« Je termine une vidéo, je te rappelle ». Près de quarante minutes plus tard, Simba, alias Benjamin Klein rappelle effectivement et s’excuse : « les vidéos ça prend toujours plus de temps qu’on le pense ». Ce samedi de janvier, l’influenceur strasbourgeois vient de boucler une vidéo sur un tout jeune rappeur qui a écrit un texte en soutien à la Palestine. Sur le réseau social, la vidéo a cumulé des centaines de milliers de vues en quelques jours seulement.
Des vidéos qui touchent une génération connectée
Simba, Benjamin Klein de son vrai nom, s’est lancé sur TikTok pendant le premier confinement. Sa toute première vidéo était une blague faite à sa mère, pour faire marrer ses potes. « Ça a fait des vues et je me suis dit pourquoi pas en faire une deuxième, puis une troisième ». Aujourd’hui, le Strasbourgeois de 24 ans cumule un demi-million d’abonnés sur TikTok et plus de 32.000 personnes le suivent sur Instagram, l’autre réseau social où il est aussi très actif. Dans de courtes vidéos, l’influenceur va à la rencontre des Strasbourgeois, sous la forme de micro-trottoirs. « Dans toutes les villes il y a un mec qui fait ça. À Strasbourg, il n’y avait personne. J’ai tenté, ça a marché », explique Simba. En mode détente, il va à la rencontre des passants et leur demande de reconnaître le drapeau d’un pays ou raconter leur pire honte, de dresser la liste de leurs meilleurs mangas, de leurs rappeurs préférés ou du prénom le plus attirant. « On rigole, on parle de tous les sujets, mais jamais je n’aborde la sexualité », précise Simba. À chaque fois, le cadre est simple : l’influencé est filmé au téléphone par Guitch, son acolyte, et apparaît face caméra à côté des personnes qu’il interroge. Dans sa main, un téléphone lui sert à prendre le son.
« Mon but c’est de montrer des choses utiles, pas mes vacances »
Avec ses vidéos, Simba s’adresse à toute une génération, la génération « Z », celle née entre 1997 et 2010. Des jeunes âgés entre 25 et 11 ans nés dans le numérique, qui maîtrisent les codes et le langage des réseaux sociaux. Mais il n’y a pas que les sujets LOL. Simba s’empare aussi de sujets plus sérieux devenus médiatiques comme le harcèlement scolaire. « Une maman m’avait contacté sur Instagram car sa fille en était victime. Elle souhaitait faire bouger les choses », se souvient Simba. Résultat : une vidéo où l’influenceur demande à la jeune fille de raconter, à visage découvert, les humiliations et harcèlements qu’elle a subis. « Les 15-25 ans sont les plus nombreux à me suivre, alors parfois j’en joue. J’essaie de traiter de sujets qui peuvent toucher tout le monde. Mon but c’est de montrer des choses utiles, pas mes vacances », explique le jeune homme.
Il met sa notoriété et sa visibilité au service de causes qui le touchent comme les animaux abandonnés. Simba a récemment réalisé une vidéo sur la SPA de Strasbourg et selon lui, plusieurs chats ont été adoptés après son passage au refuge. Avec ses vidéos « micro-talents », l’influenceur a aussi à cœur de mettre en lumière les artistes de Strasbourg comme L’Irlandais, rappeur de Hautepierre qu’il a filmé deux fois. « Lui, il est talentueux », reconnaît Simba qui ajoute : « Moi, j’aime bien donner de la force ».
Une collecte de 17.500 euros pour une famille à la rue
En septembre 2020, il publie une vidéo dans laquelle il filme une famille, des parents et leur enfant, à la rue. Il se souvient : « C’est un ami à moi qui m’avait parlé d’eux. On est allé voir ce dont ils avaient besoin et je me suis dit que ça pourrait être pas mal de faire une vidéo qui déboucherait sur une cagnotte ». Dans la vidéo, la mère, d’origine algérienne, le père, burkinabé, et leur fils de huit ans racontent qu’ils sont à la rue depuis quelques jours et ont sollicité la mairie pour un hébergement d’urgence. En 24 heures, la vidéo fait le buzz et dépasse le million de vues sur TikTok. En moins d’une semaine, Simba récolte plus de 17.000 euros.
« J’ai aussi enregistré quand on appelait les associations pour leur parler cette famille qui avait besoin d’un hébergement d’urgence. Elles nous ont remballé. Ça, ça n’a pas plu. Et pourtant je n’ai fait que refléter la réalité », pose amèrement, le jeune homme. La famille aurait été prise en charge par la mairie de Strasbourg et leur enfant, scolarisé.
Bloc-notes, tatouage et intérim
Simba a grandi à Strasbourg et kiffe sa ville. À son blaze, il a ajouté deux lettres, « QS », pour quartier suisse, le coin de la Krutenau où il a grandi. D’abord étudiant en fac d’éco-gestion, il a tout lâché. « J’ai enchaîné des jobs en intérim à droite, à gauche, en usine », se souvient Simba. « J’ai toujours voulu être sur les réseaux et j’ai toujours kiffé faire de la vidéo. Quand j’avais 15, 16 ans, j’avais une chaîne YouTube. C’était un truc de gamer, je me filmais en train de jouer aux jeux vidéo. J’avais 5.000 abonnés… c’était pas mal à l’époque ! », se marre-t-il.
Il ne faut pas chercher bien loin pour trouver l’origine de son surnom, Simba, tiré du dessin-animé Le Roi Lion. « J’ai toujours bien aimé ce film et ce nom. Je me suis même fait tatouer le dessin de Simba sur l’avant-bras il y a trois ans », sourit-il. Il consacre près de huit heures par jour à son activité numérique, toujours accompagné d’un bloc-notes dans lequel il note toutes ses idées de vidéos. Considéré comme un macro-influenceur (+ de 100.000 abonnés), les réseaux sociaux sont devenus son lieu de travail et il tire des revenus d’un fond de créateur mis en place par TikTok. « C’est pas des mille et des cent, mais j’arrive à en vivre », admet le Strasbourgeois.
Aujourd’hui, Simba est reconnu dans la rue et les plus jeunes n’hésitent pas à l’aborder. « Des collégiens, des lycéens », liste Simba. « C’est gentil mais une fois, j’étais avec ma mère, des petits voulaient une photo et elle comprenait pas ce qu’il se passait ! », sourit-il. Se considère-t-il réellement comme un influenceur ? « Quand on me demande mon métier, je réponds que je fais des vidéos », pose-t-il, simplement. Il reconnait qu’il a davantage pris confiance en lui et assume de s’exposer ainsi sur les réseaux. Il a récemment célébré sur TikTok et Instagram son demi-million d’abonnés. Et pourtant : « 500.000 abonnés, c’est énorme, mais je suis pas satisfait », lâche Simba. « C’est un cercle vicieux, tu veux toujours plus ». Car lui s’est donné un objectif : « je dirais à ma mère ce que je fais quand ce sera sérieux et que j’aurais un million d’abonnés ».
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Ophélie Gobinet