C’est bientôt le printemps, les fleurs vont commencer à sortir de terre, et parsemer le monde d’une palette multicolore. Mais celle sur laquelle on a un œil cette année, c’est Tulipe (ou Monsieur Tulipe, au choix), un artiste strasbourgeois installé à Paris. Il sort, ce mois-ci, son troisième projet, et prépare un concert dans une salle mythique parisienne, La Boule Noire. Nous sommes allé(e)s discuter avec cet artiste pétillant, pour parler de liberté, de fleurs et de l’Alsace, où il aime revenir régulièrement.
Tulipe, c’est l’alter-ego d’Hugo, chanteur-acteur-saltimbanque plein de ressources du haut de ses 29 ans : « Tulipe, c’est celui qui fait ce que moi je ne serais pas capable de faire. Je me dédouane avec lui. Par exemple, ça m’aide qu’il soit là avant de monter sur scène, je rentre dans sa peau à lui, et j’y vais ! »
Une collaboration qui permet à Hugo, qui se dit plus introverti qu’il n’y paraît, de pouvoir se lâcher. Tout part d’un surnom autour duquel l’artiste a créé tout un univers, et surtout d’une blague qui est devenue très sérieuse ! « Il y a une espèce de métaphore aux femmes, aux relations, quelque chose liée au symbole de liberté : parce que ça fait parler, un homme à fleurs. »
La liberté, c’est bien ce qui anime Tulipe. Son style musical est frénétique. On y trouve des morceaux avec des textes rappés très profonds qui sortent de ses tripes, et parfois des morceaux très club, très dansants, tartinés de sarcasme : « Je dirais que j’ai un style fleuri ! Il y en a de toutes les couleurs ! J’essaie de transmettre des émotions que j’ai mis dans mes bulbes […]car y’a des périodes où tu vis des moments difficiles, comme quand tu fais face à la mort d’un proche, ou son absence, et puis des moments joyeux où t’es heureux de voir des gens […] mon style varie en fonction de mon humeur du moment. »
Ne pas se prendre au sérieux
Au-delà des émotions qui traversent sa musique, on sent surtout chez Hugo l’envie de rester en retrait d’une « société superficielle », dans laquelle il baigne pourtant au quotidien : « Pendant longtemps, j’ai cherché ma place, au milieu de gens qui, avant même de te demander si tu vas bien, te demandent ce que tu fais dans la vie. »
Pour trouver sa place, Hugo s’est glissé dans la peau de Tulipe qui adore singer tout ce beau monde qui l’entoure.
Et il revendique le droit de ne pas trop se prendre au sérieux : « Ok, on fait de la musique, ok, on le fait bien, mais il n’y a pas besoin de bomber le torse, et de faire des grands débats sur la société […] j’ai côtoyé beaucoup de gens dans ma vie, avant de me rendre compte qu’ils étaient superficiels, qu’on ne partageait plus aucune valeur commune […] j’étais un peu le bouffon du roi, à les faire rire, mais je n’avais plus rien à faire avec eux. Du coup, j’ai inversé les rôles, et c’est moi qui me suis mis à les observer et en rire », raconte l’artiste.
Tulipe examine, note, et nous dresse le portrait d’un monde un peu fou, mais sans jamais être aigri : « Je ne suis pas là pour régler mes comptes, ni être méchant. »
« Tulipe et Hugo sont fiers d’être Bas-Rhinois »
Une vie à Paris mais toujours un pied en Alsace
Ce monde qu’il regarde avec humour, c’est celui de son quotidien parisien. Cela fait quelques années qu’Hugo a quitté Strasbourg et s’est installé dans la capitale pour se créer un réseau et développer sa carrière en se rapprochant du milieu du cinéma.
Et même s’il adore sa vie bouillonnante à Paris, Hugo sait qu’après avoir sillonné le monde, et réalisé une partie de ses rêves, il reviendra poser ses valises en Alsace : « Tulipe et Hugo sont fiers d’être Bas-Rhinois. C’est ici [à Strasbourg, ndlr] que je retrouve la légèreté qui me manque à Paris, où je ne croise que des gens superficiels, qui s’inventent des causes. Du coup, j’ai besoin de revenir régulièrement au côté bon vivant de Strasbourg. Et puis ça me rappelle d’où je viens, et ça me remets à ma place. »
Car c’est bien à Strasbourg que Tulipe a fait ses premières pétales : « J’ai commencé le rap sur les Freestyle Mondays, et à l’Elastic Bar qui faisait les premiers open-mics. »
À cette époque, selon lui, il était compliqué de se faire voir quand on faisait du hip-hop dans la capitale alsacienne : « Aujourd’hui y’a plein de gens qui font des trucs, y’a le Chtib, y’a Seamer… mais quand j’ai commencé y’avait rien […] ça bougeait à Nancy, avec Les Gars du Coin, mais y’avait pas la même unité à Strasbourg. Chez nous, c’était chacun dans son coin. »
Bien heureusement, les choses ont évolué, et aujourd’hui la communauté rap strasbourgeoise est bien vivante, et en pleine effusion !
« 4577 Av.», son troisième projet
Loin de ses débuts sur les scènes locales, Tulipe a sorti son troisième projet le 1er mars dernier, l’EP 4577 Av. Dans celui-ci, il raconte son parcours de vie jusqu’à aujourd’hui, comment il est devenu celui qu’il est, comment Tulipe et lui se sont rencontrés, et collaborent ensemble, leurs rapports au monde et aux relations.
Ce bel EP est une excuse toute trouvée pour, en parallèle, sortir un premier clip solo, tourné lors de son dernier road-trip en Asie : « C’est un morceau un peu deep, un peu mélancolique. C’est l’histoire d’un mec qui est dans une ville, mais qui ne sait pas trop pourquoi. Ça parle d’amour, d’amitié, et de la société actuelle […] y’a un dénouement qui explique un peu que j’ai besoin d’elles, au pluriel. Ce sont mes friandises, mes couleurs, mes douceurs, et qu’elles finissent toutes par faner, mais que je vous offre des bouquets quand même », commente Hugo, le sourire dans les yeux, mi-absorbé, mi-amusé par ses propres propos.
2024 sera décidément l’année de la tulipe, puisque l’artiste aura également l’immense honneur de réaliser un de ses rêves, monter sur cette mythique scène parisienne de La Boule Noire, en première partie de Bobine. La légende raconte qu’on y distribuera des tulipes, et ça, c’est quand même un chouette argument pour se jeter dans un train, parce que ce n’est pas tous les jours qu’on a l’occasion de profiter d’un concert à l’intérieur d’un tableau de Van Gogh.
La page Instagram de Tulipe
La page Youtube fleurie de Tulipe
Le projet 4477 de Tulipe sur Spotify