C’est comme si j’avais un jouet dans les mains, et que je jouais tous les jours”.

Laurence Georges

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Commentaires (2)

  1. J’adore ces quincailleries où on trouve de tout !
    C’est là que j’ai trouvé mes stores d’extérieur, confectionnés par l’ancien exploitant…
    Longue vie à ces commerces !

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