C’était le grand moment de cette fin du mois d’avril. Ce mardi après-midi, le Premier ministre Édouard Philippe a présenté le plan du gouvernement pour préparer le mieux possible une étape très importante de l’histoire de notre pays. Un plan qui veut suivre deux mantras. Le premier : vivre avec le virus, agir progressivement et adapter localement. Le second : protéger, tester, isoler. Un plan qui va dicter nos prochaines conditions de vie dans les semaines à venir. On vous en dit plus.
Les annonces à retenir
Si vous n’avez que quelques minutes entre votre skypéro et votre soirée film, voici les quelques informations majeures qui sont sorties de la présentation du Premier ministre.
- Si le confinement se relâchait, que le nombre de cas journaliers ne se trouverait pas dans la fourchette prévue, si les indicateurs ne sont pas au rendez-vous, le déconfinement ne se déroulera pas le 11 mai.
- Si le déconfinement s’effectue, la phase qui s’annonce durera jusqu’au 2 juin. Une nouvelle phase qui amènerait à la réouverture des cafés et des restaurants.
- Les lycées ne rouvriront pas de tout le mois de mai. Les collèges sont repoussés jusqu’au 18 mai, et dépendront des appréciations locales.
- Le port du masque sera recommandé voire obligatoire dans les commerces, qui rouvriront le 11 mai.
- Le dispositif du chômage partiel est maintenu jusqu’au 1er juin.
- Il sera possible de circuler librement, sans attestation, à partir du 11 mai. Sauf dans des déplacements qui seraient à plus de 100km du domicile. Les exceptions ? Motifs impérieux, familiaux ou professionnels.
Un déconfinement par étape et local, se basant sur divers indicateurs
« Nous allons devoir vivre avec le virus. Et apprendre à nous en protéger. » Édouard Philippe le rappelle d’emblée : on n’en a pas fini avec le coronavirus. Le confinement a porté ses fruits, mais le risque d’une seconde vague « qui viendrait frapper un tissu hospitalier et qui provoquerait un reconfinement incarne un danger sérieux. » Dès lors, il va falloir reprendre notre vie selon des modalités qui nous permettent de maîtriser la propagation du virus.
L’élément géographique jouera un rôle crucial. En effet, la circulation n’est pas uniforme dans le pays. Il est donc nécessaire de prendre en compte ces différences dans la façon dont le déconfinement sera réalisé. Comme laisser aux autorités locales la tâche d’adapter la stratégie nationale selon les circonstances. En ce sens, Édouard Philippe rencontrera dès demain mercredi les préfets et élus locaux puis les partenaires sociaux jeudi.
Par ailleurs, une carte des déplacements sera établie. Concrètement, cela signifie que le 7 mai, des indicateurs seront analysés dans chaque département : le taux de nouveaux cas dans la population sur une période de sept jours, les capacités hospitalières régionales en réanimation, et les capacités locales de tests et de détection des cas contacts. Selon ces résultats, présentés département par département par Santé Publique France à partir de ce jeudi pour guider la préparation locale du déconfinement, certains seront en vert, d’autres en rouge, ce qui signifierait un déconfinement plus strict. En Alsace, il y a des chances que l’on soit dans cette deuxième catégorie et Roland Ries n’a pas tardé à réagir.
Une doctrine : protéger, tester et isoler
Le but recherché est d’éviter d’être infecté et donc d’infecter les autres. Le port du masque sera obligatoire ou recommandé dans certaines situations. Le Premier ministre l’assure : « Il y aura assez de masques le 11 mai. » 100 millions de masques chirurgicaux sont en ce moment produits par semaine et 20 millions de masques grands publics le seront à partir de la semaine prochaine. Encore une fois sur le sujet, Édouard Philippe déclare : « Nous soutiendrons les collectivités territoriales pour l’achat de masques en prenant en charge 50 % du prix des masques lavables. » Il y aura également une distribution de masques aux plus précaires.
Au niveau des tests, ce seront 700 000 tests virologiques/semaine. Le Conseil scientifique dit à ce stade que les modèles prévoient entre 1 000 et 3 000 cas nouveaux par semaine. À partir du 11 mai il faut que les tests soient « faciles et rapides ». Enfin, il faudra isoler au plus vite pour casser les chaînes de transmission. « L’isolement n’est pas une punition, c’est une mise à l’abri. Il doit être expliqué, consenti et accompagné. » Il repose ainsi sur la responsabilité individuelle. Le but : isoler dans des hôtels réquisitionnés ou chez soi, avec confinement de 14 jours.
La problématique des écoles
C’est sans aucun doute le sujet le plus épineux à traiter pour le gouvernement. Les écoles auraient dû rouvrir le 11 mai selon les annonces d’Emmanuel Macron, mais force est de constater que le gouvernement s’est mélangé les pinceaux comme vous le faisiez en arts-plastiques au collège.
Tout d’abord, les lycées ne rouvriront pas de tout le mois de mai. Un nouveau point d’étape sera organisé début juin. L’ouverture à ce stade est d’ailleurs très peu probable. Pour les collèges, c’est repoussé pour le moment, jusqu’au 18 mai. Pour cette date-là, le tout devra se dérouler dans des conditions sanitaires strictes : pas plus de 15 élèves par classe pour les collèges, masques pour les collégiens et les professeurs et surtout, selon la situation locale de chaque territoire.
En revanche, il y aura une réouverture progressive des maternelles et écoles primaires, à partir du 11 mai dans toute la France, sur la base du volontariat. Les crèches aussi, par 10 enfants maximum. Le port du masque sera prohibé en maternelle, mais il y aura une mise à disposition de masques pédiatriques pour des cas particuliers en école élémentaire.
Des entreprises qui devront favoriser le télétravail et des commerces qui rouvriront le 11 mai
Pour relancer l’activité économique, il faut relancer les entreprises. Néanmoins, les besoins sécuritaires et sanitaires poussent le Premier ministre à déclarer que le télétravail devra être maintenu au maximum dans les trois prochaines semaines pour limiter le recours au transport public et les contacts : « Il n’y a pas sur ce sujet un avant et un après 11 mai. » De son côté, le dispositif du chômage partiel durera jusqu’au 1er juin.
Tous les commerces rouvriront à compter du 11 mai, sauf les cafés et les restaurants. Pour les marchés, une problématique importante dans notre ville strasbourgeoise, ils seront en général autorisés, sauf si les maires et les préfets en décident autrement. Il faudra respecter un cahier des charges strict. Là encore, difficile d’y voir clair.
Le port du masque sera recommandé pour le personnel et les clients dans les commerces lorsque les mesures de distanciation sociale ne seraient pas optimales. Un commerçant pourra d’ailleurs subordonner l’accès au magasin au port du masque.
Les transports en commun
Sur ce sujet, Édouard Philippe ne se voile pas la face : « Il est certain que les trois semaines à venir seront difficiles. » Le but national concernant les transports en commun est double. D’abord, remonter au maximum l’offre de transports urbains. Ensuite, faire baisser la demande. Pour cela, il y aura le télétravail, l’étalement des horaires, mais aussi une demande aux Français que les transports en heure de pointe soient réservés à ceux qui travaillent.
Une chose est sûre néanmoins : « Le port du masque sera rendu obligatoire dans tous les transports. » Les opérateurs devront, au moins pour les trois semaines à venir, s’organiser pour permettre, même dans le métro, de respecter les gestes barrières. Le Premier ministre détaille : « Il faudra par exemple condamner un siège sur deux, favoriser par des marquages au sol la bonne répartition sur les quais, se préparer à limiter les flux en cas d’affluence.”
Enfin, en termes de transports nationaux, l’objectif affiché est de réduire les déplacements aux seuls déplacements familiaux, impérieux ou aux déplacements professionnels. Édouard Philippe le précise : « Le jeudi de l’Ascension sera bien férié, mais je dis clairement aux Français que ce n’est pas le moment de quitter son département pour partir en week-end. »
“Un régime de liberté dans lequel on doit fixer des exceptions” : notre vie sociale à l’heure du déconfinement”
Enfin, le dernier sujet invoqué est celui de la vie collective et sociale. Édouard Philippe évoque « un régime de liberté dans lequel on doit fixer des exceptions. » Tout d’abord, il sera possible à nouveau de circuler librement, sans attestation, sauf si ces déplacements se trouvent à plus de 100km du domicile. Il sera également possible de faire du sport en plein air, à plus d’un kilomètre du domicile tout en respectant les gestes barrières, mais pas dans des lieux couverts. Les sports collectifs ou de contact sont également toujours interdits.
D’ailleurs, triste nouvelle pour les fans de sport, et notamment de football, ainsi que de festoches et grands événements culturels : les grandes manifestations sportives, les festivals, en résumé tous les événements qui brassent plus de 5 000 personnes ne reprendront pas avant septembre. C’est donc la fin de la Ligue 1 version 2019/2020 pour le Racing. Qui, par la même occasion, restera à jamais le dernier vainqueur de la Coupe de la Ligue.
Les parcs et jardins ne pourront ouvrir que dans les départements que l’épidémie ne frappe pas trop durement. Par mesure de précaution, les plages ne seront pas accessibles jusqu’au 1er juin. Et les rassemblements de personnes seront limités à 10 sur la voie publique ou dans des lieux privés. De leur côté, les médiathèques, les bibliothèques et petits musées rouvriront leurs portes le 11 mai. Contrairement aux grands musées, théâtres et cinémas comme les salles de concert, qui eux, ne seront pas rouverts.
L’après déconfinement
Enfin, le Premier ministre conclut son long discours d’une heure sur la suite. « Je proposerai au Parlement d’adopter prochainement une loi qui, en plus de prolonger l’état d’urgence sanitaire au-delà du 23 mai, peut-être jusqu’au 23 juillet, autorisera la mise en œuvre des mesures nécessaires à l’accompagnement du déconfinement. Ce projet sera soumis à l’examen du Conseil des ministres samedi prochain et sera soumis au Sénat et à l’Assemblée nationale la semaine prochaine. » On pourrait donc avoir un état d’urgence sanitaire prolongé de deux mois supplémentaires, avec une promesse de mesures floue.
Enfin, sur ce sujet, l’application StopCovid était sur toutes les bouches. Le but de cette application hautement controversée, est de retranscrire les chaînes de transmission quand on a croisé une personne qui pourrait être atteinte du virus, mais qu’on ne la connaît pas. Le débat sur l’application a néanmoins été repoussé ultérieurement. Il mérite en effet un « débat spécifique, ainsi qu’un vote spécifique. »
Cette annonce du plan du déconfinement national n’a pas forcément apporté toutes les réponses escomptées, mais il a néanmoins le mérite de décrire avec plus ou moins de précisions les conditions. Désormais, à Strasbourg et en Alsace, il faudra observer et analyser des décisions plus locales à venir, qui viendront probablement du conseil consultatif formé autour de Roland Ries. En attendant, courage et prenez soin de vous !