Le début de la grève générale programmé le 5 décembre fut une réussite pour les syndicats et tous les militants présents. Plus de 10 000 personnes ont manifesté à Strasbourg contre la réforme des retraites, la “casse de l’hôpital public”, ou plus généralement, contre le “gouvernement et le système actuel.” Une vitre a été cassée au Rivetoile, des personnes ont été blessées par des coups de matraques et 3 individus ont été arrêtés et emmenés au poste de police, dont un alors qu’il était en train de participer à une chorale.
“On avait plus vu ça à Strasbourg depuis longtemps” déclare une manifestante en regardant la foule au loin. “Nous sommes plus de 10 000 !” s’exclame Jacky Wagner, secrétaire général de la CGT 67, à l’arrivée du cortège place de la République vers 14h45. La place est déjà bien pleine mais l’arrière de la manif’ est encore au niveau du Palais universitaire. Le cortège était parti de la place de la Bourse vers 13h30. À l’unanimité pour les personnes présentes, le 5 décembre est un “excellent début” pour la grève générale. En France, la CGT estime à 1,5 million le nombre de personnes dans la rue. Le ministère de l’intérieur annonce 806 000.
La réforme des retraites a attisé la colère. Celle-ci n’est pas encore totalement définie, mais elle est déjà copieusement critiquée : “L’âge du départ à la retraite va augmenter, mais en plus le système par points permettra de calculer le montant des retraites de manière différente, plus uniquement sur le salaire en fin de carrière mais sur toute la vie. Les jeunes précaires d’aujourd’hui seront donc très affectés“ explique un manifestant dans la foule.
Plus qu’une grève contre la réforme des retraites
Mais les revendications sont bien plus larges que les retraites. Des représentants des hospitaliers d’Alsace sont présents : “On ne peut plus assurer les soins. La semaine dernière près de Mulhouse, une personne a dû accoucher sur la route car il n’y a plus de maternité à Altkirch. Aux urgences, on arrive plus à gérer tout le monde, c’est de pire en pire. Un infirmier de 29 ans s’est suicidé dans notre CHU la semaine dernière. On en a marre que ce gouvernement nous fasse la morale.”
Des enseignants, des cheminots, des métallurgistes, des commerçants, des privés, des écolos, des pompiers, des retraités, des travailleurs sociaux, ou encore des fonctionnaires sont présents. Une gilet jaune prend la parole : “On va continuer le combat, on est de plus en plus nombreux et on est en train de le créer ce rapport de force. Organisons-nous tous et toutes pour renverser ce gouvernement et prendre notre vie en main. On pourrait vivre dans un monde meilleur, de l’argent il y en a, il est juste extrêmement mal réparti. Les riches sont de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres. Nous on veut vivre et plus survivre en enrichissant des patrons.”
Le Rivetoile visé
Vers 15h30, plusieurs milliers de personnes décident de continuer la manifestation. Un black bloc se crée devant le cortège. La rue résonne au rythme de slogans anticapitalistes et antifascistes. Les militants se dirigent vers la Fac de droit, entrent dans le bâtiment, et réclament la grève générale à l’université. Des étudiants sont présents dans le cortège.
Les manifestants se dirigent ensuite vers le Rivetoile. “Il faut rentrer dedans”, lancent les manifestants. “C’est le symbole du capitalisme.” Une porte est cassée, les manifestants entrent, cris des slogans et ressortent. “On est bien d’accord, on attaque personne physiquement, le but c’est de montrer qu’on est pas d’accords avec le capitalisme. C’est ce système politique qui est violent.” Après de petites échauffourées avec la police, le cortège se dirige vers le quartier de l’Esplanade.
Une personne embarquée pour avoir participé à une chorale
Vers 17h15, le cortège arrive place d’Austerlitz. Des individus se dirigent vers un cordon de gendarmes mobiles en direction du marché de Noël. Ils lèvent les mains pour montrer qu’ils n’attaquent pas. Les forces de l’ordre chargent et gazent copieusement dans la rue d’Austerlitz. Plusieurs personnes sont blessées par des coups de matraques à ce moment-là.
La manifestation se disperse ensuite petit à petit sur la place. Une chorale féministe qui a participé à l’animation toute la journée chante “A la huelga general”, qui signifie “à la grève générale” en espagnol. Des policiers de la brigade anti-criminalité (BAC), des gendarmes mobiles et des CRS sont là en nombre. Tout à coup, plusieurs policiers se jettent sur une personne qui participe à la chorale en faisant de la musique avec un seau. Ils l’embarquent.
Dans la foulée, les manifestants protestent, l’un d’entre eux est plaqué au sol et arrêté pour outrage. Une autre personne a été arrêtée d’après nos informations. Toutes sont allées au commissariat.
De très nombreux manifestants promettent un mouvement social d’une ampleur inédite. Le prochain rendez-vous est fixé par les gilets jaunes samedi pour une manifestation. Des assemblées générales seront organisées dès le 6 décembre par différents syndicats ou organisations politiques.