Pendant le confinement, la question est revenue plusieurs fois sur les groupes Facebook créés pendant la crise : est-ce que les prix des produits de première nécessité, particulièrement les légumes et produits frais, ne se seraient pas envolés ? Tout au long du confinement, l’association de consommateurs UFC-que choisir a relevé les prix de ces principaux produits sur les drives de dix grandes enseignes. Leur enquête révèle une hausse du ticket de caisse moyen pendant la quarantaine. Plusieurs facteurs sont à l’origine de cette hausse, dont une plus grande part de produits français et locaux en rayons.
Des changements d’habitudes liés aux pénuries
Les premières semaines du confinement, cette hausse semble surtout avoir été liée aux pénuries de certains produits de première nécessité. Le jeu de l’offre et de la demande a fait augmenter le prix des œufs, des pâtes, et surtout de la farine, dont le prix a bondi de 14% au cours de la quatrième semaine de confinement. Mais l’augmentation du prix du panier, à ce moment-là, était surtout liée aux pénuries de produits d’entrée et de moyenne gamme. Le nombre de références a drastiquement baissé en rayon (-38% pour la farine), obligeant les consommateurs à se reporter sur des produits plus onéreux.
Des produits français et locaux plus chers
À la fin du confinement, selon UFC que choisir toujours, les pénuries se sont tassées, mais pas les prix. Ceux des légumes notamment étaient encore en hausse, par rapport à l’avant confinement. Par exemple, pendant la septième semaine du confinement, (du 27 avril au 2 mai), les produits de première nécessité ont augmenté de 3,20% par rapport à la période du 2 au 7 mars. Sur cette même période, les fruits et légumes ont augmenté de 11%. À l’origine de cette augmentation : une plus grande part de produits français et locaux dans les rayons. « Toutes les enseignes de la grande distribution se sont engagées à accompagner les filières françaises, explique Thierry Desouches, en charge de la communication du groupe Système U. Elles étaient dans une situation malheureuse : il n’y avait plus d’export, plus de restauration… ».
Mais ce soutien a en effet eu un coût pour les consommateurs : « Ce n’est pas forcément très intuitif, mais les produits français et locaux sont souvent plus chers », poursuit-il, citant l’exemple de l’agneau français, plus cher que celui produit en Nouvelle-Zélande qui fait pourtant beaucoup de chemin pour arriver sur les rayons français.
Côté fruits et légumes, les fraises et les asperges sont de bons exemples de produits pour lesquels les filières françaises ont été privilégiées : « Les fraises françaises sont d’une qualité supérieure, poursuit Thierry Desouches, mais pour ce qui est du prix par rapport à la fraise espagnol, il n’y a pas photo. Elle est deux fois plus chère. C’est une question de charges, et notamment de charges salariales. »
Un prix plus juste pour les producteurs locaux ?
« Plutôt que de s’attaquer à l’augmentation des prix, on pourrait parler de prix plus rémunérateurs et plus justes pour les producteurs, tempère de son côté Yannick Wir, animateur sud alsace de l’Interprofession des fruits et légumes d’Alsace. Les producteurs sont dépendants des cours des fruits et légumes. On parle vite des augmentations, mais pas des moments ou les cours sont si bas que certains producteurs en viennent presque à jeter… Je dirais qu’actuellement, le cours est plus satisfaisant. »
Les producteurs ont pourtant connu des difficultés pendant le confinement. « La main d’œuvre qualifiée n’a pas pu venir travailler, avec la fermeture des frontières, détaille Yannick Wir. Il y a eu de la main d’œuvre volontaire, mais c’est un travail difficile. Quatre personnes arrivent le matin, mais il y en a trois qui repartent le soir. » Une situation qui a joué sur les coûts de production : « En Alsace, ils ont tendance à être plus élevés. Il y a peu de grosses fermes et beaucoup de petites exploitations. Les coûts de production, dans la région, seront toujours plus important que dans le sud de la France par exemple, ou les exploitations sont plus grandes. »
Plus de produits locaux dans nos grandes surfaces augmentent donc les prix (liés à des charges salariales plus importantes et des coûts de production), mais offrent aussi la possibilité à nos agriculteurs et producteurs du coin de mieux se rémunérer. Car moins d’importation des produits depuis l’étranger leur permet de ne pas être en concurrence avec des produits moins chers pour le consommateur, certes, mais aussi moins qualitatifs.
A. ME