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Tranches de vies migrantes : photoreportage sur le camp du quartier Gare

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Le saviez-vous ? Ces six derniers mois, une centaine de migrants majoritairement originaires d’Europe de l’Est, parmi lesquels de nombreux enfants en bas-âge, ont campé derrière la gare de Strasbourg. Choqués par “le manque d’information de la population locale” sur cette situation qui se déroulait à seulement un kilomètre à vol d’oiseau de la Cathédrale, les deux photographes Thomas Cytrynowicz et Simon Wohlfahrt s’y sont rendus plusieurs fois avant la fin de l’été pour témoigner de ce qui s’y passait encore jusqu’à mardi, où la municipalité est venue démanteler le camp rapidement, discrètement, à la surprise des associations…

  • La situation depuis mai

Alors que l’État est dans l’obligation légale d’héberger les demandeurs d’asile pour la durée de la procédure (que la plupart des occupants du camp avaient déclenché d’après plusieurs associations qui sont intervenues sur place), plusieurs familles se sont installées, entre mai et octobre, aux abords de la rue du Rempart faute d’une proposition de logement décent… En réponse au déficit d’hébergements, le Tribunal administratif de Strasbourg avait sommé l’Office français de l’immigration et de l’intégration de trouver une solution pour quatre des migrants du camp, une famille qui comptait une fillette épileptique en fauteuil roulant. Une décision aussi positive que cache-misère, puisqu’avec ou sans fauteuil roulant, la vie sur le camp était indécente. Et elle l’est restée pendant six mois…

Sur deux terrains coincés entre les rails du réseau ferroviaire et les anciennes fortifications allemandes, les familles se sont partagées quelques tentes aussi abîmées que surchargées mais aussi quatre malheureux sanitaires, un unique point d’eau et une absence de douche. En août, une fillette du camp âgée de 10 ans a été hospitalisée à l’hôpital de Hautepierre pour un cas suspecté de tuberculose : elle s’était mise à cracher du sang… Jusqu’ici, la situation est globalement ignorée par le grand public malgré ces quelques articles sortis au cours de l’été, et donc pendant les vacances.

Pendant six mois, les familles se sont partagés deux à quatre malheureux sanitaires.
Retrouvez toutes les images de Thomas Cytrynowicz et Simon Wohlfahrt en fin d’article.

  • La situation depuis mardi

Ce mardi 3 octobre, quelques jours après que le tribunal des référés ait condamné tous les occupants à libérer les lieux, propriété de la Ville, sous deux mois, la municipalité soutenue par la préfecture est intervenue pour démanteler le camp. Après les avoir recensée, la Ville a proposé aux familles volontaires un hébergement temporaire dans un gymnase aménagé (le Centre sportif Sud) qu’elle a réquisitionné jusqu’à vendredi, ainsi que dans une partie d’un hôpital militaire (l’Hôpital militaire Lyautey). “Et après ?” demande Valérie Suzan, la présidente de l’association Strasbourg Action Solidarité qui a assisté, impuissante, à l’opération express dont elle n’avait pas été prévenue, comme le relaie le journal L’Alsace.

Dans cet article du média Rue89 Strasbourg, qui est parvenu à se rendre dans le gymnase alors que plusieurs associations qui intervenaient sur le camp s’en sont vues refuser l’accès par une équipe de sécurité, on apprend que les familles volontaires sont reçues par des travailleurs sociaux qui les enregistrent et les orientent selon les situations. Les demandeurs d’asile en France devraient se voir proposer une solution d’hébergement sur le territoire (surprise, on aurait donc des places disponibles pour ces personnes qui vivent dehors depuis six mois…) et les autres, ceux qui sont entrés dans l’Union Européenne en passant par un autre pays, y seront reconduits pour y formaliser leurs demandes.

La ville a proposé aux familles volontaires un hébergement temporaire.
Retrouvez toutes les images de Thomas Cytrynowicz et Simon Wohlfahrt en fin d’article.

  • Les questions qui restent en suspens

On tique à la mention répétée du volontariat des familles, quand on sait que le camp a été détruit par la municipalité, les affaires accumulées par les associations ayant été collectées puis jetées dans une benne, et les terrains ayant été labourés pour empêcher tout retour… Le volontariat s’applique-t-il vraiment aux familles menacées par une précarité plus grande encore, ainsi dépouillées de leur confort déjà extrêmement sommaire ? Toujours dans l’article de Rue89, la municipalité déclare que 70% des migrants du camp ont accepté d’être transférés au gymnase : quid des 30% restants ? Les déboutés d’asile, qui se sont vus nier le statut de réfugiés, pouvaient-ils volontairement choisir d’être renvoyés dans les Balkans, où les six Républiques fédérées de l’ex-Yougoslavie se tirent violemment la bourre sur fond de prétentions territoriales et de fractures religieuses ?

Autant de questions qui restent sans réponses, tandis que plusieurs gérants de bars, situés en dehors de la zone du Marché de Noël dont la mise en place ne saurait tarder, rapportent la présence grandissante de sans-abris, qui déclarent avoir été chassés du centre-ville. Ces gérants assurent que la gendarmerie ne répond plus, depuis plusieurs jours, à leurs appels d’alerte sur la situation… L’heure serait-elle au ménage dans l’auto-proclamée Capitale de Noël ?

  • Un photoreportage comme dernière trace de leur passage

Choqués par “le manque d’information de la population locale” sur la situation de la rue du Rempart, les deux photographes Thomas Cytrynowicz et Simon Wohlfahrt, accompagnés de Slaven Hadžić comme interprète, s’étaient rendus plusieurs fois sur place le mois dernier pour documenter le quotidien du camp, dans le but de faire connaître cette réalité locale aux strasbourgeois. Leurs images douces laissent à voir un environnement brutal, et s’accompagnent de témoignages difficiles sur la vie des familles abandonnées par les services sociaux. On pense notamment à ce père qui, devant les livres scolaires mouillés par la pluie de son fils, dit sa honte de ne pas pouvoir payer un toit à sa famille alors qu’il travaille. Après le démantèlement rapide de ce camp éloigné des regards, et pourtant si proche du centre-ville, le photoreportage de Thomas et Simon reste la dernière trace de la situation déplorable réservée aux migrants de la rue du Rempart ces six derniers mois, dans l’indifférence générale…

Thomas Cytrynowicz
www.thomascytrynowicz.com
Instagram : @thomcytry

Simon Wohlfahrt
www.simonwohlfahrtblog.wordpress.com
Instagram : @wo_sim

Retrouvez la série sous forme de livret ici.

Tahiri, Albanie : “Mais où est-il ? Pourquoi l’ont-ils emmené alors que nous sommes en règle ?” se demande Tahiri, à propos de son compagnon et père de ses enfants, qui a été emmené au Centre de rétention administrative à Metz.

Dragan, son dossier médical et Slavica, Serbie : “Depuis que nous avons fui Belgrade, mon état de santé s’est détérioré. Je fais des crises d’angoisses, en plus d’avoir des problèmes gastriques chroniques et une infection cutanée…” nous raconte Dragan, qui craignait pour sa vie et celle de sa compagne Slavica alors que la mafia locale rackettait leur épicerie. “Nous sommes partis pour le Luxembourg, puis l’Allemagne, et maintenant la France, mais on ne sait pas ce qui va se passer.”

Le père : “On est en France, putain ! On est en France et regarde comment on vit, elle est où l’entraide ? Je bosse moi, et je ne peux même pas offrir un toit à mes gamins.”
Le fils : “Ce sont mes affaires scolaires. Il a plu, alors sous la tente, tout a été mouillé. Mais ça va, ça commence à sécher.”
Le père : “C’est la honte, j’ai déjà du faire un appel aux dons pour les affaires scolaires, et maintenant tout est trempé. Je ne peux pas encore demander aux gens.”

Dede, Kosovo : “On espère travailler, c’est tout ce qu’on demande. D’où on vient, il n’y a pas de travail, c’est la misère. On est prêt à faire n’importe quoi.”

Ava, Serbie : “Ça fait un mois que je suis ici avec ma famille, on est cinq à dormir là-dedans. La ville sait qu’on est ici, mais personne ne nous dit comment trouver une tente, alors on s’est débrouillés avec ce qu’on a trouvé.”

  • Point agenda

Mercredi prochain, l’association Food not Bombs qui intervenait sur le camp organise une distribution de nourriture sur le thème de la solidarité envers les réfugié-e-s ; l’occasion de faire évoluer son regard et de nourrir ses réflexions sur la condition qui leur est réservée…  Toutes les informations sont disponibles sur l’événement Facebook.

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