La pandémie actuelle nous a éloignés pendant de longs mois des quelque 1 600 restaurants éparpillés dans tout Strasbourg. Mais au fait, quand le mot “restaurant” est-il apparu pour la première fois au cours de l’Histoire ? Qui s’est dit un jour “Tiens, je vais faire à manger à des inconnus contre quelques deniers, on verra si ça leur plaît ?” On s’est posé cette question pour le moins existentielle et on vous propose quelques éléments de réponse.
En France, selon l’Insee, il y aurait 175 000 restaurants éparpillés sur tout le territoire. Un resto pour 382 habitants, tout type d’établissement confondu (food trucks, snacks, restos étoilés). Et le chiffre d’affaires annuel de ces restaurants dépasserait les 50,4 milliards d’euros par an selon un sondage de l’Insee, datant de 2016. Des chiffres qui illustrent parfaitement la place importante du monde de la restauration dans notre belle et joyeuse époque contemporaine. En effet, au XXIe siècle, les restaurants sont légion à travers le monde. Que ce soit à la table d’un kebab claqué ou à celle d’un resto gastro, on s’est tous assis chez une personne que l’on ne connaissait pas pour profiter de sa cuisine. Et tout cela vient en partie d’un certain monsieur Chantoiseau, alias le Armstrong des fourneaux. Allez venez, on va vous raconter.
Il était une fois, avant le restaurant…
L’Histoire nous joue souvent des tours et parfois les époques se confondent. Pour exemple, des archéologues ont récemment découvert ce qu’il semblerait être le plus vieux “fast-food” du monde dans le village italien de Pompéi. Un “thermopolium”, qui daterait de plus de 2000 ans et qui servait alors des plats chauds (poissons, lentilles, viandes) aux habitants. Des plats à emporter présentés dans des jars directement incrustés au comptoir. Un édifice, comme des douzaines d’autres récemment découverts enfouis sous la ville italienne, qui ont été figés dans la cendre lors de l’éruption du Vésuve en l’an 79. Le fameux fast-food au M doré n’a finalement rien inventé. Et en France alors, quand peut-on dire que tout à commencé ?
Il faut attendre la moitié du XVIII ème siècle pour voir apparaître le terme “restaurant” en France. Bien avant son apparition, pendant la longue période du Moyen-Âge, on parle plutôt d’auberge, de taverne ou encore de relais pour désigner ces établissements qui proposaient le couvert aux étrangers, souvent des voyageurs éprouvés. Comme le précise cet article d’Alimentarium, le musée de l’alimentation, on parlait alors de gens de passage à qui l’on proposait le repas, le repos et un service d’attelage pour leurs chevaux.
Mais c’est à l’aube de la Révolution Française de 1789, que le terme spécifique “restaurant” est apparu en France. Une date clé de l’Histoire contemporaine qui, on va le voir plus bas, a bien aidé à la démocratisation et à l’expansion de ce modèle d’établissements accessibles à tous, que l’on appellerait désormais des restaurants.
Paris : la révolution des restos !
C’est donc dans la France du XVIIIe siècle, et plus particulièrement à Paris, que le terme “restaurant” naît 1765. C’est du côté de l’actuel quartier du Louvre que le terme s’est démocratisé et à commencé à entrer dans le langage commun. C’est donc cette année-là que monsieur Mathurin Roze De Chantoiseau ouvre ce qui semble être le premier restaurant de notre époque moderne.
Devant son établissement, ce brave monsieur que l’on surnommait “Boulanger” aurait inscrit ceci sur sa devanture : “Venez à moi, ceux dont l’estomac souffre, et je vous restaurerai”. Son établissement aurait servi ce que l’on appelle des bouillons restaurants (qui restaurent). Des préparations garnies de viandes (comme le pied de mouton) et selon les recettes agrémentées de racines, d’oignon, d’herbes ou encore d’épices.
Mais alors, qu’est ce qui différencie ce nouveau “restaurant” des tavernes et autres auberges du Moyen-Âge ? C’est simple : on y trouve désormais des tables individuelles et mieux encore, des menus ! On peut y choisir ce qu’on veut manger et ce menu est même parfois affiché devant l’établissement en question, une petite révolution ! Si celui-ci ne plaît pas au passant, il passe son chemin et en choisit un autre plus loin. Le début de la concurrence entre restaurateurs ? Peut-être bien. En tout cas, la taverne réservée aux voyageurs semble bien loin. Désormais, aller manger au restaurant est un choix et non plus un besoin, et c’est même un plaisir. Un sentiment que l’on partage alors en famille et avec des amis, car la cuisine elle-même se diversifie. Puisqu’en effet autrefois, sur ces grandes tables collectives, on n’avait pas le choix : on mangeait un plat copieux mais imposé, avant de reprendre la route et puis basta ! À cette époque, et c’est encore souvent le cas aujourd’hui, les restaurants proposent leurs propres plats que les clients viennent retrouver, des mets que l’on appelle désormais des “plats signatures”.
C’est donc dans le Paris du XVIII ème siècle que le fait de sortir de chez soi pour manger, non plus à sa table mais à la table d’un autre, aurait commencé à entrer timidement dans les mœurs. Et des siècles plus tard, on s’en réjouit encore !
Mais pourquoi a-t-il fallu attendre la Révolution française pour que le concept se démocratise ? Simplement parce qu’avant, bien manger était un privilège de nobles. Les Français, pour la plupart des paysans, se nourrissaient par besoin et non pas pour montrer leurs belles assiettes sur Instagram. De plus, l’arrivée en masse des provinciaux dans la capitale et le départ des aristocrates qui quittaient Paris a redistribué les cartes. Et oui, tous ces aristos avaient des servantes, des valets, et quand ils ont pris leurs jambes à leur cou, “leur personnel” est resté. Il fallait bien les nourrir ces braves gens. Ils sont donc allés au resto et la boucle était bouclée !