Alors que l’été démarre sous une grisaille presque automnale, le spectre du Covid continue de rôder autour de nos existences tout juste déconfinées. À tel point qu’un variant prénommé Delta pourrait bien gâcher la fête estivale, jusqu’à provoquer une quatrième vague, scrutée de très près par le gouvernement. On fait le point sur les différentes composantes du sujet, afin de bien savoir de quoi on parle. Et surtout, pour ne pas trop s’inquiéter.
C’est possible d’avoir un résumé succinct ?
Comme l’article qui suit est assez dense, si vous ne deviez retenir que quelques éléments, ce serait ceux-ci :
- Olivier Véran, ministre de la Santé, a déclaré dimanche 4 juillet « qu’une vague est possible dès la fin Juillet », dressant le spectre d’une quatrième vague.
- Un rappel que l’été dernier, libéré et délivré, avait accouché d’un automne reconfiné.
- Les causes de l’inquiétude ? Un variant Delta plus contagieux qui continue de se répandre en France, à côté d’une campagne de vaccination qui s’essouffle depuis quelques semaines.
- Néanmoins, les vaccins protègent très largement contre le variant Delta, et encore davantage contre les hospitalisations et les décès. Ce qui fait que la quatrième vague synonyme de reconfinement pourrait ne pas arriver.
- Pour assurer ses arrières, le gouvernement envisage de rendre obligatoire la vaccination pour les soignants, voire les salariés. Pour la population française en général, se discute l’extension du pass vaccinal à plus de lieux. Tout comme le fait de rendre les tests PCR et antigéniques payants.
Qu’est-ce qu’a dit Olivier Véran ?
En ce début de semaine, une petite phrase du ministre de la Santé a fait le tour des médias. En cause ? La possibilité d’une quatrième vague, dès la fin juillet. Cette phrase provient d’un tweet d’Olivier Véran dimanche 4 juillet à 18h38, qui dit verbatim que « Depuis 5j, le virus ne baisse plus, il réaugmente. A cause du variant delta qui est très contagieux. L’exemple anglais montre qu’une vague est possible dès la fin Juillet. »
Une phrase qui a agité le monde médiatique, mais qui a aussi, en ce mois de juillet pour l’instant bien pluvieux, remis un petit coup sur la tête de celles et ceux qui espéraient ne plus avoir à faire à des informations négatives concernant l’épidémie. Néanmoins, on va le voir ci-dessous, cette phrase possède quelques points sur lesquels il est important de préciser les choses.
Les signaux d’inquiétudes
Forcément, ce genre de petites phrases fait poindre de l’inquiétude. Celle d’un retour à la vie sous Covid. Sans bars, ni restaurants ou lieux culturels. Et encore moins de liberté. Si cette année les craintes d’une potentielle quatrième vague se font plus fortes plus tôt, c’est pour plusieurs facteurs.
Souviens toi l’été (et l’automne) dernier
Le premier suit le principe du « chat échaudé craint l’eau froide ». L’an dernier, à partir du 11 mai, puis du 2 juin, on était ressortis du premier confinement avec l’envie de retrouver notre vie d’avant. On avait dansé, on avait fêté, on avait profité. Et, progressivement, le masque en extérieur s’était imposé, avant de voir la deuxième vague nous frapper en pleine figure, résultant en des couvre-feux et un nouveau confinement.
Dès lors, alors que les vacances d’été viennent à peine de débuter, l’inquiétude est importante au sein du gouvernement concernant une éventuelle quatrième vague. C’est ce qu’a voulu indiquer Olivier Véran sur Twitter, mais également Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement et responsable du service après-vente lorsque les ministres sortent des petites phrases alarmistes. Le porte-parole du gouvernement, présent ce lundi 5 juillet à la matinale de France Inter, a affirmé qu’une quatrième vague dès la fin juillet est “possible“ : “Depuis un peu moins d’une semaine la tendance semble s’être inversée, l’épidémie regagne du terrain ; le variant Delta double presque chaque semaine, cette situation peut être les prémices d’un redémarrage très rapide.”
Fast and Furious : Variant Delta Édition
Pourquoi cette quatrième vague serait-elle possible dès la fin juillet, alors que, contrairement à l’an dernier, on a désormais une campagne vaccinale qui avance ? On évoquera le rôle de la vaccination plus loin mais, grosso modo, le devenir ou non de cette quatrième vague sera le résultat d’une course de vitesse entre la vaccination et le variant Delta, anciennement appelé variant indien. Et ce dernier n’est clairement pas là pour enfiler des perles. Déjà, il possèderait des mutations qui permettent au nouveau coronavirus de s’accrocher plus facilement aux cellules de notre corps. En d’autres termes, le variant se propage plus facilement que l’original. Et, en effet, il serait, selon les premières recherches disponibles, 60 % plus contagieux que le variant Alpha, anciennement variant anglais.
Dès lors, il n’est pas étonnant de voir que sa propagation s’accélère en France. Sur la semaine du 26 juin au 2 juillet, soit les derniers chiffres disponibles, 39,7 % des tests positifs l’étaient au variant Delta en France. Une semaine auparavant, on était à 19,3 %, contre 9,6 % la semaine d’avant. Pour le Bas-Rhin, ce sont 54,5 % des tests positifs l’étaient au variant Delta.
Une question de vaccination
Dans cette course de vitesse, l’inquiétude du gouvernement s’accentue en partie à cause du léger patinage de la campagne de vaccination. Après des mois où les injections s’enchaînaient à une vitesse déconcertante, et notamment avec le pic du mois de mai, celles-ci ont désormais atteint un plateau depuis plusieurs semaines. En effet, selon les données de Santé publique France reprises par France Info, au 30 juin, le nombre quotidien de premières injections, en moyenne glissante, était de 167 524. Il dépassait 450 000 lors du pic du mois de mai.
Selon les derniers chiffres disponibles sur CovidTracker, ce sont actuellement 33 961 307 de Français qui ont reçu au moins une dose de vaccin, soit 50,69 % de la population. En outre, 22 813 043 Français sont désormais double vaccinés, soit 34.05% de la population. Toujours selon CovidTracker, près de 35 millions de personnes, soit un peu plus de la moitié de la population française, devraient être totalement vaccinées d’ici la fin du mois. Tandis que près de 40 millions seront partiellement vaccinées à cette date, soit près de 60 % de la population totale, mais surtout autour de 75 % de la population adulte. Reste à savoir si cela suffira à gagner la course.
Les raisons de garder espoir
Ces perspectives de quatrième vague, avec tout ce que ces mots représentent comme annonciateurs de mauvaises nouvelles, ne sont pas réjouissantes. Néanmoins, il y a des choses à relativiser.
Le patient anglais
Dans son tweet, Olivier Véran s’appuie sur l’exemple anglais, régulièrement montré en exemple en termes de couverture vaccinale, pour montrer les risques du variant Delta lorsqu’il deviendra majoritaire. En effet selon le site Our in Data, environ 50% de la population britannique est complètement vaccinée, contre 34,05 % en France. Et pourtant, les contaminations repartent fortement à la hausse, avec 16 400 contaminations par jour sur la dernière semaine.
Sauf qu’il y a quelques éléments, souvent mis sous silence, qui ne sont pas précisés par le ministre de la Santé. Tout d’abord, et cela mériterait d’être affiché en majuscules et en gras, être vacciné ne veut pas dire qu’on ne pourra plus être contaminé par le Covid. Ensuite, il y a l’efficacité des vaccins. Environ 2/3 des Anglais seraient vaccinés à l’AstraZeneca et 1/3 au Pfizer-BioNTech. Et selon des documents du SAGE (le conseil scientifique du gouvernement anglais), relayés par Le Monde, et datant du 9 juin, si deux doses du vaccin Oxford AstraZeneca ne sont efficaces qu’entre 55% et 71% pour prévenir les infections au variant Delta (contre entre 73% et 85% pour les vaccins Pfizer et Moderna), cette efficacité monte jusqu’à 90% pour prévenir les hospitalisations et 96% pour éviter les décès.
En fait, quelles seraient les conséquences d’une quatrième vague ?
On en arrive logiquement au dernier point : pour le moment, les Anglais ont bien connu une hausse des contaminations mais elle ne s’est pas traduite par une grande hausse des hospitalisations et donc des décès. Et ce, malgré une couverture vaccinale reposant beaucoup plus sur un vaccin finalement moins efficace que ceux utilisés majoritairement en France. En effet, toujours selon CovidTracker, près de 26 millions de Français ont reçu une dose de BioNTech, tandis que 16 millions ont reçu les deux doses. Selon les chiffes exprimés ci-dessus, ces personnes-là sont donc protégées entre 73 et 85 % contre les contaminations au variant Delta, mais également largement contre les hospitalisations.
On peut donc légitimement se poser la question de quoi on parle lorsque l’on parle d’un risque de quatrième vague ? Ici, Olivier Véran semble l’aborder sous le prisme des contaminations. Pour le moment, même si le variant Delta circule de plus en plus, les contaminations restent à un niveau plutôt bas. Cela va sans doute augmenter dans les semaines à venir, considérant les quelques ralentissements de la vaccinations. Néanmoins, la quatrième vague, et les perspectives de serrages de vis sanitaires qu’elle pourrait appeler, ne sera considérée en tant que telle uniquement au niveau des hospitalisations, réanimations et décès. Rappelons que, au lundi 5 juillet, 7 806 personnes étaient hospitalisées en France (117 dans le Bas-Rhin), dont 1 077 en réanimation (16 dans le Bas-Rhin). Si, on le sait désormais, les choses peuvent évoluer très vite, pour le moment nous n’y sommes pas encore.
Finalement, qu’est-ce que le gouvernement peut faire ?
C’est le dernier point sur lequel il faut revenir. Avec ce tweet, tout sauf anodin, Olivier Véran pointe du doigt les risques du variant Delta, de manière à booster la campagne de vaccination. Mais quelles sont les marges de manœuvre du gouvernement en la matière ?
Rendre obligatoire la vaccination
La question s’est posée la semaine dernière : faut-il et peut-on rendre la vaccination obligatoire ? Déjà, précisons qu’en France, comme le liste le ministère de la Santé, 11 vaccins sont actuellement obligatoires pour les moins de 2 ans. Contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, la coqueluche, la rougeole, les oreillons, la rubéole, l’hépatite B, le méningocoque C, le pneumocoque et l’Haemophilus influenzae.
Ensuite, rendre obligatoire la vaccination pour tous ne semble pas être la piste envisagée par le gouvernement, parce qu’elle poserait de nombreux problèmes juridiques et éthiques. Néanmoins, il envisage la vaccination obligatoire pour les soignants. Gabriel Attal a même évoqué “une sérieuse possibilité“, ce lundi 5 juillet sur France Inter. Par ailleurs, on apprend sur RMC que la possibilité de la rendre obligatoire en entreprise est actuellement discutée.
Élargir le pass sanitaire, tout en rendant les tests payants
En plus de ces hypothèses, le gouvernement pourrait également élargir les lieux souscris au pass sanitaire. Encore évoquée par Gabriel Attal sur France Inter ce lundi 5 juillet, l’idée serait que “le périmètre du pass sanitaire pourrait évoluer“, afin de s’ouvrir à “davantage d’activités ». Pour l’instant, ce n’est qu’à l’état d’ébauche. Toutefois, si l’on se réfère à Israël, modèle de la vaccination, on peut voir que ce dernier laissait seulement les personnes doublement vaccinées se rendre au restaurant, à la piscine, ou aller à la salle de sport, à la faveur d’un « badge vert ».
Cette « incitation à la vaccination », pour contourner l’obstacle légal de l’obligation, se doublerait de la fin de la gratuité des tests dits de confort, pour les PCR et les antigéniques. On vous présentait les implications derrière cette réflexion dans cet article, mais pour résumer la logique, on pourrait dire : si les tests deviennent payants alors que la vaccination est gratuite, plus de personnes choisiront la vaccination.
En somme, il est fort probable qu’une quatrième vague frappe la France cet été. Néanmoins, l’heure n’est clairement pas à s’imaginer repartir en confinement ou à voir bars, restaurants et lieux culturels fermer leurs portes à nouveau. La vraie question sera de savoir si cette vague concernera seulement les contaminations, ou alors les hospitalisations. De la réponse à cette question décidera sans doute notre rentrée. En attendant, le gouvernement envisage de multiples pistes afin de booster la campagne de vaccination. On n’est pas à l’abri de quelques surprises.