Le festival Ind’Hip-Hop 2023 se clôturait le 2 avril dernier. Depuis 10 éditions, ce festival strasbourgeois met en lumière la scène hip-hop indépendante française et internationale. Cette année, une soirée entière était consacrée aux talents féminins : l’occasion pour nous de vous concocter une sélection de six artistes alsaciennes à suivre absolument !
Il y a quelques années, on vous parlait de ces alsaciens qui avaient percé dans le rap game. Comme l’Alsace ne manque décidément pas de talents, on a voulu cette fois-ci mettre en avant les chanteuses qui commencent doucement à se faire connaître dans le milieu du hip hop.
Allocroco
Malgré son jeune âge, tout juste 20 ans, Allocroco affiche déjà un flow constant, une voix calme avec une diction aux accents de bad girl. Ce flow, Allocroco le veut libérateur : “Je suis quelqu’un qui n’aime pas parler, surtout quand ça ne va pas. Alors écrire m’aide à sortir tout ce que je ressens”. La musique, c’est sa thérapie, et ses textes racontent son histoire, ses peines familiales et amoureuses.
Originaire d’Obernai, Allocroco a commencé à partager sa musique sur les réseaux en 2021, poussée par un entourage qui avait flairé son talent. Un début de carrière prometteur puisqu’elle se trouvait déjà en ouverture du festival Ind’HipHop à la Maison Bleue pour cette édition 2023.
Lexy Walt
Exprimer ses émotions par la musique, Lexy Walt ne semble connaître que ça. Née à Colmar, arrivée à Strasbourg à 18 ans après avoir été choriste pour son frère pendant quelques années, Lexy entre rapidement au Conservatoire en chant jazz, et s’y sent comme un poisson dans l’eau. Issue d’une famille de musiciens, avec une mère pianiste qui composait des chansons pour elle avant même qu’elle naisse, elle a grandi au milieu de mélodies jazz, soul et reggae.
Quasiment tous les jours, sur ses réseaux sociaux, l’artiste partage avec ses followers quelques notes, quelques mots posés sur les touches de son piano. Tantôt hip-hop, tantôt soul, on a la sensation qu’elle cherche constamment à percer les mystères des sons : “J’ai envie de livrer à mon public des fréquences qui vibrent l’amour, la joie, la paix, et la sérénité. Quelque chose de joli qui fait du bien au cœur”.
Yend
Il est difficile d’accoler une étiquette musicale fixe à Yend. À l’image de son histoire, l’artiste de 24 ans ne peut pas rester statique : née à Mulhouse, Yend a vécu en Guadeloupe avant de venir poser ses valises à Strasbourg il y a 5 ans. C’est ici qu’elle fait évoluer son projet musical : “J’ai commencé à rapper en 2015, en Guadeloupe du coup. Mais Yend est née avec la chronique In The Bunker sur RBS [Radio Bienvenue Strasbourg] le 9 février 2018 très précisément”, se souvient l’artiste.
Naviguant entre le rap, le RnB et l’amapiano (un style de musique hybride issue du jazz, apparue en 2012 dans la région du Gauteng en Afrique du Sud), Yend avait envie de créer un son qu’elle ne trouvait pas dans le paysage français : “Concrètement, je fais du son pour moi”, confie-t-elle malicieusement. Son objectif est de trouver l’équilibre parfait pour allier ses envies et ses influences : “J’ai grandi avec un grand frère fan d’MC Solaar, une sœur fan de Beyoncé et Sean Paul, et puis mes parents m’ont inculqué la culture antillaise”. Elle pioche à gauche à droite, joue avec sa voix, avec les textures et sa diction, sur des prods très dance. Yend prend l’exercice comme un jeu, et a su se créer une identité unique sur la scène strasbourgeoise.
Lolie Tai
Pur produit strasbourgeois made in Meinau, Lolie Tai a elle aussi commencé à faire de la musique en brassant toutes ses influences, avec pour objectif d’essayer de créer une patte qui lui est propre : “Je décrirais ma musique comme appartenant au rap, mais j’essaie de mixer plusieurs genres dans mes sons”.
Pour elle, la musique ne doit pas être cadrée, catégorisée, mais libre. Quand elle écrit, elle le fait en fonction de son humeur du moment, ce qui la touche particulièrement ce jour-là, sans s’imposer de thématique. Une écriture spontanée, introspective, à l’image de cette femme sans fioritures. Lolie Tai nous livre, avec une pudeur froide, les complexités des relations amoureuses, et les démons qui la hantent malgré le calme apparent qu’elle affiche.
RACHLL
Arrivée à Strasbourg il y a quelques années pour finaliser ses études, c’est chez nous que Rachll a puisée l’énergie créatrice pour lancer son projet musical. Rachll, c’est l’insolence froide. Un visage fermé, une voix profonde, lascive pour dire des trucs qui percutent.
L’artiste parle d’amour, mais règle ses comptes : “Quand j’écris, j’essaie de rythmer mes émotions, qui sont souvent la colère et la nostalgie”. La colère est le point central du dernier morceau qu’elle a sorti en janvier 2023, Rodéo, dans lequel elle raconte à quel point elle devient incontrôlable lorsqu’elle laisse la fureur prendre le dessus sur tout le reste : “Quand le kick tape, y’a tout qui valse, y’a rien qui m’arrête”. Des paroles sombres sur une instru’ qui donne envie de se trémousser, un morceau à l’image de Rachll : imprévisible.
Kamisa Negra
On ne peut pas parler de la scène hip-hop féminine locale sans évoquer Kamisa Negra. Originaire du Neuhof où elle a grandi et évolue encore aujourd’hui, Kamisa c’est une personnalité marquée, un charisme qui renverse tout sur son passage. Une voix cassée, des variations qui donnent à ses morceaux ce grain particulier, cette sensibilité d’une femme qui n’a pas peur de montrer ses fêlures tout en restant sur ses gardes.
Sa reprise de DKR de Booba et sa participation à l’émission Nouvelle Star en 2017 l’ont fait connaître du grand public. Après l’émission d’M6, Kamisa a refusé de travailler avec certains gros noms de milieu de la musique après qu’on lui ait demandé de s’uniformiser sur un modèle plus commercial.
Après une longue période de silence, de besoin de se recentrer, Kamisa s’est récemment remise à partager ses travaux : “Je m’entoure de gens bienveillants, travailleurs et talentueux. Je me fais plaisir”. Avec toujours une pensée pour sa maman dans tout ce qu’elle fait, l’artiste revient avec une idée fixe en tête : rester authentique : “Chaque titre, chaque musique, chaque parole me permet de raconter une anecdote sur ma vie. Je joue mon rôle à moi”.