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Massacre gastronomique : on a testé pour vous les recettes alsaciennes version industrielle

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En matière de gastronomie, l’Alsace peut se vanter d’un patrimoine qui explose à peu près tous les (nutri)scores. Choucroute garnie, spätzles, mannala, baeckeoffe ou tarte flambée… Rien que le temps de finir cette phrase, on a pris 11 kilos et on est devenu diabétique. Mais c’est qu’elles sont bonnes nos spécialités locales, toutes, sans exception. Ceci grâce à un savant calcul que voici : gras² x gras + gras / sucre² = très bon.



Toutefois attention : ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit ! Ce qui est vrai pour la choucroute du Kammerzell ou le kouglof d’une bonne pâtisserie, ne l’est plus forcément pour les équivalents qu’on va trouver dans certains de nos supermarchés. Il faut dire qu’on voit des sacrées choses dans nos rayons. Quoi ? Qu’est-ce que vous dites ? On peut fourrer une bretzel avec de la crème pâtissière ? On peut compresser une choucroute dans une boite d’aluminium ? Et appeler ça du même nom, en toute impunité ? Cessez donc ces calomnies !

Photo du paradis
© Samuel Compion pour Pokaa

Je refuse de croire qu’un baeckeoffe peut sortir d’autre chose que d’un beau plat en terre cuite. Si ma grand-mère voyait ça, bordel ! Mais qu’à cela ne tienne, j’ai l’âme aventurière ces temps-ci. De côté, les préjugés, les idées reçues, mes préceptes culinaires, au diable tout ça ! « On ne dit pas qu’on n’aime pas si on n’a pas gouté » disait ma mère. Il y a quelques jours, j’ai affûté mes papilles entre deux verres de rouge et un tacos XXL, j’ai mis à jour mon carnet de vaccinations et souscrit à une bonne assurance vie, puis j’ai porté mes bijoux de famille pour tester quelques merveilles de la gastronomie alsacienne en version indus’. La pure, la vraie, celle qui daube le plastique, celle qui ne ressemble pas à la photo, celle dont on ne soupçonne même pas l’existence. J’ai fait ça pour le monde, pour la science aussi, pour nos ancêtres, mais surtout, j’ai fait ça pour vous, au cas où l’idée vous passerait un jour par la tête.

À chaque fois, j’ai noté le goût, l’apparence, le rapport qualité-prix et pour finir, j’ai attribué une note finale de non respect, 10 étant un gros mollard sur les recettes de nos aïeux, 0 étant une reproduction fidèle et irréprochable des fameuses recettes. Ne vous amusez pas à faire le calcul des moyennes, elles sont fausses, parce que si les industriels se permettent toutes sortes de choses, il n’y a pas de raisons que je suive les règles. Que le voyage commence et surtout, bon appétit.

© Samuel Compion pour Pokaa


La choucroute

Saint Graal de notre culture culinaire, que l’on doit à nos amis allemands, la choucroute a de quoi réconforter tous les cœurs du monde, de quoi réchauffer tous les hivers. Mais qu’en est-il de sa version industrielle ?

Mon choix s’est tourné vers la marque Auchan : pas la pire, pas la mieux. Avec son petit prix de 2,30€, son packshot plutôt appétissant et son nutri score pas dégueu (B) ; le met a de quoi séduire sur le papier. Malheureusement dès l’ouverture, c’est le drame. Avec ses douces effluves de chou qu’on aurait fait mariner dans la pisse pendant quatre ou cinq ans, sa gelée brillante et son aspect si compact qu’on se demande comment ils ont fait pour rentrer ce truc la dedans, l’expérience tourne rapidement au calvaire.

Après quelques coups de paume à l’arrière de la boîte pour libérer la bête, la voici finalement qui pointe le bout de son nez, nonchalante, visqueuse… brillante ?? Enfin passons, un mouchoir imbibé de parfum collé contre mon nez, j’explore timidement du bout de ma fourchette ce triste chantier, cette potée non identifiable qui s’est fait rouler dessus. Entre deux manifestations gastriques qui tentent de m’avertir de ne pas m’y aventurer, j’essaie de deviner l’origine et le type des morceaux de viandes (Est-ce de la viande ? Rien n’est moins sûr), mais rien à faire. Je refuse d’accepter que ces espèces de knackis à la texture de quenelle soient des saucisses. Vous savez pourquoi une knack s’appelle une knack ? Parce que quand on croque dedans, ça fait « knack » (fallait pas chercher loin bande de malins). Et bien là, ça ne faisait rien du tout, quedal, nada, walou. Je vous passe le détail des petits bouts pré-mâchés que je n’ai toujours pas pu identifier. L’expérience fut aussi désagréable que courte, j’ai encore des choses à vivre, encore des choses à faire, ce n’est pas l’heure de mourir ce n’est pas non plus la manière. Cette choucroute Auchan est à la cuisine alsacienne ce que Booba est à la musique classique : rien.

© Samuel Compion pour Pokaa


Le Baeckeoffe

Certes, le Baeckeoffe n’est plus si courant sur les cartes de nos restaurants, mais il demeure un classique impérissable de notre cuisine. Encore une fois, niveau composition on ne s’écarte pas trop de ce qui caractérise l’Alsace à table, à savoir de la viande et des patates. Ce Baeckeoffe de la marque Auguste Goepper a attiré mon attention pour deux raisons : d’abord parce que c’est le seul Baeckeoffe indus’ que j’ai trouvé en quatre supermarchés, ensuite parce qu’en lisant les ingrédients qui figurent au dos, je n’ai aperçu aucun truc louche. Pas de E45d2 ou autres noms de code douteux à l’horizon. De la viande, du vin, du sel, du poivre, des légumes, c’est tout. Alors forcément, le bon vivant tatillon que je suis a envie de voir où se cache la couille.

Mais quelle ne fût pas ma surprise de constater que ce bon vieux Auguste a plus d’un tour dans son sac, c’est même le grand gagnant de notre test. À réchauffer au bain-marie ou dans une terrine au four, ce baeckeoffe est certes industriel, et on est certes bien loin de celui qui embaumait toute la maison de grand-mère certain dimanche de notre enfance, mais il tient toutefois ses promesses. Les saveurs sont plus ou moins là, la viande a une texture de viande, l’odeur est de la partie… Non, bravo, mais 5,5 quand même pour le principe, et parce que c’est moi qui décide de toute façon.

© Samuel Compion pour Pokaa


Le pâté en croûte

Parfois grand oublié de nos bonnes vieilles spécialités, le pâté en croûte n’en demeure pas moins une petite frappe bien efficace à l’heure de l’apéro, quand il est exécuté dans les règles de l’art, au Gewurztraminer, avec de la bonne viande et une croûte généreuse. Fourré au foie gras, à la vigneronne, encore un peu tiède avec une bonne quille, j’en ai les poils qui se hérissent. Mais c’est une toute autre histoire pour ce bon vieux pâté en croûte Les Régions à Table qui m’a coûté la forte somme de 4€ et des brouettes.

De l’apparence à l’emballage, on comprend vite vers quelle destination on s’envole. Et si l’important n’est pas la chute mais l’atterrissage, ce dernier se passe à la lecture des ingrédients, et attention, il y a des turbulences. Une liste plus longue que la bible, succession de formules de sorcellerie, crachat dans la gueule de l’art et la manière alsacienne, pour un résultat détonnant. Une pâte entre la guimauve et la pâte à crêpes, une gelée comme vous n’en avez jamais vu et une viande recomposée qui donne l’impression d’avoir été mâchée, re-mâchée puis compactée, pour un voyage sensoriel inédit. Une expérience qui valait le coup d’être vécue.

© Samuel Compion pour Pokaa


La Tarte Flambée Pierre Schmidt

La tarte flambish de Pierrot se place sur une note moyenne « passable ». Sans prise de risque réelle, (on est quand même sur un gros basique). Cette mini flamm’s précuite a tous les arguments pour séduire sur le papier, sauf le principal. Quand on mange une tarte flambée, entre le moment où la crème est déposée sur le fond de tarte et celui où la tarte chaude et croustillante entre dans la bouche, il doit se passer maximum 5 minutes. Là, on dirait que la crème a été étalée à une époque où on dansait encore en boîte de nuit.

On notera aussi une pâte un poil épaisse, à deux doigts de faire passer le produit dans la catégorie « pizza à l’alsacienne » qui lui aurait valu un zéro directo de la part du jury (moi), mais on y échappe de peu. Pour le reste, pas de quoi casser trois pattes à un canard : c’est mou, c’est chaud, et pour le côté croustillant on repassera clairement. Un produit qui pète un peu au-dessus de son cul, même si les saveurs sont là. Encore heureux mon neveu j’ai envie de te dire, parce que si t’arrives à te foirer avec quatre ingrédients, t’es pas le couteau le plus aiguisé du tiroir comme on dit par chez moi. Déso, mais c’est une note sous la moyenne pour toi Pierrot.

© Samuel Compion pour Pokaa

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